UNIVERS DES ETUDIANTS EN LICENCE 1 DE L\'ISAD

UNIVERS DES ETUDIANTS EN LICENCE 1 DE L\'ISAD

COURS


COURS Dr Assi Raoul

CONCEPTS DE BASE EN PALEOANTHROPOLOGIE

Dr. RAOUL  ASSI

ANNEE D’ETUDE ; LICENCE 1 PALEOANTHROPOLOGIE

 

OBJECTIFS GENERAL DU COURS

Rendre l’étudiant capable de connaitre les différents concepts de base qui ont orienté la construction de l’objet de la paléoanthropologie.

OBJECTIFS SPECIFIQUES DU COURS

1-    Etant donné la théorie de l’évolution, l’étudiant sera capable de maitriser sans erreur les six (6) principaux concepts de base développés dans le processus d’hominisation en paléoanthropologie.

2-    Etant donné les six (6) principaux concepts de base développés en paléoanthropologie, l’étudiant sera capable de déterminer avec précision la spécificité du le modèle de pensée évolutionniste.  

PLAN DU COURS

v  INTRODUCTION

I-    GENERALITES SUR LA PALEOANTHROPOLOGIE

1-1-   Rappel de définition

1-2-   Rappel des outils du paléoanthropologue

1-3-   Rappel historique sur la paléoanthropologie

II-     L’EVOLUTIONNISME EN PALEOANTHROPOLOGIE

2-1-   Contexte historique

2-1-1- Origine des espèces

2-1-2- Evolutionnisme

2-2-   Les concepts développés dans le paradigme évolutionniste

2-2-1- La sélection naturelle

2-2-2- Le transformisme

2-2-3- L’adaptationnisme

2-2-4- Le gradualisme

2-2-5- Les équilibres ponctués

2-2-6- L’évolution synthétique

CONCLUSION

 

 

INTRODUCTION

L’idée de la détermination de l’origine exacte de l’humanité est une préoccupation aussi ancienne que la conscience de soi, en tant qu’entité spécifique dans le règne animal. D’où la question centrale généralement formulée, en l’occurrence: D’où venons nous et pourquoi sommes-nous si différents des autres êtres vivants de la terre?

Les préceptes bibliques semblaient à priori avoir longtemps satisfait à cette question de l’origine de l’humanité à travers les réponses dogmatiques qu’elles en ont apporté (Dieu créateur de l’univers, est à l’origine de toute vie et créa l’homme à son image). Il s’agit de ce qu’il a été convenu d’identifier comme les « thèses créationnistes » ou « fixistes » privilégiant l’idée de création de toute chose par un être divin. Cependant, des voix discordantes se sont progressivement élevées dans les milieux scientifiques, au regard des nombreuses investigations et découvertes réalisées dans différents domaines scientifiques notamment en astronomie, en géologie et en biologie. Ainsi, ont été mis en relief, des phénomènes évolutifs (réalités matérielles et expérimentales) concernant les origines de l’univers et le phénomène cosmique, le passé et le présent de la terre, les espèces vivantes passées et présentes. D’où l’émergence des « thèses évolutionnistes » qui impliquent l’idée de changement, dans une direction particulière et vers une destination finale.

S’il apparait illusoire de considérer que l’apparition du courant de pensée évolutionniste et ses bouleversements dans l’opinion ont pu laisser l’église sans réactions, il importe de révéler qu’au sein même des milieux scientifiques des divergences ont vu le jour. Coexistent donc depuis lors au sein de la communauté scientifique, des farouches défenseurs des thèses créationnistes (à l’image de Cuvier en France, Virchow en Allemagne) et ceux des thèses évolutionnistes.

Dès son apparition, en tant que science au XIXème siècle, l'anthropologie et plus précisément la paléoanthropologie, s’est inscrite dans le paradigme évolutionniste. Ainsi, a-t-elle exploité les méthodes d’investigations et d’analyses de la géologie, de la biologie et de l’astronomie pour dégager ses propres théories ou concepts explicatifs des origines de l’humanité, à partir des vestiges du passé (ossements, outils, restes d’aliments, productions artistiques…) retrouvées dans les couches terrestres.

Alors quels sont, à partir de l’étude des fossiles, les théories ou concepts de base dégagés par la paléoanthropologie, relativement aux origines de l’humanité ?

Dans la première partie de ce cours, il sera question pour nous, de faire une brève présentation de la paléoanthropologie en rapport avec son objet, son histoire et ses méthodes.

