UNIVERS DES ETUDIANTS EN LICENCE 1 DE L\'ISAD

UNIVERS DES ETUDIANTS EN LICENCE 1 DE L\'ISAD

epistemologie et methodologie en bio anthropologie

 

Introduction

L’anthropologie désigne aujourd’hui l’ensemble des disciplines qui se consacrent à l’étude des populations humaines à la fois sous l’angle de la morphologie (anthropologie biologique et paléoanthropologie) et sous celui des formes de sociétés contemporaines (ethnologie, anthropologie sociale et culturelle) ou anciennes (archéologie et préhistoire). Cette acceptation est assez moderne puisqu’il y a encore peu de temps, l’anthropologie désignait l’ensemble des savoirs sur l’homme mais dans une vision souvent « naturaliste ». Durant la première moitié du XXe siècle, l’anthropologie physique est devenue l’étude des caractères

physiques et biologiques de l’homme. Dans les pays anglo-saxons, le sens du mot anthropology est beaucoup plus vaste puisqu’il englobe aussi, la primatologie, la préhistoire et l’ethnologie.

L'anthropologie biologique possède un champ d'investigation assez vaste, se situant à l'interface du biologique et du social. Elle étudie à la fois l’évolution de l’homme et sa diversité biologique actuelle tout en prenant compte à chaque fois, non seulement la dimension biologique, mais aussi l’influence du rapport Nature/Culture.

Elle se situe à l’interface de la biologie et des sciences humaines et intègre les apports d’autres disciplines : biologie, anatomie, génétique et biologie moléculaire, biodémographie, médecine, statistiques, histoire, linguistique, ethnologie… Au XIXe siècle, elle demeure dans le cadre élaboré par les naturalistes du XVIIIe siècle (Linné et Buffon) et Broca en 1860 qui définit l'anthropologie «physique» comme l'«histoire naturelle de l'homme». Cette discipline est aujourd’hui subdivisée en « sous-spécialités » : génétique des populations, biologie humaine (variabilité humaine actuelle et processus d’adaptation à l’environnement et aux conditions pathogènes), paléoanthropologie (étude des populations du passé à partir de matériel fossile principalement os et dents) et anthropologie funéraire, primatologie (étude des primates non humains), écologie humaine, biodémographie, anthropologie médico-légale… Elle se distingue de l’anthropologie sociale et culturelle qui se rapproche de l’ethnologie et de la sociologie. L’anthropologie biologique (ou encore l’anthropobiologie) connaît actuellement une deuxième jeunesse parallèlement aux progrès techniques dans les domaines de la génétique, de l’imagerie, de l’informatique et des biostatistiques.

Il paraît impossible d’en établir de manière exhaustive un historique tant ses racines sont multiples et profondes au sein des sciences biologiques et humaines.

 

En définitive, la relation entre tous les individus de la population permet de définir l’expression biologique de l’anthropologie.

L’importance des questions méthodologiques et épistémologiques pour l’anthropologie biologique découle de plusieurs raisons:

- la nature animale de l'homme et son étroite parenté avec les autres animaux (référence à la primatologie, l’éthologie) ;

- l’impossibilité d'interpréter l'évolution humaine exclusivement en terme de survie du plus apte (lamarckisme et darwinisme) ; ceci renvoie à une conception pragmatique et empirique du savoir anthropologique (transposition du biologique au social) ;

- la plasticité morphologique de l'homme (étude de l’adaptabilité au moyen de la biométrie humaine) ;

- la similitude fondamentale entre toutes les populations humaines (les plus grandes variations sont liées au dimorphisme sexuel et à l'âge) ;

- la micro-évolution au sein d’homo sapiens ne peut pas se penser uniquement en terme « naturaliste » mais doit intégrer la culture : l’anthropologie biologique doit donc être « bio-culturelle » ;

- les conséquences pratiques sur l’homme et son environnement, donc soumise à la pression des intérêts;

- l’appartenance aux sciences sociales, donc soumise à la pression des idéologies.

En définitive, l’Anthropologie biologique est une discipline qui regroupe plusieurs dimensions sur lesquelles reposent sa scientificité et sa méthodologie dans l’univers de la recherche.  

 

I-Objectifs

Ce cours consacré à la formation épistémologique et méthodologique en bioanthropologie des étudiants inscrits en Licence 1 en Anthropologie vise l’acquisition de la culture scientifique et la démarche en bioanthropologie.

Les enseignements proposés, alternent en CM et TD.

 

II- Naissance et épistémologie d’une discipline majeure de l’Anthropologie

 

II-1. Naissance et développement de l’Anthropologie biologique

 

L’anthropologie biologique naît véritablement au XIXe siècle. En Europe et en particulier en France, la discipline se développe à partir de la médecine et de la biologie, en Amérique du nord, elle embrasse un cadre plus large incluant l’anthropologie sociale et culturelle qui chez nous correspond à l’ethnologie. L’anthropobiologie est d’abord uniquement morphologique, « anatomique » ou « physique » se basant en particulier sur l’ostéologie. C’est le crâne, structure osseuse jugée la plus noble chez l’homme, qui va susciter le plus d’études et devenir une sous-spécialité dénommée craniologie. Johann Friedrich Blumenbach (1752-1840) est considéré comme le fondateur de l’anthropologie physique. Nommé professeur de médecine à 24 ans, il a été à l’origine de la craniologie, de l’anatomie comparative, et de la séparation homme/grands singes. Il individualise cinq « races » au sein de l’humanité : mongoloïde, américaine, caucasienne, éthiopienne, et malaise. Le terme « caucasien » (qui n’implique pas une origine dans les monts du Caucase mais qui était synonyme de « peuple magnifique » dans cette classification racialiste) persiste encore dans la littérature médicale actuelle surtout de langue anglaise. En France, Broca et de Quatrefages effectueront de nombreux travaux de craniologie. Les débuts de l’anthropologie sont teintés de théories racialistes qui culmineront malheureusement lors de la Seconde Guerre mondiale avec le national-socialisme hitlérien.

La préhistoire, discipline également très « française » comporte de nombreuses passerelles avec la paléoanthropologie. La réalité du concept d’homme préhistorique va apparaître grâce à l’étude de couches géologiques, la découverte d’outils de silex façonnés par l’homme et de restes fossiles animaux par Casimir Picard (médecin) dans la Somme. À partir de tout ceci, Jacques Boucher de

Perthes, un des « pères » de la préhistoire, propose la dénomination « d’homme antédiluvien » (1837). Deux disciplines vont ainsi voir le jour : la préhistoire et la paléontologie humaine qui s’intégreront à l’anthropologie. C’est la période « de la ruée vers l’os » durant laquelle ces problématiques vont attirer tous types de chercheurs comme par exemple Édouard Lartet (1801-1871), avocat gersois, qui fouille la grotte d’Aurignac en Ariège, démontre la coexistence ancienne de l’homme avec des espèces disparues, propose une chronologie de la période préhistorique en y individualisant le néolithique et corrèle la taille du cerveau avec la dynamique évolutive.

Il sera nommé sur le tard à la chaire de paléontologie du Muséum d’histoire naturelle de Paris. La Société d’Anthropologie de Paris fondée en 1859 par le chirurgien Paul Broca devient la première société savante à focaliser les recherches sur ce thème au travers de sa revue Les Bulletins et Mémoires de la Société d’Anthropologie de Paris. Dans les années qui suivent, les découvertes de sites préhistoriques vont se succéder dans la région franco-cantabrique (grottes de Dordogne, de Haute Garonne, d’Altamira…) livrant les témoignages artistiques de ces temps lointains.

En 1856, près de Düsseldorf en Allemagne, dans la vallée du Neander, est découvert une calotte crânienne aux caractères morphologiques particuliers. Ce vestige osseux, d’abord faussement attribué à un cosaque tué pendant la guerre ou à un individu atteint de rachitisme (hypothèse émise par le réputé anatomiste allemand Rudolf Virchow), est en fait celui d’un homme de Neandertal. Il est d’abord considéré comme le « chaînon manquant », puis ensuite comme le représentant d’une autre « humanité » concurrente des sapiens (les premiers crânes néandertaliens furent en fait exhumés dans la région de Liège en 1830 et à Gibraltar en 1848 mais leurs caractéristiques particulières n’interpellèrent personne et leur « identité » ne fut révélée que bien plus tard). Cette découverte marque pour beaucoup de spécialistes les débuts de la paléoanthropologie. Marcellin Boule (1861-1942), fondateur de l’Institut de paléontologie humaine, est l’auteur de la première étude complète sur l’homme de Neandertal dans son ouvrage L’homme fossile de la Chapelle-aux-Saints paru en 1911. C’est selon lui un être bestial qui ne saurait être l’un de nos ancêtres. Il y aura alors une individualisation de l’archéologie préhistorique, discipline basée sur l’examen des vestiges, à la suite de fouilles des produits de l’activité humaine (« les archives de la terre » selon Leroi-Gourhan). L’Abbé Breuil (1877-1961) sera considéré comme le « pape » de l’art paléolithique. Avec la mise en place de repères chronologiques, on se lance dans l’étude des coupes stratigraphiques, la climatologie, la description de types humains anciens et d’industries (ethnologie préhistorique). En 1859, Darwin publie sa théorie sur l’origine des espèces et la sélection naturelle. L’interprétation exclusivement religieuse des origines de l’Homme (créationnisme) va céder sa place à une véritable vision scientifique. En 1866, Grégor Mendel, un moine de Silésie, décrit les règles de transmission des caractères génétiques en croisant des plants de petits pois dans son monastère de Brno. Ce travail n’aura aucun écho au sein de la communauté scientifique de l’époque et ces mécanismes fondamentaux seront « redécouverts » plusieurs décennies plus tard par d’autres chercheurs. Au début du XXe siècle, c’est l’avènement de la séro-anthropologie avec la découverte du premier système de groupes sanguins, le système ABO (Landsteiner, 1900). L’une des premières publications sur ce thème proposa une classification « raciale » basée sur la distribution des groupes érythrocytaires ABO chez 500 soldats de diverses origines du front de Salonique lors de la première guerre mondiale en défi nissant un « index biochimique » A/B (Hirszfeld & Hirszfeld, Anthropologie 1919). À l’aube des années 1930, Fisher, Haldane et Wright jettent les bases de la génétique des populations. Pierre Teilhard de Chardin (1881-1955) paléontologue français et jésuite du début du XXe siècle a associé l’évolution humaine à son rapprochement vers Dieu. Arthur Ernest Mourant (1904-1994), hématologiste mais aussi géologue, chimiste, et généticien (!), démontre l’intérêt anthropologique de la distribution des groupes sanguins au sein de nombreuses populations. En France, le concept d’hématologie géographique et d’hémotypologie a été développé par deux médecins hématologistes, Jacques Ruffi é (1921-2004, titulaire de la chaire d’anthropologie physique au Collège de France) en association avec Jean Bernard (1907-2006). L’invention de l’électrophorèse des protéines permet d’étendre les possibilités d’étude de la variabilité humaine. Elle sera par exemple appliquée à la séparation des différents types d’hémoglobine (Hb). L’Hb S sera la première « pathologie moléculaire » mise en évidence en 1949 par Pauling. La découverte du système HLA dans les années 1970 par Jean Dausset ouvre encore plus largement le champ de la biologie des populations. Dans les deux dernières décennies du XXe siècle la génétique fait son entrée dans l’univers de l’anthropobiologie.