La seconde partie sera consacrée à la mise en relief des différents concepts de base développés dans le cadre de cette discipline, et de la spécificité du modèle de pensée évolutionniste.

I-  GENERALITES SUR LA PALEOANTHROPOLOGIE

 

La paléoanthropologie en tant que discipline scientifique, a bien évidemment un objet et un contenu qui procèdent de multiples controverses épistémologiques. Mais également, elle a une histoire et des méthodes empruntées à des disciplines scientifiques diverses.     

1-1-   Rappel de définition

Dérivant du grec “Palaios” qui veut dire ancien, “Anthrôpos”, homme et “Logos” signifiant étude, la Paléoanthropologie, branche de l’anthropologie physique, désigne l’étude de l’homme ancien. C’est donc une discipline qui s’intéresse particulièrement aux populations qui nous ont précédés, en s’appuyant essentiellement sur les fossiles. Il importe d’indiquer que les fossiles sont des restes d’organismes, complets ou fragmentaires, trouvés dans les roches (en géologie, on entend par « roche » tout terrain de la croûte terrestre, qu’il soit dur ou meuble). On considère également comme fossiles toutes les traces d’activités dues à des êtres vivants et conservées dans les formations géologiques, comme des traces de pistes ou de terriers.

Inscrite dans une dynamique évolutionniste, la paléoanthropologie s’attache à retracer les chemins de l’évolution humaine à partir de la détermination des différentes étapes qui ont permis d'aboutir à l'homme moderne, Homo sapiens, depuis ses ancêtres primates. Elle ne se limite pas à la seule étude du genre Homo (ergaster, rudolfensis, habilis, sapiens) mais inclut plus généralement tous les membres de la famille des homininés (y compris donc les australopithèques qui ne sont pas, à proprement parler, nos ancêtres).

La paléoanthropologie traite donc de la diversité biologique de l’homme dans le temps. Les mécanismes explicatifs de cette diversité sont les mêmes que ceux qui régissent la diversité humaine dans le monde. Ce sont les mécanismes de l’évolution biologique communs à tous les êtres vivants.

La paléoanthropologie moderne inclut, avec les études anatomiques des squelettes fossiles (la systématique), celles des animaux qui leurs sont associés (la paléontologie), des couches sédimentaires qui les contiennent (la géologie), ainsi que toutes les informations permettant de reconstituer le milieu et l’environnement dans lequel vivaient ces Hominidés (paléoécologie). Bien qu’elle travaille essentiellement à partir de l'étude des fossiles, la paléoanthropologie recourt également à d'autres approches, comme celle de la primatologie.

Etudier l’évolution humaine nécessite de solides bases de connaissances dans d’autres sciences naturelles et biologiques qui constituent, en effet, les véritables outils du paléoanthropologue. Mais il importe avant toute chose de rappeler brièvement l’histoire de la paléoanthropologie.

1-2-   Rappel historique sur la paléoanthropologie

Dès la plus haute antiquité, l'Humanité s'est penchée sur ses origines, comme en témoignent les mythologies antiques, de l’Égypte à la Grèce, ou encore le monument mégalithique de Stonehenge (Wiltshire, Angleterre) édifié il y a près de 5 000 ans : tous ont tenté de tresser, entre les dieux et les hommes ou le ciel et la terre, un fil ininterrompu. La Bible elle-même, avec la Genèse, racontera la naissance de l’homme et, à partir de Noé dressera la « généalogie des nations ».

En 1650 l’archevêque Husser, se basant justement sur les écrits bibliques, prétendait qu’Adam et Eve avaient été créés il y a 6.000 ans en même temps que la terre. 200 ans plus tard, ces idées changent car on commence à découvrir des fossiles humains et à chaque nouvelle découverte de fossiles majeurs, on a reconsidéré l’ancienneté de l’origine de l’homme qui devient de plus en plus reculée dans le temps.

Depuis la première découverte authentifiée d’un homme fossile, faite par le Liégeois Schmerling en 1829, et surtout depuis les travaux magistraux de Darwin sur l’origine et l’évolution des espèces (publiés en 1859), les datations relatives à l’apparition de l’homme n’ont cessé de reculer dans le temps et les modalités de l’évolution humaine se précisent.

Aujourd’hui, on sait que nos ancêtres, les pré-australopithèques, ont au moins 6 millions d’années (Ma) et on est loin des 6.000 ans avancés au 17ème siècle!

Quelques grandes dates sont donc à retenir dans la reconstitution de l’histoire de la paléoanthropologie :

1829: Première authentification d’un homme fossile par Schmerling, professeur d’anatomie à l’Université de Liège. On a su plus tard qu’un de ces fossiles était néandertalien.

1856: Première description d’un néandertalien trouvé en Allemagne, à Neandertal.

1859: Charles Darwin publie « The origin of species ».

1891: Première découverte d’un Homo erectus: le pithécanthrope de Java.

1924: Première découverte d’un australopithèque : l’enfant de Taung (Afrique australe).

1974: Découverte de Lucy, une espèce d’australopithèque archaïque (Éthiopie).

2002: Découverte du pré - australopithèque Toumaï (Tchad)

1-3-   Rappel sur les outils du paléoanthropologue

Les outils, dans cette partie du cours, font référence aux connaissances scientifiques de base essentielles aux investigations et analyses du paléoanthropologue. Il s’agit de la génétique, de l’anatomie comparée, de la géologie, la paléoécologie humaine.

1-3-1- La génétique

a-    Les bases génétiques

Pour comprendre le phénomène de l’évolution, les fondements génétiques sont indispensables. ADN, chromosomes, divisions cellulaires, gamètes, lois de Mendel, sont autant de notions sur lesquelles l’on s’appuie. Actuellement, les chercheurs tournent leur attention vers l’embryologie, et plus particulièrement vers les gènes HOX du développement (encore appelés gènes «architectes» ou gènes «chefs d’orchestre») car ils commencent à livrer beaucoup de réponses à nos questions sur les mécanismes de l’évolution.

En effet, les gènes HOX agissent sur le développement embryonnaire (jusqu’au stade post-natal) en donnant la position et l’identité des cellules du tube neural, de la colonne vertébrale, des membres, des glandes mammaires, du pelage… Le décalage d’un couple de gènes HOX a pour effet singulier de faire disparaître les membranes sur les nageoires chez certains poissons, ce qui pourrait suffire à expliquer l’apparition des premières pattes chez les amphibiens…

L’information du génome guide la synthèse des protéines et la formation d’un individu. Lorsqu’on aborde l’évolution biologique, on passe du niveau de l’individu au niveau des populations.

b-    La génétique des populations

La génétique des populations permet de comprendre comment les phénomènes évolutifs se succèdent dans le temps. Ils s’observent au fil des générations.

Dans toutes les espèces vivantes actuelles y compris chez l’homme, l’on observe des changements des fréquences géniques d’une génération à la suivante et donc l’évolution des espèces.

Les principaux changements sont dus aux mutations, à la sélection naturelle, au hasard et aux migrations.

1-3-2- L’anatomie comparée

Un outil principal du paléoanthropologue est l’anatomie comparée dont le fondateur est Georges Cuvier (1769-1832). En comparant les ossements fossiles aux espèces actuelles, on peut mettre en évidence ce qui les rapproche ou les différencie. On arrive ainsi à discerner des parentés entre groupes d’êtres vivants, à voir comment ils ont évolué au cours du temps et comment ils ont divergé les uns des autres.

 

1-3-3- La géologie

Le premier souci du paléoanthropologue est de situer dans le temps les fossiles qu’il découvre. Ceci, dans la mesure où en paléoanthropologie, une découverte ne prend de sens que lorsqu’elle est datée. Pour cette raison, l’intérêt pour la géologie s’oriente plus particulièrement vers ses méthodes de datations. Deux méthodes de datations sont principalement utilisées en géologie à savoir, la dation relative et la datation absolue.

a-      La datation relative

La datation relative regroupe l'ensemble des méthodes de datation permettant d'ordonner chronologiquement des événements géologiques ou biologiques, les uns par rapport aux autres. En d'autres termes, on établira lequel, entre deux corps géologiques, est le plus jeune ou le plus vieux, sans aucune connotation d'âge absolu qui serait exprimé en nombre d'années.

  • Ø La stratigraphie

Cette méthode repose sur l’étude des strates (ensemble sédimentaire ou volcanique délimité par deux surfaces plus ou moins parallèles qui correspondent à des discontinuités ou à des changements de composition) ou couches qui se superposent au fur et à mesure du temps. Elle part des principes que :

-       Lorsque des sédiments se déposent, ou qu'il y a une succession de coulées volcaniques, la strate située le plus bas sera plus vieille que celle qui se trouve au-dessus (principe de superposition).

-       Bien que la base d'une strate soit plus âgée que son sommet, on considère qu'elle a le même âge sur toute son étendue même si sa composition change (principe de continuité).