Un personnage important de la génétique des populations est Luca L. Cavalli Sforza, auteur de l’ouvrage de référence The history and geography of human genes, paru en 1994. Cet excellent chercheur et vulgarisateur a étudié dès les années 1960 la distribution d’un grand nombre de caractères selon les populations. Au niveau de l’Europe, il a individualisé des populations « à part » comme les Sardes, les Basques ou les Lapons. Il a élégamment présenté ses résultats sur des cartes géographiques synthétiques où il met en relief les corrélations de la génétique avec des faits historiques ou culturels. C’est un farouche défenseur de l’approche multidisciplinaire dans laquelle l’anthropologie côtoie la linguistique, l’histoire, l’archéologie… On dispose maintenant de techniques performantes comme la PCR ou le séquençage permettant d’étudier les polymorphismes de l’ADN. Alors que les découvertes de fossiles d’hominidés se succèdent à travers le monde, les progrès dans la connaissance de l’histoire de cette famille sont en ce début de XXIe siècle le fruit de la confrontation des données entre deux types d’anthropobiologistes ceux de « l’os » et ceux de « l’ADN ».

 

II-1 Les théories majeures  de l’anthropologie biologique

 

III-1-1. Darwin et les concepts d’évolution et de sélection naturelle

 

La théorie de Darwin a été confirmée et « ressuscitée » par les données modernes de la biologie moléculaire et de la génétique. Elle constitue la base du raisonnement en anthropobiologie. Avant Darwin, la vision du monde était surtout dictée par les préceptes religieux. Les formes de vie sur terre étaient considérées comme les produits de la création divine. Certains calculs effectués d’après l’Ancien Testament stipulaient que la terre avait 6 000 ans et que les hommes avaient été créés en 4004 avant J.-C. Les fossiles étaient sensés représenter les survivants du déluge biblique voire l’oeuvre du diable. Néanmoins, des conceptions scientifiques du monde vivant avaient déjà été proposées. Carl von Linné avait énoncé en 1735 une classification des êtres vivants (taxinomie) au sein de laquelle sera inclus l’Homme en tant qu’Homo sapiens.

L’embryologiste allemand Haller expose en 1744 sa théorie de l’humunculus qui considère que l’être humain est déjà formé à toute petite échelle dans les spermatozoïdes et qu’il verra simplement sa taille augmenter au cours de la gestation au sein du « réceptacle » utérin. Georges Cuvier (1769-1832) soutient la théorie du fixisme qui prétend que les espèces vivantes sont immuables et incapables de se transformer. Les notions même d’évolution et de sélection avaient cependant déjà été évoquées avant Darwin. Un économiste britannique (et pasteur) Thomas Robert Malthus dans son ouvrage Essay on the principle of population (1798), prétend que la progression démographique excède celle des ressources, ainsi, tous les descendants d’une génération ne peuvent survivre. Malthus prônait un contrôle des naissances. Jean Baptiste Lamarck (1744-1829) est véritablement le premier théoricien de l’évolution. Il propose l’idée de transformisme : les individus s’adaptent en développant ou atténuant certaines fonctions selon l’usage ou le non-usage de l’organe correspondant (exemple classique de la girafe dont le cou s’est allongé car ces individus qui devaient consommer leur nourriture végétale de plus en plus haut du fait de l’assèchement du climat ont transmis ce caractère à leur descendance).

Pour Lamarck, il existe une hiérarchie dans le monde vivant, il croit au phénomène de génération spontanée et à une hérédité des caractères acquis. Selon William Patey (1802), « il ne peut y avoir de créature sans créateur » (La théologie naturelle).

Charles Lyell, géologue, dans son ouvrage Les principes de géologie (1830), considère que la terre a évolué progressivement et a accueilli au fur et à mesure de nouvelles espèces.

Charles Darwin, en observant des fossiles (témoins chronologiques de séquences évolutives) et en effectuant des travaux d’anatomie comparée (discipline initiée par Cuvier), il acquiert la certitude de l’évolution des formes de vie dans le temps. Il s’immerge dans la forêt tropicale au Brésil, côtoie les peuples de la Terre de Feu, découvre le corail et les atolls d’Océanie… Aux îles Galápagos, il constate de visu l’importante variabilité entre diverses espèces animales et végétales qui partagent pourtant un fort degré de parenté. Ces différences reflètent pour lui une nécessité, celle d’une meilleure survie de ces espèces dans un milieu donné, c’est le concept de sélection naturelle.

 

II-1-2. De la sélection sexuelle

 

L’ouvrage The descent of Man and selection in relation to sex (1871) constitue une extension à l’Homme de la théorie de la descendance avec modifications. Comme toute autre espèce, l’Homme « descend » d’autres formes préexistantes comme le suggère l’anatomie comparée. Darwin y souligne la notion de variabilité sur le plan de l’anthropométrie, de l’éthologie ou de la sociologie (peuples « civilisés » versus « exotiques »). Il amène ainsi la biologie vers l’anthropologie sociale. Dans le monde

civilisé, c’est l’éducation qui gouverne le devenir des groupes humains et non plus la sélection naturelle. La sélection sexuelle représente un phénomène plus subtil que la sélection naturelle. C’est « l’avantage que certains individus ont sur d’autres de même sexe et de même espèce sous le rapport exclusif de la reproduction ».

Elle est illustrée dans la nature par la rivalité des mâles qui vont développer certaines caractéristiques favorables pour la possession des femelles (exemples : crinière plus épaisse du lion, plumage plus éclatant du paon ou chant plus mélodieux chez l’oiseau). Les caractères sexuels secondaires sont plus accentués chez les mâles des espèces polygames. Darwin pense que la sélection sexuelle pourrait expliquer la diversité des types humains selon la géographie que l’on a appelé « races ». Il prend des exemples qui illustrent que les canons de la beauté varient selon les zones du globe : pour les Chinois, c’est une face et un nez larges et aplatis, des pommettes hautes et une obliquité des yeux (les premiers occidentaux y étaient décrits comme « ayant un bec d’oiseau avec le corps d’êtres humains ») ; pour les Hottentots, la partenaire la plus recherchée est celle qui possède les fesses les plus proéminentes (concentration de graisse ou stéatopygie). L’avantage reproductif conféré par ces caractéristiques spécifiques à chaque population est ainsi susceptible d’avoir accentué les différences entre les phénotypes humains au fil du temps.

 

II-2-Epistémologie de l’Anthropologie Biologique

 

II-2-1 Contexte historique de l’épistémologie

 

L’épistémologie, d’un point de vue étymologique est formée d’un préfixe « épistémè » qui signifie science et d’un préfixe « logos » qui veut dire discours.

L'épistémologie (aussi appelée théorie de la connaissance) est l'étude de la nature de la preuve. Des questions d'épistémologie surviennent en permanence : comment, dans une discipline donnée, la connaissance s’opère-t-elle ? Quel est, pour un champ déterminé, la manière dont s’établit le savoir ? Ou bien, quels sont les procédés utilisés par une science ou une discipline pour constituer son ou ses objets ?

 

Piaget (1967), propose quelques distinctions essentielles. Il distingue d’abord la logique de l’épistémologie.

logique = étude des conditions formelles de vérité.

épistémologie = étude des conditions d'accession et des conditions constitutives des connaissances valables, c'est-à-dire, pour Piaget, scientifiques.

L’épistémologie est le discours de la science. Etant donné que la science est un discours sur la réalité, elle désigne à la fois des activités productrices de connaissances et les résultats des activités : théories, méthodes de travail et règle de comportement.

L’épistémologie est donc la théorie de la science. Elle truste la méthode spécifique des sciences, entre processus les plus généraux de la connaissance, leur logique et leurs fondements. Elle évalue la portée du savoir qu’elle construit et en dégage le sens pour l’ensemble des pratiques humaines. L’épistémologie est donc la théorie de la science en général, c’est-à-dire la théorie qui essaie de définir les méthodes, les fondements, les objets et les finalités de la science.