-       Un événement (intrusion magmatique, faille, plissement, discordance, érosion) qui provoque un changement dans la géométrie des roches est postérieur à la dernière strate qu'il affecte et antérieur à la première strate non affectée (principe de recoupement).

-       Les morceaux de roche inclus dans une autre couche sont plus anciens que leur contenant (principe d’inclusion).

  • Ø La biochronologie

Chaque époque identifiée de l'histoire de la Terre possède ses propres espèces animales, sa propre flore. On peut ainsi, pour chaque espèce et suivant son degré d'évolution, déterminer à quelle époque elle vivait. La découverte d'ossements dans une couche archéologique peut rapidement être datée par la proximité d'autres espèces animales ou de plantes dont on connaît l'âge.

  • Ø La typologie

Le postulat de départ est simple : la forme d'un objet usuel évolue dans le temps sous la pression des modes, des techniques, des habitudes artisanales. Ainsi la découverte d'une poterie, d'un silex, peut être datée par comparaison avec des objets de même type précédemment identifiés.

b-      La datation absolue

La datation absolue permet de déterminer l’âge des roches et des fossiles, elle permet de mesurer la durée des phénomènes géologiques, elle a permis de situer dans le temps, l’échelle stratigraphique.

  • Ø La radiochronologie

Cette méthode est fondée sur l’étude des éléments radioactifs, des roches, des minéraux de ces roches, et des fossiles, ces éléments radioactifs ont été incorporés au moment de la formation de la roche. On a mis en évidence que les éléments radioactifs instables avaient des taux réguliers de désintégration et pouvaient ainsi constituer des « horloges » virtuelles des roches de la Terre qui les contiennent.

  • Ø La datation au carbone 14

La datation par le carbone 14, dite également datation par le radiocarbone ou datation par comptage du carbone 14 résiduel, est une méthode basée sur la mesure de l'activité radiologique du carbone 14 (14C) contenu dans de la matière organique dont on souhaite connaître l'âge absolu, à savoir le temps écoulé depuis sa mort.

  • Ø L’hydratation de l’obsidienne

Cette méthode est employée pour calculer les âges en années, d’objets fabriqués en obsidienne (éléments principaux : silicium, oxygène et calcium) ou de verre volcanique récents, en déterminant l’épaisseur des couches (hydratées) produites par la vapeur d’eau qui a diffusé dans le verre lorsque sa surface a été exposée pour la première fois à l’air (fracture du verre volcanique, ou sculpture pour les objets). La méthode de l’hydratation de l’obsidienne est applicable à ces types de verres vieux de 200 à 200 000 ans.

Aussi, à partir d’un simple échantillon d’obsidienne, peut-on souvent remonter à l’éruption d’origine et retracer la vie d’un volcan. Les archéologues utilisent aussi cette information pour reconstituer les réseaux d’échange des premiers marchands qui faisaient le troc de haches de pierre.

  • Ø La thermoluminescence

Cette méthode utilise le phénomène des radiations ionisantes naturelles. Celles-ci peuvent créer des électrons libres dans les minéraux qui sont piégés dans des défauts de leur structure cristalline. Ces électrons piégés s'échappent par thermoluminescence lorsqu'ils sont chauffés à une température inférieure à celle de l'incandescence. En enregistrant la thermoluminescence d'un minéral qui a été exposé à un niveau de radiation constant, le dernier drainage des électrons piégés peut être ainsi daté sur plusieurs centaines de milliers d'années. Pour dater de la poterie, par exemple, le spécimen est chauffé : il restitue alors par thermoluminescence l'énergie qu'il a stockée dans ses défauts cristallins depuis le moment où il a été cuit.

  • Ø La dendochronologie

Cette méthode biologique est basée sur l'étude et la lecture des cernes de croissance des arbres. En effet chaque année l'arbre pousse différemment suivant la température, l'humidité (ou la sécheresse) et plus généralement la météo. Les cernes sont donc plus ou moins épaisses et on a donc pu établir une chronologie de référence.

2-4- La paléoécologie humaine

La paléoécologie est l’étude de l’écologie du passé. C’est une discipline scientifique étroitement liée aux sciences géologiques et biologiques. Elle a pour objet l’étude et la compréhension des relations entre les organismes fossiles et l’environnement dans lequel ils vivaient. La paléoécologie humaine a donc pour objet la reconstruction des écosystèmes anciens dans lesquels ont vécu les hominidés. Elle suppose une intégration de toutes les connaissances concernant l’histoire détaillée de la terre, des animaux, de la répartition des végétaux, du climat au cours des derniers millions d’années.

Les reconstitutions de l’environnement doivent tenir compte de toutes les transformations qu’ont dû subir les organismes au cours de la fossilisation. Les processus de transport, de redépôt ont parfois mélangé les organismes de plusieurs écosystèmes dans le même paléoécosystème. Toutes ces distorsions doivent être détectées ; tel est l’objet des études taphonomiques.

Au quaternaire (dont le début remonte à 1,64 Ma, est caractérisée par des successions de périodes glaciaires), pour les derniers 20.000 ans les reconstitutions de l’environnement végétal  sont principalement fournies par l’étude des pollens fossiles, préservés dans les tourbières des lacs, celles des macrorestes végétaux, graines, fruits, bois, préservés dans les sites préhistoriques. Pour les époques plus anciennes et les régions tropicales, il est exceptionnel que les pollens fossiles soient conservés, les recherches, dans ce domaine, sont peu avancées. L’environnement est souvent reconstitué d’après l’étude des faunes fossiles, certes abondantes, mais dont de nombreuses espèces ont aujourd’hui disparu.  

II-    L’EVOLUTIONNISME EN PALEOANTHROPOLOGIE

Rappelons que dès son apparition, en tant que science au XIXème siècle, l'anthropologie s’est placée dans le paradigme (modèle théorique de pensée qui oriente la recherche et la réflexion scientifiques)  évolutionniste, relativement à la détermination des origines de l’humanité. Se démarquant ainsi des courants de pensées philosophiques ou religieux qui prévalaient depuis de longues périodes, l’évolutionnisme privilégie l’idée d’un processus continu partant d’un point de départ ancestral préhominien vers une destination finale, l’homme actuel. A cet effet, différents concepts de bases formulés en paléoanthropologie, tentent d’expliquer les modalités de cette évolution au regard des découvertes en géologie et en biologie. Mais avant d’aborder lesdits concepts, nous jugeons opportun de jeter un bref regard sur le contexte historique de la théorie de l’évolution.

2-1- Contexte Historique

Le contexte historique dans l’approche de l’évolutionnisme, dans ce cours, prend en compte la progression des modèles de pensée liés à l’origine des espèces et la genèse de l’évolution.

2-1-1- Origine des espèces : Du fixisme au transformisme

Le monde vivant a été considéré jusqu’au XVIIIe siècle comme immuable. En effet, jusque là, pour les sciences, les générations se succédaient dans une continuité des espèces et sans changements. Cette conception correspond aussi à la vision du monde développée dans le livre de la  Genèse, et partagée par les trois grands monothéismes. Seules quelques exceptions affirmeront une certaine transformation des êtres. Ainsi, déjà au VIe siècle avant notre ère, Anaximandre s’interroge sur l’origine de la vie. De ses observations des fossiles, il admet que les êtres se modifient. Héraclite semble partager cette opinion en affirmant que tout se meut et que les êtres sont perpétuellement en devenir. Certes il ne s’agit pas encore ici de réflexions évolutionnistes mais la question est posée.

Le XIVe siècle de notre ère voit naître le penseur Ibn Khaldoun. Certains de ses relecteurs voient en lui un évolutionniste avant l’heure. Toutefois, ceci est relativiser car il n’était pas à proprement parler un scientifique mais un observateur et un commentateur. Il observe la transformation des êtres et la réinterprète à la lumière de sa foi pour conclure à un créationnisme évolutionniste. Ceci en mettant l’homme au sommet de la création tout en faisant une allusion au lien « homme  –  singe ». Jérôme Cardan (1501-1576), médecin constate la transformation des espèces en s’appuyant sur l’observation du chien et du loup. Tandis que Lucilio Vanini est brulé vif en 1619 pour avoir affirmé une possible origine animale de l’homme.

Les quelques exemples mentionnés ici montrent combien l’idée de transformation ou d’évolution du vivant était marginale. L’opinion majoritaire étant celle d’un fixisme né des monothéismes abrahamiques qui voient en Dieu, le Créateur. La véritable naissance de l’idée d’évolution se fera au XVIIIe siècle.