 

Depuis l’antiquité grecque, les champs d’études de l’épistémologie étaient occupés par la logique, la philosophie des sciences, l’histoire des sciences, la théorie de la connaissance et la sociologie des sciences dont le but est de distinguer le bon grain de l’ivraie afin de déterminer des critères de scientificité. Mais aujourd’hui, ces champs ne sont-ils plus d’actualité ? Répondre par l’affirmative reviendrait à dire que l’épistémologie est caduque et que son objet n’a plus de sens. Dans cette perspective, elle devrait donc repréciser ses champs d’action.

En fait, l’épistémologie s’est détachée de la philosophie des sciences pour se constituer au XXè siècle en une discipline autonome en partie. La philosophie es sciences s’intéresse à la connaissance en général quand l’épistémologie s’investit à la connaissance scientifique.

L’histoire permet à l’épistémologie d’aborder les sciences de deux manières, à savoir l’étude diachronique de leur développement parce qu’une science évoque indéniablement dans ses concepts, ses théories, ses méthodes.

La science progresse par phase : phase normale-phase révolutionnaire-phase normale. Ainsi, la connaissance scientifique ne progresse par accumulation progressive, mais par révolution en rupture. Autrement dit, l’épistémologie contemporaine se préoccupe de l’aspect continu ou discontinue du savoir empirique. Ainsi, c’est à travers la connaissance ordinaire que l’épistémologie donne sens aux connaissances scientifiques.

 

De tout ce qui préccède, à quel degré de certitude la bioanthropologie est-elle capable d’accéder à partir des moyens dont elle dispose ? Quelle sorte de vérité propose-t-elle ?

 

En formulant notre question : l’anthropologie biologique  est-elle scientifique ? C'est la notion normative du terme « scientifique » qui fait véritablement autorité. Ce qui nous importe, c'est d'établir si l’Anthropologie biologique est vraiment scientifique.

L'épistémologie n’étant pas formelle est toujours associée, implicitement ou explicitement, à une ontologie, c’est-à-dire à des considérations sur la nature des choses. Par conséquent, l’épistémologie d'un objet (ou domaine) de connaissances donné ressort à la fois d'une épistémologie générale et d'une épistémologie particulière: en fonction des disciplines scientifiques (épistémologie de la physique, épistémologie de la biologie, épistémologie de la sociologie, etc.); en fonction des objets de connaissance eux-mêmes (qui peuvent être au croisement de plusieurs disciplines scientifiques).

Cette distinction caricature à la fois les sciences de la matière et les sciences humaines. Toutes les sciences sont nomothétiques, car elles s’efforcent de dégager des lois objectives et contraignantes. Toutes les sciences sont aussi herméneutiques, car pour constituer un fait ou le vérifier, il faut en définitive trouver ou retrouver dans une intuition une abstraction exprimée dans un énoncé.

Par ailleurs, une autre caractéristique du champ de l'anthropologie est son approche  bioculturelle. C'est-à-dire, l'anthropologie cherche à décrire et expliquer les interactions entre notre nature comme espèce biologique et, le comportement culturel qui constitue pour notre  espèce le plus saisissant et important trait. 

Mais toutes ces différentes dimensions rendent l'étude de l'espèce humaine complexe et excitante, et ainsi l'anthropologie, la discipline qui prend ce défi, est typiquement divisée en un certain nombre de sous-champs (le schéma 1).  L'anthropologie culturelle  est l'étude de la culture comme caractéristique de notre espèce et de la variation de l'expression culturelle parmi les groupes humains.

 

 

ANTHROPOLOGIE

ANTHROPOLOGIE BIOLOGIQUE

ANTHROPOLOGIE CULTURELLE

ANTHROPOLOGIE LINGUISTIQUE

ARCHEOLOGIE

Culture comme trait de caractère de l’espèce ;  Variation de l’expression culturelle humaine

Archéologie préhistorique ; Archéologie historique ; gestion des ressources culturelles

Lingustique descriptive ; Evolution du langage.

Biodiversité ; primatologie ; Ecologie humaine ; génétique.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Fig. 1. Sous-champs majeurs de l’Anthropologie

 

Chaque sous-champ présente d’autres spécialités. Pour l'anthropologie biologique, ces spécialités s’expriment mieux termes d’interrogations que nous cherchons à répondre au sujet de la biologie humaine :

Quelles sont les caractéristiques biologiques qui définissent l'espèce humaine ? Comment nos gènes codent-ils ces caractéristiques ? Juste combien les gènes contribuent-ils à nos traits ? Comment l'évolution fonctionne-t-elle, et comment s'applique-t-elle à nous ?

Quel est la preuve physique de notre évolution ? C'est la spécialité désignée sous le nom  de paléoanthropologie,  de l'étude des fossiles humains basés sur notre connaissance de biologie squelettique, ou  de l'ostéologie  qui s’en occupent.

Quelle sorte de diversité biologique voyons-nous dans notre espèce aujourd'hui ? Comment a-t-elle évolué ? Que les traits variables signifient-ils pour d'autres aspects de nos vies ? 

Que pouvons-nous nous renseigner sur la biologie de nos parents étroits, les primates non humains, et que cela peut-il nous indiquer au sujet de nous-mêmes ? Cette spécialité s'appelle  la primatologie.

Que connaissons-nous de  l'écologie humaine,  les rapports entre les humains et leurs environnements ?

Comment pouvons-nous nous appliquer toute cette connaissance ? 

 

 

II-2-2.Scientificité de l’anthropologie biologique

 

L'anthropologie biologique  (ou  la bioanthropologie   ou  l'anthropologie physique) doit être définie dans le contexte de l'anthropologie de l'ensemble, et ceci est à la fois simple et complexe.  L'anthropologie, en général, est définie comme l’étude de l'espèce humaine. Autrement dit, les anthropologues étudient l'espèce humaine comme n'importe quel zoologiste étudierait une espèce  animale.  En somme, elle examine chaque aspect de la biologie du patrimoine génétique, l’anatomie, la physiologie, le comportement, l’environnement, les adaptations, et l’histoire  évolutionnaire soumis à la  contrainte des corrélations parmi ces aspects.

Ce genre d'approche, examinant un sujet en se concentrant sur les corrélations  parmi ses parties s'appelle holistique.  L'approche holistique est le cachet de l'anthropologie. Nous comprenons que toutes les facettes de nos espèces, notre biologie, notre comportement, notre passé, et notre présent agissent l'un sur l'autre pour faire de nous ce que sommes. Mais certaines matières sont si complexes qu’elles requièrent la nécessité d'être étudié séparément  juste comme pour prendre des cours d'histoire, de sciences économiques, de psychologie, d’art, d’anatomie, et ainsi de suite. Le travail des anthropologues en pareil cas consiste à rechercher les raccordements parmi ces sujets, parce que dans la vie réelle, elles ne sont absolument pas séparées.

Mais ici, elle semble compliquée, car la caractéristique essentielle du comportement de nos espèces relève de la  culture, et le comportement culturel n'est pas programmé dans nos gènes, comme cela se présente par exemple, pour une grande partie du comportement des oiseaux et pratiquement de tout le comportement des fourmis. La culture humaine est apprise. Nous avons un potentiel biologique pour le comportement culturel en général, mais précisément, comment  nous nous comportons vient à nous par toutes nos expériences. Apprendre une langue par exemple. Tous les humains naissent avec la capacité d'apprendre une langue, mais c'est la langue parlée par nos familles respectives et nos plus cultures proches qui déterminent quelle langue nous parlerons. L'anthropologie biologique regarde notre espèce d'un point de vue biologique. 

 

La plupart des anthropologues ne portent pas les manteaux blancs de laboratoire ou ne travaillent pas avec des tubes et des produits chimiques à essai. Beaucoup d'anthropologues étudient les choses qui ne peuvent pas être directement observées en nature ou être recréées dans le laboratoire parce qu'elles se sont produites dans le passé. Mais la bioanthropologie  est  une science, au même titre que beaucoup d’autres, à l’image de la chimie, la physique et la biologie. 

 

Une image populaire d'un scientifique est celle d'une encyclopédie en marche. La Science est souvent vue comme un rassemblement de faits : juste pour indiquer que les scientifiques savent beaucoup de faits. 

Les faits sont certainement importants pour la science. Ils sont la matière première de la science, à travers l'utilisation de données scientifiques, rassemblées par l'observation et l'expérimentation.

Mais le but de la science est de relier et d’unifier des faits afin de produire, par la suite, de larges principes connus sous le nom de  théories. La Science,  en d'autres termes, est une méthode d'enquête, une manière de répondre à des questions au sujet du monde. Mais comment la science fonctionne-t-elle ? La science est-elle la seule méthode valide et logique pour expliquer le monde autour de nous ?

 

Théorie : Une idée générale soutenue qui explique un grand ensemble de modèles effectifs et prévoit d'autres modèles.

La science : la méthode d'enquête qui exige la génération, l'essai, et l'acceptation ou le rejet des hypothèses.

 

Comme des scientifiques, nous devons répondre à ces questions en s’appuyant sur un ensemble de règles spéciales découlant de la méthode scientifique.

La méthode scientifique implique un cycle d’étapes, pouvant commencer n'importe où sur le cycle et en réalité. L'étape la plus fondamentale est de poser des questions auxquelles nous souhaitons répondre ou décrivant les observations que nous souhaitons expliquer. Nous recherchons alors des modèles, des raccordements et des associations de sorte que nous puissions produire des conjectures de connaissances relatives aux explications possibles. Ces conjectures de connaissances s'appellent  les hypothèses.