En effet, la volonté de découvrir les lois de la nature sera alors à son apogée. Les précurseurs en la matière seront sans nul doute Maupertuis (1698-1759) et Buffon (1707-1748). Le premier est un généticien avant l’heure. En effet, il  affirme que père et mère ont la même influence sur l’hérédité. Il observe la transmission d’anomalies mais en reste à une conception essentialiste de l’espèce. Georges Buffon conserve lui aussi l’idée de l’espèce essentialiste. Il est le premier à mettre  en évidence le lien étroit entre l’espèce et son environnement. Il suggère que l’environnement modifie les organismes. Certaines modifications peuvent être transmises par l’un ou l’autre des parents. En liant, l’influence de l’environnement et la transmission des caractères, Buffon établit une première ébauche de théorie de l’évolution. Toutefois, il ne développe en aucune manière les raisons d’une telle éventualité. Une des grandes difficultés se trouve dans la datation de la terre. En effet, celle-ci n’aurait que 75 000 ans selon Buffon. Comment l’évolution telle qu’il la décrit peut-elle avoir lieu en un laps de temps aussi court ?

C’est un disciple de Buffon, Jean Baptiste de Monet (1744-1829), plus connu sous le nom de chevalier de Lamarck, qui propose une théorie cohérente de la modification des espèces. Ce naturaliste chevronné, est spécialisé dans l’étude des insectes et des vers mais est aussi attiré par la botanique. On lui doit notamment d’avoir forgé le terme de biologie qu’il conçoit comme la science qui étudie la totalité de la vie, animale et végétale. La postérité retiendra surtout de lui sa théorie évolutionniste. Lamarck nuance le propos de Buffon concernant l’environnement et son rôle sur la modification des espèces. Ainsi, ce sont les  changements  dans l’environnement qui amènent les modifications de l’individu. Ce dernier doit modifier ses habitudes afin de s’adapter à son nouveau milieu. Nous avons tous en tête les schémas concernant l’allongement du cou des girafes par la raréfaction de  leur nourriture au sol. Ces nouvelles habitudes donnent naissance à de nouveaux mécanismes permettant l’émergence de nouvelles espèces. La théorie de Lamarck se résume souvent à l’idée de la transmission des caractères acquis. Ce concept est partagé par la plupart de ses contemporains, même Darwin y adhère.

2-1-3-Genèse de la théorie de l’évolution

De l’année 1809, date de publication de la  Philosophie zoologique  de Lamarck, il faut aussi retenir la naissance de Charles Darwin, le 12 février de Erasmus Darwin, qui, quelques années avant Lamarck, a publié un ouvrage,  Zoonomia,  dans lequel il rompt avec « le dogme de la création spéciale et de la fixité des différentes catégories d’êtres vivants ». Il est, selon P. Tort, le premier à concevoir une transformation progressive des organismes et des espèces en fonction des besoins.  En 1831 Darwin découvre la géologie grâce à A. Sedgwick (1785-1873). Et c’est J. S. Henslow (1796-1861), professeur de botanique qui lui propose d’embarquer sur le  Beagle. Ce navire est chargé d’opérer des relevés hydrographiques le long des côtes sud américaines, Charles Darwin faisant office de naturaliste. Lors de ce voyage Darwin observera la fantastique variété des espèces trouvées sur la terre, l’énorme quantité d’individus par espèces et leur compétition pour la nourriture. À son retour en 1836, il a par ses observations et la collecte des informations de son voyage tous les éléments pour établir la thèse qu’il défendra dans son ouvrage “l’Origine  des espèces” publié pour la première fois en 1859.

Préalablement à la publication de son ouvrage, Il prit le soin de confier l’examen de ses collectes à divers spécialistes, notamment à John Gould, ornithologue, qui étudiera les pinsons des Galápagos. Les observations de ce dernier, lui permettèrent de conclure qu’il s’agit de véritables espèces et non de variétés ne formant qu’une seule espèce. Ce qui va ouvrir Darwin au transformisme et cela, suivant l’exemple de Lyell en géologie (in Principles of Geology) qui se démarque du catastrophisme de Cuvier pour proposer une représentation évolutive des phénomènes naturels.

Lors de ce voyage Darwin découvre aussi des fossiles desquels il conclut une parenté avec les espèces vivantes. Il souligne aussi les mouvements de la croute terrestre, la distribution géographique des espèces, les migrations, les barrières géographiques.

Une lecture sera  déterminante pour la suite de ses recherches, celle de l’Essai sur le principe de population (publié en 1798) de Thomas Robert Malthus. Cet économiste, pasteur et sociologue anglais propose le principe de population. Ainsi, il constate que « les hommes se multiplient beaucoup plus vite (progression géométrique) que les productions alimentaires (progression arithmétique) ». Il en conclut qu’il y a un combat pour la nourriture, lorsque la population a atteint le point de saturation, une famine  survient et la population diminue.