 

Peut-on parler de l’objectivité scientifique de la bioanthropologie ? Quel est le degré de certitude  à la lumière des courants de l’épistémologie ?

-          Le rationalisme

 « Toute connaissance provient essentiellement de l’usage de la raison » (Kant, Descartes, Leibnitz). → l’expérimentation est facultative ↔ la bioanthropologie ….. ?

-          L’empirisme

« Toute connaissance provient essentiellement de l’expérience … Les observations permettent de rendent compte ». Dans ce contexte où le fonctionnement a pour but de produire des idées qui permettent de  faire de nouvelles expériences ↔ la bioanthropologie … ?

-          Le positivisme

Le privilégie le management de l’observation et de l’expérimentation. Il se fonde sur des faits mésurables ↔ la bioanthropologie … ?

-          Le constructivisme

«Le constructivisme considère toute connaissance scientifique au même titre que n’importe quelle autre connaissance construite à partir d’expérience cognitive » ↔ la bioanthropologie … ?

-          Le  réalisme

« Les modèles scientifiques sont des constructions destinées à prédire certaines sphères d’une réalité objective qui existe indépendamment de l’observateur » ↔ la bioanthropologie … ?

-          L’objectivité

L’idéal de tout discours scientifique est la production d’une connaissance objective. La science vise à produire des connaissances rigoureuses pouvant être soumises à la critique et aux épreuves de récitation et de vérification.

 

II-2. La construction moderne de l'objet en anthropologie biologique.

 

Contrairement à l'anthropologie physique "typologiste", qui s'inspire d'une conception de l'hérédité antérieure aux découvertes de Mendel et d'une vision fixiste de l'humanité, l'anthropologie biologique (ou anthropobiologie), ne se contente pas de décrire la diversité biologique humaine; elle reprend paradoxalement une partie du vieux projet de l'anthropologie, à savoir d'essayer d'en comprendre la nature et la genèse.

Mais, contrairement à la pensée typologiste qui rassemble sous une même dénomination l'individu et la population (= le type), l'anthropologie biologique va partir simultanément de ces deux niveaux fort distincts.

Biologiquement, l'individu varie sans cesse, de la naissance à la mort, au long de processus de croissance, de maturation puis de vieillissement. L'anthropologie biologique part aussi de la constatation que deux ordres de facteur interagissent : ceux relevant du génétique et ceux relevant du milieu. Elle se trouve face à des morphologies individuelles, donc des phénotypes, qui sont le résultat de l'expression du génotype et de l'action du milieu.

Depuis Darwin et l'hypothèse de la souche humaine unique, toute théorie se référant à un quelconque concept de race ne peut se développer que dans le cadre d'une pensée évolutionniste. En théorie, ce phénomène de "raciation" requiert deux conditions: l'isolement sexuel et la sélection naturelle.

L'isolement sexuel provoque un paysage génétique et morphologique singulier, due en particulier au phénomène de dérive génique. Ce n'est plus la présence d'un caractère qui importe, mais sa fréquence dans la population.

L'apport de la génétique devient essentiel pour comprendre les mécanismes de l'hérédité. Le cadre conceptuel changeait car les individus d'une génération G + 1 n'étaient plus le produit d'un "mélange" entre deux parents de la génération G, mais des individus différents résultant d'une recombinaison génétique.

C'est pourquoi, si certains ont pu croire, dans un premier temps que la génétique allait permettre de fonder une nouvelle typologie raciale plus "moderne", nous verrons que les travaux en génétique humaine ont vite montré, finalement dès les recherches sur les groupes ABO, que la variabilité génétique était considérable.

Dès lors, l'anthropologie devait définitivement rompre avec la pensée typologiste, puisqu'elle sa seule raison d'être devenait l'étude des processus d'évolution, donc de la variation au sein de notre espèce (Gomila, 1976; Hiernaux, 1980); les autres branches de la biologie étaient là pour étudier notre espèce (anatomie, physiologie, génétique,...).

L'anthropologie biologique devenait une discipline reposant entièrement sur un modèle de pensée populationniste.

 

 

III-L’UTILISATION ABUSIVE DU SAVOIR ANTHROPOLOGIQUE OU LES DEVIATIONS EPISTEMOLOGIQUES

 

       Les données fournies par le savoir anthropologique vont servir de prétexte à certains extrémistes pour  imaginer des idéologies racistes ou manifester des comportements de  mépris vis-à-vis de certains peuples ou d’individus naturellement défavorisés. Il s’agit parfois aussi de théories scientifiquement construites. Ainsi verront le jour le darwinisme social, le racisme, l’eugénisme, la sociobiologie et la psychologie évolutionniste. 

 

III-1 Le racisme  et la psychologie raciale

ü  Le racisme

      

          Le privilège de la « race » blanche ou plus précisément de la nation Aryenne, a été réaffirmé au XIX e siècle avec la contribution de certains auteurs comme Joseph-Arthur Comte de GOBINEAU. Diplomate et écrivain il est connu pour son Essai sur l’inégalité des races humaines.  Dans cet ouvrage il examine l’origine de l’humanité et celle des races, puis « démontre leur inégalité en force, en beauté et surtout en intelligence. Ses intentions sont claire affirmer la supériorité de la « race » blanche par la hiérarchie des « races » conformément au contexte idéologique et politique de son époque et ce malgré l’abolition de l’esclavage en 1848. Il affirme que l’origine de l’humanité est des  « races » est multiple et que le Blanc, le Nègre, le Jaune appartiennent à des espèces différentes, qui sont apparues ou ont été créées séparément. Cela lui semble s’imposer à la vue de différences physiques et mentales qui lui sont évidentes. Pour lui à la vision d’un « Nègre de côte occidental d’Afrique (….) l’esprit se rappelle involontairement la structure du singe et se sent enclin à admettre que les races nègres (…) sont sorties d’une souche qui n’a rien de commun, sinon des rapports généraux dans les formes, avec la famille mongole »[1] Et quand il en arrive aux habitants de l’Europe, il leur trouve « une telle supériorité de beauté, de justesse dans la proportion des membres, de régularité dans les traits du visage que tout de suite, on est tenté d’accepter la conclusion » de la multiplicité des races. La vision de Gobineau promet à l’humanité un sort d’autant plus misérable que le mélange des « races » y sera plus complet : « le dernier terme de la médiocrité dans tous les genres », puisque « l’espèce blanche a désormais disparu de la face du monde » et que « la part du sang arien, subdivisé déjà tant de fois, qui existe encore dans nos contrées, et qui seule soutient l’édifice de notre société, s’achemine vers les termes extrêmes de son absorption. Gobineau trouve donc dangereux le métissage par les mariages interraciaux qui risque de faire disparaitre la « race » aryenne  (blanche). 

 

       Madison Grant, un avocat plus connu comme un écologiste et eugéniste créé le mouvement "racistes" en Amérique préconisant l'extermination des "indésirables" et certains "types" course à partir du pool des gènes humains. Il a joué un rôle crucial dans la politique restrictive de l'immigration américaine et les lois anti-métissage. Ses travaux ont servi de justification à la politique nazie de stérilisation forcée et l'euthanasie. Il a écrit deux des oeuvres fondatrices du racisme américain: The Passing of the Great Race (1916) et la conquête d'un continent (1933). The Passing of the Great Race obtient un succès populaire immédiat et mis en place des subventions comme une autorité en anthropologie, et jeté les bases pour ses recherches sur l'eugénisme.

En 1911, une affamée et presque nus homme indien a pris refuge dans un abattoir de Californie du Nord. Il a été remis à l'anthropologue Thomas T. Waterman, qui l'a amené à vivre à l'Université de Californie du musée d'anthropologie. Il a été donné le nom Ishi, qui signifie «homme» dans sa langue maternelle. La plupart des membres de la tribu de Ishi, le Yahi-Yana, ont été massacrés pendant la ruée vers l'or en Californie. Surnommé «l'homme sauvage dernier en Amérique", il est devenu une attraction populaire, et dans ses six premiers mois au musée, 24.000 visiteurs le regardait démontrer arrow-faire et le feu des capacités. Ishi vécu au musée jusqu'à ce qu'il meurt de tuberculose en 1916.

En 1926, l'American Association of Physical Anthropology et le National Research Council a organisé un Comité sur le Noir, qui était axée sur l'anatomie des Noirs et reflète le racisme de l'époque. Parmi ceux qui sont nommés au Comité sur la couleur, étaient Hrdlicka, Earnest Hooton et eugéniste Charles Davenport. En 1927, le Comité a approuvé une comparaison des bébés africains avec de jeunes singes. " Dix ans plus tard, le groupe a publié les résultats dans l'American Journal of Physical Anthropology de "prouver que la race nègre est phylogénétiquement une démarche proche de l'homme primitif que la race blanche

 

ü  La psychologie raciale

 

        Certains psychologues dont les plus célèbres, WECHSLER, STERN, TERMAN se sont contentés à caractériser  l’intelligence par certaines aptitudes (à juger, à comprendre, à imaginer, …) et ont cherché à déterminer l’âge mental et à faire correspondre  cet âge à l’âge réel afin de déduire, le retard d’intelligence ou l’avance d’intelligence par rapport à une norme qu’ils ont calculé.  Ils sont partis de l’hypothèse suivante : le développement intellectuel de chaque enfant se réalise de façon continue et à vitesse constante. De cette hypothèse ils ont terminé le quotient intellectuel (QI) qui égal à l’âge mental divisé par l’âge réel. Ces mesures sont réalisées à partir de tests. Les plus radicaux vont  déterminer à partir de ces tests des « idiots » (retardé mental) et des super-doué.  D’autres encore à partir de recherches initiées, comme le psychologue Arthur JENSEN (1974), Cyril BURT avec ses travaux sur les jumeaux homozygotes, vont déterminer dans l’intelligence la part de l’inné (gène) et de l’acquis (le milieu). Ils aboutissent à la conclusion que l’intelligence est génétiquement déterminée  à 80% et 20% par le milieu. On est ainsi amené à voir dans l’intelligence un ensemble de traits moins qualitatifs que quantitatifs donc susceptibles de mesures.