Darwin, après cette lecture « distrayante » en 1838 et sa préparation à « apprécier la présence de la lutte pour l’existence », a été frappé par l’idée que « dans ces circonstances les variations favorables auraient tendances à être préservées et les défavorables anéanties ». Le résultat est la possibilité d’émergence de nouvelles espèces et Darwin avait « enfin une théorie pour travailler ».

2-2-   Les concepts développés dans le paradigme évolutionniste

Le paradigme évolutionniste a été le cadre de développement d’une suite de concepts qui intègrent différentes logiques de raisonnements sur le processus évolutif des espèces. Ces concepts qui se contredisent, parfois se complètent et se synthétisent sont particulièrement nombreux. Cependant, dans le cadre de ce cours, nous exposerons ceux qui ont selon toute vraisemblance, principalement impacté l’histoire de la paléoanthropologie.

2-2-1- La sélection naturelle

En 1859, Charles Darwin publiait  l’ouvrage “L’origine des espèces”, dans lequel il articulait sa démarche autour de deux principales idées à savoir que :

  • L’évolution explique l’unité et la diversité de la vie observée entre des espèces distinctes en différents lieux et à différentes périodes (fossiles, organismes récents).
  • La sélection naturelle explique qu’il y ait une évolution adaptative (adaptation relative).

Darwin utilise le terme « sélection » pour désigner un processus naturel de modification des espèces. Il s’agit d’une analogie raisonnée entre sélection               « naturelle » et sélection « artificielle » déjà connue à son époque, permettant aux éleveurs d’obtenir des variétés d’animaux ou de plantes présentant des caractéristiques particulières.

Dans le contexte de la sélection artificielle comme dans celui de la sélection naturelle, des variations sont nécessaires. Ces variations doivent ensuite être transmissibles de manière héréditaire. En d’autres termes, les traits qui sont sélectionnés (artificiellement  ou  naturellement)  sont  des  traits  hérités. Darwin  postule  une  telle  transmission  en  se  basant  sur l’observation  de  similarités  entre  des  ancêtres  et  leur descendance.

Il faut enfin que ces variations affectent la probabilité de reproduction des individus d’une génération donnée. Dans le cadre  de  la  sélection  artificielle,  le  facteur  de  probabilité  de reproduction  est  contrôlé  par  l’homme.  Dans  le  cas  de  la sélection naturelle, c’est la lutte pour la vie qui constitue la force de changement. Le concept de sélection naturelle se caractérise, selon Darwin, de la manière suivante : « Pouvons-nous douter (…) que les individus possédant un avantage quelconque, quelque léger qu’il soit d’ailleurs, aient la meilleure chance de survivre et de reproduire leur type ? Nous pouvons être certains, d’autre part, que toute variation, si peu nuisible qu’elle soit, sera impitoyablement détruite. Cette préservation des variations favorables et le rejet des nuisibles, je l’appelle sélection naturelle » (Darwin, 1859, chapitre IV).

Darwin avance une série d’argumentations basées sur un certain nombre d’observations, pour expliquer son concept de la sélection naturelle.

-    1ère Observation : La  population  d’une  espèce  augmente exponentiellement si ses membres se reproduisent avec succès.

-    2ème Observation : La  taille  d’une  population a  néanmoins  tendance  à rester stable.

-    3ème Observation : Les ressources sont limitées.

La première inférence formulée par Darwin à partir de ces trois premières observations, est qu’il ya une lutte pour la vie (struggle for existence)

-    4ème Observation : Les individus d’une même espèce possèdent des traits différents (variations).

-    5ème Observation : La  plupart  de  ces  variations  sont  transmises héréditairement.

La deuxième inférence indique alors que, la survie dépend des variations transmises  (survival of the fittest).

La troisième inférence qui est en fait la dernière, indique que cette capacité inégale des individus à survivre et à se reproduire  entraîne  un  changement  graduel.  C’est l’évolution.

En résumé, la théorie de la sélection naturelle de Darwin se base sur des observations connues et se caractérise par sa capacité explicative et unificatrice. D’une manière assez simple, elle traduit l’idée que :

-       Les individus sont en concurrence pour la survie dans un environnement aux ressources limitées,

-       Seuls les individus les plus aptes survivent,

-       Ceux qui survivent se reproduisent,

-       De génération en génération, les individus développent les carac­té­ris­tiques les plus adaptées à la survie dans un environnement donné.