            Le plus grand retentissement de toutes ses études est la déduction d’une inégalité des QI selon les classes sociales et les « races ». Les premières réflexions de JENSEN présentées dans un article de la Harvard Educational Review en 1969, exposaient des comparaisons de QI entre les Blancs et les Noirs américains. Ces comparaisons montraient que la moyenne observée chez les Noirs est inférieure de 15 points à celle des Blancs. S’appuyant sur les conclusions de BURT, JENSEN justifie cet écart par le fait que le QI est déterminé à 80% par le patrimoine génétique ; l’infériorité intellectuelle des Noirs telle qu’elle est mesurée par les tests, révèle donc une infériorité biologique innée, contre laquelle aucune action ne peut lutter.  Des remarques semblables ont été faites par le psychologue anglais Hans Eysenck dans un ouvrage paru en 1977. S’appuyant sur des résultats d’études empiriques effectuées dans certains pays, il dresse un tableau des QI des diverses professions (cadres supérieurs : professeurs, savants, chercheurs ; cadres moyens : chirurgiens, avocats… ; commerçants ; jardiniers…). Combinant avec l’affirmation, affichée comme un dogme, que le QI est déterminé pour 80% par le patrimoine génétique son étude veut démontrer que les inégalités sociales sont la conséquence des inégalités génétiques contre lesquelles personne ne peut rien. Il s’agit ici un avatar du darwinisme social.  Les conséquences de ces différents tests seraient inévitablement la conclusion suivante : Pour le bien de l’espèce humaine, il faut que les « meilleurs » (les mieux intelligents) participent plus que les autres à la transmission du patrimoine biologique. Au nom de telles affirmations la vie entière de certains peut être sacrifiée, notamment au cours de l’épouvante course d’obstacle qu’est devenue la scolarité. La ségrégation de groupes entiers, leur exploitation peuvent être présentées comme justes car conformes aux conclusions de la science

 

III-2 Le darwinisme social et l’Eugénisme

 

ü  Le darwinisme social

 

         Le darwinisme social est une doctrine politique évolutionniste apparue au XIXe siècle selon laquelle la lutte pour la vie entre les hommes est l'état naturel des relations sociales et la source fondamentale du progrès et de l'amélioration de l'être humain, et qui prescrit à l'action politique de supprimer les institutions et comportements qui font obstacle à l'expression de la lutte pour l’existence et à la sélection naturelle qui aboutissent à l’élimination des moins aptes et à la survie des plus aptes

    

         Envisagé à l’échelle de la compétition entre les individus, il préconise la levée des mesures de protection sociale, l’abolition des lois sur les pauvres ou l’abandon des conduites charitables. Son versant racialiste fait, à l’échelle de la compétition entre les groupes humains, de la lutte entre les « races » le moteur de l’évolution humaine. Il s’est conjugué à la fin du XIXe siècle avec les théories eugénistes.

 

       Les origines de cette théorie monte à HERBERT SPENCER (1820-1903), savant contemporain anglais de Darwin, Ingénieur, philosophe et sociologue et tout aussi populaire, interprète cette théorie par la « sélection des plus aptes » (Survival of the fittest). Le darwinisme social suggère donc que l'hérédité (les caractères innés) aurait un rôle prépondérant par rapport à l'éducation (les caractères acquis). Il s'agit ainsi d'« un système idéologique qui voit dans les luttes civiles, les inégalités sociales et les guerres de conquête rien moins que l'application à l'espèce humaine de la sélection naturelle ». Il fournit ainsi une explication biologique aux disparités observées entre les sociétés sur la trajectoire prétendument unique de l'histoire humaine : les peuples les moins « adaptés » à la lutte pour la survie seraient restés « figés » au stade primitif.

 

       Sur le plan politique, le darwinisme social a servi à justifier scientifiquement plusieurs concepts politiques liés à la domination par une élite, d'une masse jugée moins apte. Parmi ceux-ci notons le colonialisme, l'eugénisme, le fascisme et surtout le nazisme. En effet, cette idéologie considère légitime que les races humaines et les êtres les plus faibles disparaissent et laissent la place aux races et aux êtres les mieux armés pour survivre.

        À la fin du XIXe siècle, le darwinisme social a été étendu aux rapports entre les nations. Ce mouvement s'est surtout développé dans les pays anglo-saxons, et dans une moindre mesure en Russie. Si cette idée ne débouche en général pas sur des attitudes belliqueuses, il n'en est pas de même en Allemagne où l'affrontement entre les nations « jeunes », comme l'Allemagne, pleines de vitalité « virile », et les nations « anciennes », qualifiées par les tenants de cette théorie de « décadentes », comme la France, est considéré comme inévitable.

        Dès le 19e siècle, les travaux de Spencer sont utilisés pour démontrer les fondements biologiques du retard technologique et culturel de populations dites « sauvages », justifiant scientifiquement les politiques coloniales en leur donnant une caractéristique morale de civilisation, alors même qu'elles sont fondamentalement rendues nécessaires par la contraction des marchés locaux.

 

      Le « darwinisme social », serait également une idéologie réactionnaire du capitalisme.  En 1848, la parution du Manifeste communiste offre une vision révolutionnaire de la question, qui place l'homme et son activité, sur un plan social, au cœur du progrès historique. Cette vision ne peut évidemment satisfaire la nouvelle classe dominante, la bourgeoisie, qui vit avec enthousiasme la pleine ascension du système capitaliste. D'une part, cette ascension se fonde sur une idéologie particulièrement axée sur l'individualisme, et d'autre part, il est bien trop tôt pour la bourgeoisie de concevoir, même sur un plan strictement intellectuel, la possibilité d'un dépassement du capitalisme. A  cette époque  en Angleterre, la classe dominante est toujours traversée de courants radicaux qui remettent en cause les privilèges héréditaires, qui constituent des freins aux nouvelles formes de développement offertes par le capitalisme. Spencer fréquente ce milieu des « dissidents », fortement ancré dans l'anti-socialisme.  Il ne voit dans la misère noire de la classe ouvrière anglaise, que les stigmates provisoires d'une société en adaptation et qui, sous l'effet de l'explosion démographique, finira par se réorganiser, constituant ainsi un facteur de progrès. Pour lui, le progrès est inévitable, puisque les hommes s'adapteront à l'évolution de la société, si tant est qu'on les en laisse libres.

Cette euphorie est à peu près partagée par l'ensemble de la bourgeoisie. S'y ajoute un fort sentiment d'appartenance à la nation qui achève sa construction et qui peut être renforcé par les événements guerriers comme en France suite à la défaite contre la Prusse. Le développement de la lutte de classe, qui accompagne le développement du capitalisme, pousse la bourgeoisie à développer une autre conception de la solidarité sociale, fondée sur des données qu'elle espère indéniables.

 

        Tout ceci constitue le terreau d'une théorisation de l'ascendance capitaliste et de ses effets immédiats : la prolétarisation dans la sueur, la colonisation dans le sang, la concurrence dans la boue.

 

Du strict point de vue scientifique, les travaux de Spencer inspireront des études plus ou moins variées, comme la craniologie (l'étude de la forme et la taille du crâne, dont les résultats s'avèreront finalement arrangés), les tentatives de mesure de l'intelligence ou encore l'anthropologie criminelle avec la théorie du « criminel né » de Lambroso, dont les échos se font encore entendre aujourd'hui dans les sphères politiques bourgeoises quand il s'agit de détecter au plus tôt le futur criminel.

    

      La prépondérance de l'inné conduit également Spencer à dessiner les contours d'une politique éducative dont les répercussions sont encore visibles dans le système scolaire primaire britannique, qui cherche à fournir à l'enfant un environnement propre à son épanouissement personnel, à ses propres recherches et découvertes, plutôt que de fournir un enseignement magistral susceptible de développer de nouvelles aptitudes. C'est également le fondement théorique qui sous-tend le concept d' « égalité des chances ».

 

 

ü  L’Eugénisme

 

          La descendance la plus réputée du darwinisme social réside avant tout dans l'EUGENISME. Ce dernier  se présente comme  la version radicale du darwinisme social. C'est FRANCIS GALTON, cousin de Charles Darwin, qui pose les premiers concepts de l'eugénisme en suivant l'intuition sous-jacente de Spencer selon laquelle si la sélection naturelle doit conduire de façon mécanique au progrès social, tout ce qui l'entrave ne peut que retarder l'accession de l'humanité au bonheur. Plus simplement, Galton craint que les mesures d'ordre social que la bourgeoisie est amenée à prendre, la plupart du temps sous la pression de la lutte de classe, induisent à terme une dégénérescence globale de la civilisation.

 

      Alors même que Spencer serait plutôt adepte du « laisser-faire », de la non intervention de l'État (un de ses ouvrages, paru en 1850, porte le titre Le droit d'ignorer l'État) Galton va préconiser des mesures actives pour faciliter la marche de la sélection naturelle. Il inspirera ainsi longtemps et plus ou moins directement des politiques de stérilisation des malades mentaux, la pratique de la peine de mort pour les criminels, etc. L'eugénisme est également toujours considéré comme caution scientifique centrale dans les idéologies fascistes et nazies, même si déjà chez Spencer, les éléments sont présents pour élaborer des visions racistes conduisant à la hiérarchisation des races.

 

       Le mouvement mondial eugénique gagné en force aux Etats-Unis à la fin des années 1890, quand les théories de la reproduction sélective adoptée par l’anthropologue britannique Francis Galton et son protégé Karl Pearson, a gagné du terrain. Connecticut a été le premier de nombreux Etats, en commençant en 1896, d'adopter des lois du mariage avec les dispositions eugéniques, interdisant à quiconque qui était «épileptique, imbécile ou de faiblesse d'esprit» de se marier. Le célèbre biologiste américain CHARLES DAVENPORT, docteur en biologie en 1892 et devenu directeur de la recherche dans un Laboratoire de biologie à New York en 1898, obtient un financement de l'Institut Carnegie pour créer la station de recherche expérimentale sur l'Evolution. Puis, en 1910, il profite avec HARRY  LAUGHLIN de leurs positions au Record Office eugénisme pour promouvoir l'eugénisme.

       L'ERO (Record Office eugénisme) a conclu après des années de collecte de données sur les familles que les pauvres étaient la principale source des inaptes. " Davenport et autres employés hautement considéré eugénistes comme le psychologue Henry H. Goddard et écologiste Madison Grant lancé une campagne pour lutter contre le problème des inaptes ". Goddard, en utilisant des données fondées sur ses recherches sur la famille Kallikak, ont fait pression pour la ségrégation, alors que Davenport restriction à l'immigration préféré et la stérilisation en tant que méthodes primaires. Subvention, le plus extrême des trois, d'accord avec deux de ses collègues, et même considéré comme l'extermination en tant que solution possible.

 

      CHARLES DAVENPORT publie en  1911 un livre, l'hérédité dans la liaison à l'eugénisme, qui a été une œuvre majeure dans l'histoire de l'eugénisme. Avec un assistant, Davenport a également étudié la question du métissage, où, comme il disait, «race de passage" chez l'homme. En 1929, il publie Race Crossing, en Jamaïque, qui était censée donner des éléments statistiques sur les dangers du métissage entre Blancs et Noirs.

 

         L'eugénisme permet de franchir un pas supplémentaire en envisageant la suppression de masses d'individus jugés inaptes et donc en mesure potentiellement de retarder le progrès de la société. Alexis Carrel, en 1935, ira même jusqu'à préconiser, et même décrire avec force détails, la création d'établissements où se pratiquerait l'euthanasie généralisée. Ainsi au nom de l’Eugénisme et de ses principes, des crimes contre l’humanité ont été commis dans l’histoire de l’humanité. Citons parmi ces crimes l’antisémitisme des juifs, l’extermination des Aborigènes d’Australie par les colons anglais dont l'expansion débuta en 1770, les Amérindiens ou Indiens d’Amérique ont connu le même sort lors de la colonisation de ce continent par les Britanniques.   

 

 

III-3 La sociobiologie

 

        La sociobiologie est une théorie exposée en 1975 par Edward Osborne Wilson de l'université de Harvard (États-Unis), dans son ouvrage Sociobiology. A New Synthesis (Sociobiologie, la nouvelle synthèse). Il s’agit de la synthèse entre la génétique, l’écologie et l’éthologie qui cherche l’origine biologique des comportements des animaux sociaux y compris l’homme. Elle repose sur les deux principes suivants :

 

-          La hiérarchie rencontrée dans la plupart des sociétés animales est d'origine génétique. Elle tient à des comportements d'agressivité et de dominance. Biologiquement, certains sujets sont faits pour commander, alors que d'autres sont faits pour obéir. Cela est vrai aussi bien chez les insectes que chez les hommes. La position que chacun occupe dans la hiérarchie sociale n'est que le fruit de la compétition qui sait reconnaître les « meilleurs » des « moins bons » ; elle lui est assignée par la sélection naturelle.

-          Tous les comportements d'un individu obéissent à une loi fondamentale, diffuser ses propres gènes d'une façon aussi large que possible. Ainsi, l'agressivité (qui conduit à éliminer tout rival sexuel), l'altruisme (qui s'applique aux membres d'une même famille portant certains gènes identiques) ne poursuivent pas d'autre but. Quant à l'altruisme que nous manifestons pour nos amis, il tient au fait que ceux-ci peuvent nous aider à élever notre progéniture

 

       Pour la sociobiologie, l’objectif essentiel d’un organisme est de garantir la transmission de ses gènes. Les êtres vivants sont donc en compétition incessante, l’existence de l’être vivant ne se justifiant que pour assurer la meilleure transmission possible de ses gènes qualitativement et quantitativement. Comme Lamarck, Wilson admet la transmission héréditaire des comportements acquis. De ce point de vu, la sociobiologie est qualifiée de néo-lamarckisme. Il a appliqué sa théorie chez l’homme en 1978, dans un livre intitulé On Human Nature où il affirme un égoïsme biologique des individus dans leur comportement social. Les êtres vivants sont donc en compétition constante pour imposer dans la nature et cet appétit de leur génotype s’accompagne d’une volonté agressive de domination sociale. Selon Wilson, les divers comportements sociaux seraient programmés génétiquement. Il conçoit l’altruisme comme  « un comportement autodestructeur mis en œuvre pour le bénéfice des autres ». La sociobiologie se présente comme un avatar du darwinisme social que certains vont appeler un néo-darwinisme social. Elle prend des proportions sexistes et implique des sous-entendus eugénistes en s’occupant des infanticides et de la criminalité. Elle a pris à cet effet une dimension politique. En France elle a été défendue par Yves CHRISTEN. Face aux différentes attaques faites à la sociobiologie John TOOBY et Leda COSMIDES, lui donneront en 1990, la nouvelle appellation psychologie évolutionniste

 

IV- LES RUPTURES EPISTEMOLOGIQUES DE LA BIOANTHROPOLOGIE

 

IV-1 Les ruptures

    

       Toutes les dérives ou du moins déviations épistémologiques qui viennent d’être citées plus haut ne sont en réalité basées sur aucune théorie scientifiquement fondée.  Que ce soit le racisme, l’eugénisme, le darwinisme social ou la sociobiologie, ils prennent leur origine dans des contextes idéologiques et politiques controversés. 

 

 

ü  Les limites du concept de « race » chez l’humain

 

         La notion de race au sens strict du terme n’a aucun sens en biologie quant il s’agit de l’Etre humain. La « race » peut biologiquement se définir comme des  individus qui portent tous certains caractères génétiquement fixés c'est-à-dire transmis par l’hérédité et ayant en commun une part importante de leur patrimoine génétique. Ceux qui apparaissent sous l’influence du milieu (caractère acquis) n’ont aucune valeur classificatoire. Il s’agit de caractères intrinsèques des divers groupes humains, indépendamment de leurs conditions de vie, de leur milieu géographique, de leur classe sociale, de leur groupe ethnique, de leur culture ou de leur religion. Les individus qui composent le groupe « raciale » ne présentent que des différences mineures. Or les classifications faites par les taxonomistes (classificateurs) ne reposent que sur des données fournies  directement par l’observation  de quelques caractères visibles (phénotypes) : couleur de la peau, texture des cheveux, les mesures du crâne et de la taille, forme du nez … En génétique et en Anthropologie on utilise le terme de « population » pour désigner ce que les autres ont nommé race. Il est infondé d’opérer une classification raciale des humains en se basant sur un caractère unique ou encore moins sur l’appartenance géographique ou culturelle.  En arrêtant certains caractères spécifiques le système ABO et le système Rhésus, ont peut obtenir des individus de la même population génétique appartenant à des espace géographique différent (continent) ou à des cultures différentes. La classification dépasse désormais le cadre du phénotype et concerne l’ « univers des génotypes » Gobineau en a abusé au point qu’il est parvenu t à utiliser le mot espèce pour qualifier les groupes humains qu’il définissait comme des groupes raciaux. Or l’interfécondité entre des individus permet de déterminer le concept d’espèce. Une espèce est un groupe d’individus à l’intérieur duquel l’interfécondité ou la fécondité entre les sous-groupes est possible. En utilisant le mot espèce pour qualifier les différents groupes humains, est-ce une façon pour Gobineau d’exprimer ouvertement sa négation contre le métissage entre les populations européenne et celles d’Afrique ?

             La génétique a permis donc de donner un contenu plus objectifs au concept de « race » et parler désormais de population à la place de race quand il s’agit de l’humain.

 

ü  Les limites de la psychologie  raciale 

 

          En réalité les différents travaux réalisés sur les jumeaux homozygotes comportent des insuffisances au niveau des échantillons utilisés (échantillon assez réduit). Plus encore les travaux de Burt portant sur un nombre important de jumeaux homozygote (53), révèle des insuffisances méthodologiques remarquables : les tests utilisés ne sont pas précisés, le sexe et l’âge des enfants non plus, des doutes peuvent même être formulés sur l’existence réelle de certains jumeaux.  Parmi ces études de jumeaux, celle de SCHIELDS porte sur un effectif important avec toutes les précisions méthodologiques, mais celle-ci ne peut être admise sans précautions car l’échantillon qu’il a étudié est bien peu représentatif (deux fois plus de filles que de garçons, plus d’enfants issus de classes sociales très pauvres) ; en plus la plus de ces jumeaux ont passé une part importante de leur enfance ensemble dans une même famille.   En somme toutes ces recherches comportent des limites pour tirer des conclusions sur la détermination génétique de l’intelligence.

 

      Une autre limite de ces études réside au niveau de l’origine culturelle des tests utilisés pour mesurer le QI. Ces tests ont été mis au point sur des enfants ou des adultes blancs élevés en Europe ou en Amérique du Nord. Toutes les valeurs implicitement admises dans leur éducation sont nécessairement intervenues ; comment porter un jugement avec de tels tests sur des sujets baignant dans une culture totalement différente ? Les tests réalisés par Arthur JENSEN sont définis à partir de caractéristiques culturelles de la société blanche aux Etats Unis à la fin de 1960, Or à cette époque et même de nos jours dans certains Etats d’Amérique, la société noire ne bénéficie toujours pas des mêmes privilèges éducatifs et socioculturels que les Blancs. Une comparaison issue de tels tests  ne peut être que lacunaire et biaisée.

 

ü  Les limites du pseudo-darwinisme social

 

      Dans De l'Origine des espèces (sous-titré : La Préservation des races favorisées dans la lutte pour la vie), Darwin n'analyse pas la société humaine et n'a pas d'implication personnelle citée dans le « darwinisme social ». Herbert Spencer n'est pas un « darwinien » mais un lamarckiste ; il voit, en effet, dans l'évolution la marque d'une marche vers un progrès inéluctable, contrairement à Darwin, pour qui elle est le résultat du hasard.

 

         En 1910, le sociologue Jacques NOVICOW, dans un ouvrage intitulé La critique du darwinisme social,  critique de manière acerbe la tendance de ses collègues et savants de son temps à mettre en avant le conflit et la guerre comme moteur de l'évolution et du progrès social. Il donne la définition suivante au darwinisme social. « Le darwinisme social peut être défini : la doctrine qui considère l'homicide collectif comme la cause des progrès du genre humain. »

 

        L'épistémologue Patrick TORT a mis en évidence l'incompatibilité des thèses du darwinisme social, particulièrement dans leurs prolongements malthusien et eugéniste, avec les propres positions de Charles Darwin à propos de l'évolution humaine, en s'appuyant sur un ouvrage peu connu de ce dernier, paru en 1871.

 

          Dans ce ouvrage, contrairement aux interprétations  du « pseudo-darwinisme » social, C. Darwin affirme la rupture qui s'établit chez l'homme dans le processus de lutte pour la survie, fondée sur l'élimination des faibles : « Nous autres hommes civilisés, au contraire, faisons tout notre possible pour mettre un frein au processus de l'élimination ; nous construisons des asiles pour les idiots, les estropiés et les malades ; nous instituons des lois sur les pauvres ; et nos médecins déploient toute leur habileté pour conserver la vie de chacun jusqu'au dernier moment. Il y a tout lieu de croire que la vaccination a préservé des milliers d'individus qui, à cause d'une faible constitution, auraient autrefois succombé à la variole. Ainsi, les membres faibles des sociétés civilisées propagent leur nature. » (ibid,p223) C. Darwin conclut alors par l'hypothèse d'une forme d'extraction de la nature humaine de la loi de la sélection naturelle, sans pourtant contrevenir à son principe originel, à travers le processus de civilisation, fondé sur l'éducation, la raison, la religion et la loi morale : « Si importante qu'ait été, et soit encore, la lutte pour l'existence, cependant, en ce qui concerne la partie la plus élevée de la nature de l'homme, il y a d'autres facteurs plus importants. Car les qualités morales progressent, directement ou indirectement, beaucoup plus grâce aux effets de l'habitude, aux capacités de raisonnement, à l'instruction, à la religion, etc., que grâce à la Sélection Naturelle ; et ce bien que l'on puisse attribuer en toute assurance, à ce dernier facteur les instincts sociaux, qui ont fourni la base du développement du sens moral. » (ibid, p740).

 

           La sociobiologie admet le principe de « sélection de parenté » selon lequel, le comportement social est déterminé par la nécessité de maximiser le potentiel reproductif, l’important est alors de transmettre le maximum de ses gènes.  Or la parenté n’est pas un fait biologique mais d’abord un fait culturel, caractéristique des sociétés humaines. Les hommes ne se définissent pas d’abord par leurs attributs physiques mais par leurs propriétés symboliques.

 

      Il y a toutes sortes de motivations différentes à la base de l’agression, de même le Don peut relever de l’altruisme comme de l’agressivité (Potlatch). Ce que la sociobiologie ignore, c’est qu’entre le biologique et le social s’insère la Culture qui est symbolisation et interprétation et est donc une cause d’indétermination. La sociobiologie ignore la signification de l’acte humain.

 

      Les sociobiologistes dévoient (détourne de son sens)  le concept darwinien d’évolution. La notion de maximisation du pool génétique qu’ils ont utilisé n’a aucun sens dans l’évolution darwinienne puisque l’adaptation dépend du contexte en question. La sociobiologie inverse le rapport entre l’organisme et la sélection : dans ce cadre, c’est l’organisme qui essaie de maximiser sa situation et se sert de la sélection pour cela. Dans le cadre darwinien, l’organisme est l’objet de la sélection.


          En somme Darwin n'est pas le père du darwinisme social, ni de la sociobiologie ni de l'eugénisme, ni du racisme scientifique, encore moins du libéralisme économique, ou de l'expansion coloniale. Darwin n'est pas malthusien non plus. Bien plus encore, c'est lui qui, parmi les premiers, apporte la contradiction la plus développée aux théories de SPENCER et de GALTON.

 

        Après avoir exposé sa vision du développement et de l'évolution des organismes dans L'origine des espèces, Darwin se penche, douze ans plus tard, sur les mécanismes à l'œuvre  au sein de sa propre espèce, l'homme. En publiant La filiation de l'homme en 1871, il va contredire tout ce que parallèlement, le darwinisme social a construit. Pour Darwin, l'homme est bien le produit de l'évolution et se place donc bien au sein du processus de sélection naturelle. Mais chez l'homme, le processus de lutte pour la survie ne va pas passer par l'élimination des faibles.

 

           Ainsi, par le principe de l'évolution, l'homme s'extrait du mécanisme de la sélection naturelle en plaçant au-dessus de la lutte compétitive pour l'existence, tout ce qui contribue à favoriser le processus de civilisation, à savoir les qualités morales, l'éducation, la culture, la religion... ce que Darwin nomme les "instincts sociaux". De cette façon il remet en cause la vision de Spencer de la prépondérance de l'inné sur l'acquis, de la nature sur la culture.

 

En définitive, l'épistémologie des sciences empiète parfois sur ce qu'on appelle couramment la méthode scientifique. On peut se demander, par exemple pourquoi, les théories de Darwin et d'Einstein constituaient-elles des progrès par rapport aux croyances de l'époque? Quelle est la nature de la preuve en sciences, de façon générale? C'est étonnamment difficile, mais c'est aussi difficile d'expliquer comment faire du vélo, même s'il est évident que nous savons comment en faire.

Piaget distingue aussi la méthodologie de la logique et de l’épistémologie.

 

 

V- METHODOLOGIE PLURIDISCIPLINAIRE EN ANTHROPOLOGIE BIOLOGIQUE

 

Méthodologie : littéralement définie comme « science de la méthode » ou discours sur la méthode pour un objet ou domaine de connaissances donné, la méthodologie constitue le croisement entre logique appliquée et épistémologie appliquée. D’une part, elle n’a pas une consistance propre. D’autre part, on ne peut parler de logique et d’épistémologie sans déborder sur la méthodologie qui est nécessaire pour les mettre en œuvre.

Les méthodes sont seulement des moyens qui aident à rassembler un savoir. Elles ne constituent pas un ensemble de critères pour savoir de quel savoir il s’agit. Elles ne donnent aucun critère de vérité, aucune contrainte factuelle, aucun principe théorique. En résumé, elles ne font pas épreuve par elles mêmes.

 

Par nature interdisciplinaire, l’anthropologie biologique a toujours été très liée aux domaines de recherche des disciplines voisines, biomédicales, sociales ou culturelles. Elle en a souvent adopté les méthodologies et les perspectives, au risque, parfois, de s’y fondre. L’investissement croissant des anthropologues dans des problématiques nouvelles en sciences biologiques, environnementales, ou sociales va de pair avec une dispersion thématique qui constitue à la fois la richesse, mais également la faiblesse de l’anthropologie biologique.

Et pourtant, l’anthropologie biologique possède une démarche scientifique spécifique, qui traverse la multiplicité de ses champs d’intervention.

Le point commun à tous les anthropologues est de partager le même paradigme : celui de l’espace/temps, c’est à dire celui de la diversité et de l’évolution humaine. Dans cette perspective singulière, quel que soit le thème de recherche abordé, l’homme est toujours envisagé en tant qu’être  biologique, en total interaction avec son environnement physique, socio-économique et culturel.

 

Pour se développer, l’anthropologie biologique doit s’appuyer sur une de ses caractéristiques essentielles : l’interdisciplinarité. Le caractère holistique de l’anthropologie biologique est en soi une chance pour la connaissance scientifique en général. A une époque où la parcellisation des savoirs et l’hyperspécialisation de la recherche commencent à atteindre leurs propres limites d’efficacité, le développement d’un champ disciplinaire par nature ouvert à tous les aspects de la diversité biologique humaine s’avère particulièrement important sur le plan conceptuel, comme sur le plan méthodologique. L’approche singulière de l’anthropologie biologique procure indéniablement aux disciplines voisines (biologiques, médicales, sociales et écologiques) un regard spécifique sur des objets d’étude communs.

De plus, la demande sociétale concernant l’anthropologie biologique est forte. Les interrogations sur l’évolution biologique de notre espèce, son adaptation aux changements rapides de mode de vie et d’alimentation, l’influence des migrations sur l’évolution des flux géniques, les modifications morphologiques ou physiologiques éventuelles du corps humain dans un futur proche ou lointain, entrent dans le champ de la problématique anthropologique. Donner à comprendre la complexité des processus biologiques de transformation de notre espèce en fonction d’un milieu évoluant rapidement, tel est également l’enjeu de notre discipline.

L'anthropologie biologique a apporté des méthodes d'analyse de groupe ; elle a communiqué à d'autres disciplines - comme la médecine - la nécessité de réunir de grands échantillons porteurs d'une représentativité.

 

VI-1 Les Méthodes

VI-1-1 La biométrique

La biométrie constitue une étape essentielle de l’analyse anthropologique à travers le traitement de données et leur présentation synthétique. Elle contribue à formuler des hypothèses et à les éprouver. Sa démarche repose sur la statistique.

 

VI-1-2 L’estimation de la forme corporelle (le somatotype)

La forme du corps humain a toujours suscité beaucoup d’intérêt, tant pour ses variations liées au sexe ou vieillissement, tant pour sa finalité clinique ou esthétique. Autrement dit, es méthodes visent à quantifier et à comparer  les variations infinies de la morphologie de l’Hom sapiens. Ainsi naîtra la biotypologie, science qui  s’occupe de l’étude des biotypes humains, somatiques ou psychologiques.

 

      VI-1-3 L’Ergonomie

L’ergonomie regroupe un ensemble de connaissances interdisciplinaires capables d’analyser, d’évaluer et de projeter  des systèmes simples ou complexes incluant l’homme, en tant qu’opérateur ou  usager. L’étude ergonomique concerne tous les systèmes qui interagissent avec l’homme. L’objectif est d’améliorer la qualité de la vie (sûreté, santé, bien-être t confort, etc.).

 

VI-1-4 Les méthodes ostéologiques

Les méthodes ostéologiques ont connu un perfectionnement avec l’application de nouvelles techniques morphométrique en 2 ou 3 dimensions : elles améliorent les estimations de la forme et du format des pièces osseuses et, permettant de mieux interpreter l’évolution humaine.

 

VI-1-5 L’Anthropologie légale

L’Anthropologie légale est l’application de l’anthropologie physique aux problèmes légaux et à l’identification des restes humains squelettiques. Elle peut se diviser en trois (3)  grands domaines :

ü  Ostéologie légale ;

ü  Somatologie légale ;

ü  ADN et identification.

 

VI-1-6 La micro-usure dentaire

La micro-usure dentaire consiste à analyser les modifications produites sur l’émail par la capacité abrasive des particules contenues dans les aliments.

 

      VI-1-7 L’Analyse chimique et régimes alimentaires

L’analyse étudie des éléments traces et l’analyse des isotopes. Les concentrations en éléments traces, s’expriment généralement en ppm (part par million) : le strentium (Sr) et le calcium (Ca) sont les plus exprimés.

Certains éléments chimiques présentent des variantes ou « isotopes ». les analyses isotopiques  du carbone et de l’azote s’effectuent généralement sur le collagène, composant majoritairement la partie organique de l’os.

 

 

VI-2 Quelques méthodes couramment appliquées

 

En anthropologie biologique, plusieurs types d’observables sont impliqués, aussi bien quantitatifs que qualitatifs. Elle requiert donc plusieurs méthodes sur des questions complexes qui concernent l’homme. 

 

-       Pour des études de « population »

Pour des études sur la génétique des populations, le développement des techniques de l’ADN et de la bioinformatique, l’anthropologie biologique se redéfinit (Crawford, 2007). On fait place d’avantage à la variation, aux « tendances » statistiques, aux gradients de fréquences (Laine 2000), aux corrélations entre génétique et linguistique (Cavalli-Sforza, 1997).

La définition de la population et l’échantillonnage représentent la première étape de toute étude anthropogénétique (Jobling et al., 2004). La réalisation de l’enquête implique de travailler à partir d’un échantillon de la population d’intérêt.

Le domaine démographique réside dans les méthodes particulières de collecte des données :

- enquêtes et entretiens approfondis, adaptés à la population étudiée, et effectués auprès d’individus ou de groupes familiaux situés dans leur propre cadre de vie ;

- recoupement des données de l’enquête avec d’autres informations, afin de préciser et compléter les éléments recueillis;

- mise en lumière de comportements et opinions, selon les générations ou les groupes socio-économiques;

- suivi dans le temps de l’évolution démographique de la communauté (enquêtes sur le long terme);

- constitution de généalogies biologiques et reconstruction historique à l’échelle locale.

Si tous les individus de la terre pouvaient être échantillonnés, il n’y aurait pas de problème de représentativité. Pour des raisons financières comme éthiques, cela est bien entendu impossible, d’où la nécessité d’une stratégie d’échantillonnage.

Le développement d’une échelle micro-géographique vers une échelle macro-géographique se traduit par une évolution des stratégies d’échantillonnage.

Les individus sélectionnés ne sont plus les membres d’une communauté clairement identifiée mais au contraire des individus échantillonnés aléatoirement sur une aire géographique et/ou au sein d’une population aux contours larges. On peut alors avoir :

Echantillon local, échantillon « poolé » : Selon la stratégie adoptée on peut globalement définir deux types d’échantillons : des échantillons « locaux » définis sur une base biodémographique (stratégies de mariage, généalogies..) et des échantillons « poolés » (ex : prélèvements en milieu hospitalier..) regroupant des individus dispersés au sein d’un groupe culturel et/ou d’une aire géographique large.

Selon Ptak et Przeworski (2002), les échantillons « poolés » sont les plus à même de permettre la détection d’un maximum de variabilité. Ils sont donc les plus adéquats pour le développement d’une approche phylogéographique ou la mise en évidence de nouveaux polymorphismes.

 

Focus group : Dans les études anthropobiologiques, la mesure est bien souvent la règle. Crânes, os longs, plis cutanés, force de préhension, mais aussi activité physique, auto-évaluation de la santé, bien-être subjectif…

Tout peut, et surtout doit, être mesuré, calculé et catégorisé afin de fournir la vision la plus objective possible de l’homme. L’anthropologie biologique n’est pas seule à s’inscrire dans cette tendance positiviste puisque l’ensemble des sciences biomédicales, la psychologie sociale et certains courants de la sociologie sont également dominés par cette « raison calculante » (Boëtsch et Chevé, 2006).

Ainsi en anthropologie biologique, les thèmes de recherche sont généralement traités en soumettant les hypothèses à l’épreuve des chiffres et des analyses statistiques. Réalisées sur des échantillons représentatifs des populations, ces études ont souvent recours à l’utilisation de mesures anthropométriques, biologiques et d’échelles « validées », qu’elles soient psychosociales ou de santé.

Au moment de la rédaction du questionnaire se posent alors deux  principales questions d’ordre méthodologique : quelles échelles et quelles mesures utiliser ? Sont-elles adaptées à la population d’étude ? Parmi les méthodes qualitatives les plus utilisées, les groupes de discussion focalisés ou focus groups (« une technique d’entrevue qui réunit de six à douze participants et un animateur, dans le cadre d’une discussion structurée, sur un sujet particulier ») (Geoffrion, 2003) paraissent particulièrement adaptés à la démarche anthropobiologique.

 

-       Méthodes d’analyse des données

Diverses méthodes permettent d’analyser les discours recueillis par focus groups, notamment l’interactionnisme symbolique (Mead 1934), la grounded theory (Glaser, Strauss 1967) ou encore la méthode d’analyse qualitative thématique développée par Mason (1996).  

Cette méthode analytique est constituée de deux phases. La première phase concerne l’identification des thèmes; la seconde est interprétative et conceptuelle.

- Analyse thématique

Cette phase de l’analyse comprend plusieurs étapes. Tout d’abord, à partir des verbatim obtenus, on identifie et nomme les dimensions dans les discours. Ce processus est dénommé indexation.  

- Analyse conceptuelle

L’analyse conceptuelle est décrite comme plus subjective que l’analyse thématique (Nicolson, Anderson 2003) et consiste en une interprétation des discours, une lecture « entre les  lignes », influencée par la subjectivité et le parcours des chercheurs eux-mêmes.

 

 

 

CONCLUSION

 

L'anthropologie est l'étude holistique de l'espèce humaine de la perspective bioculturelle.  

L'anthropologie biologique étudie l'espèce humaine au même titre que la biologie étudie n'importe quelle espèce : examinant les caractéristiques biologiques, l’évolution, la variation, le rapport par rapport à l’environnement et le comportement. La Bioanthropologie, comme une discipline scientifique, pose des questions sur l'espèce humaine et essaie de répondre en formulant des hypothèses. Elle évalue ensuite ces hypothèses sur la base de leur évidence et /ou des éléments qui pourraient les réfuter.

 

La démarche anthropologique générale repose tout d’abord sur une connaissance théorique du champ disciplinaire et sur une pratique de terrain (ou de laboratoire), c’est-à-dire sur une connaissance découlant d’une relation intime avec l’objet d’étude. Initialement, l’anthropologie biologique a essayé de comprendre l’évolution biologique de l’homme au cours du temps, par la compréhension des processus démographiques puis des mécanismes génétiques, aujourd’hui, elle s’attache aussi à comprendre les causes de la diversité biologique actuelle par l’étude des mécanismes adaptatifs. Et comme elle a besoin de la connaissance du rôle rétroactifs des facteurs socioculturels, l’anthropologie biologique se veut interdisciplinaire c’est-à-dire qu’elle est bioculturelle. La discipline anthropologique au sens large se situe néanmoins dans le domaine strict de l’observation (in vivo ou in situ) et non de l’expérimentation.

En définitive, l’épistémologie et la méthodologie sont deux concepts différents et deux exigences doctrinales qui interagissent pour garantir la scientificité de la bioanthropologie. 

 

 

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[1] Essai sur l’inégalité des races humaines, p 114 



17/04/2013
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