Ainsi, par exemple, sur une île où les fruits sont protégés par une coque, les oiseaux avec le plus long bec trouveront plus facilement de la nourriture et seront en meilleure santé. Comme ils seront en meilleure santé, ils attireront plus facilement les femelles et leur lignée se reproduira plus vite. Au bout de plusieurs générations, il n’y aura plus sur l’île que des oiseaux à long bec. La longueur du bec sera égale à celle dont ces ​​oiseaux ont besoin pour atteindre le fruit.

Les hommes eux-​​mêmes sont différents selon l’environnement où ils vivent : leur peau est plus claire dans l’hémisphère nord où la lumière est plus faible, plus foncée dans l’hémisphère sud où la lumière est plus forte, le nez est épaté en Afrique pour évacuer plus facilement la chaleur, tandis que les Esquimaux sont plus trapus et plus gras pour résister au froid.

 

2-2-2- Le transformisme

La sélection naturelle a souvent été opposée au transformisme, une théorie proposée par le chevalier de Lamarck (1744-1829). Le début du XIXème Siècle, puisant ses racines dans le siècle des lumières qui s'achevait, vit l'apparition du mot "biologie" qui, un peu plus tard, allait remplacer l'appellation d'histoire ou de sciences naturelles. C'est à cette époque, en 1809, que Lamarck publia sa "Philosophie Zoologique"1.

Dans son ouvrage, il formula une théorie scientifique globale qui tentait d'expliquer les transformations des êtres vivants dans leur progression du simple vers le complexe. Pour Lamarck, la matière a une tendance naturelle à se compliquer grâce aux "fluides" qui modifient le tissu cellulaire dans lequel ils se meuvent pour y ouvrir des passages, des canaux, pour y créer des organes. La vie se développe de l'inférieur vers le supérieur de façon progressive et régulière, en suivant son penchant naturel. Cette régularité est troublée par les circonstances extérieures qui expliquent la diversité parfois mal ordonnée du vivant.

Porté par l'élan de son "transformisme généralisé", Lamarck formula deux lois qui rendent compte de sa vision du processus évolutif :

1- "Dans tout animal qui n'a point dépassé le terme de ses développements, l'emploi plus fréquent et soutenu d'un organe quelconque fortifie peu à peu cet organe, le développe, l'agrandit et lui donne une puissance proportionnée à la durée de cet emploi, tandis que le défaut constant d'usage de tel organe l'affaiblit insensiblement, le détériore, diminue progressivement ses facultés et finit par le faire disparaître."

2-      "Tout ce que la nature a fait acquérir ou perdre aux individus par l'influence constante des circonstances où leur race se trouve depuis longtemps exposée, et par conséquent par l'influence de l'emploi prédominant de tel organe, ou par celle d'un défaut d'usage constant de telle partie, elle le conserve pour la génération de nouveaux individus qui en proviennent, pourvu que les changements acquis soient communs aux deux sexes, ou à ceux qui ont produit ces nouveaux individus."

En amalgamant ces deux hypothèses, le langage courant simplifie en affirmant que "la fonction crée l'organe". La seconde loi de Lamarck postule sa fameuse thèse de l'hérédité (les caractères acquis par un  individu durant sa vie, sont transmis à la génération suivante à condition que ces caractères soient communs aux deux parents) qui aura, bien plus tard, une résonance exceptionnelle dans l'histoire des sciences. Dans son ouvrage, il étayait ses deux lois par de nombreux exemples qui le conduisirent à les considérer comme des vérités et non plus comme de simples hypothèses. Il convient de noter que ses arguments pourraient, encore aujourd'hui, emporter la conviction du profane. Ainsi, l'exemple célèbre de la taupe pratiquement aveugle qui "par ses habitudes fait très peu usage de la vue", ou encore le cas de la girafe vivant "dans les lieux où la terre, presque toujours aride et sans herbage, l'oblige de brouter le feuillage des arbres", a résulté en un cou allongé qui porte sa tête à six mètres de hauteur.

Il semble que se soit bien la complexification croissante des organismes et leur nécessaire adaptation au milieu qui ont permis à Lamarck de conclure à la nécessité de la transformation des vivants pour expliquer la diversité actuelle d’où la naissance de l’histoire du vivant.

La philosophie de Lamarck suppose l'apparition de la vie par génération spontanée sous la forme d'êtres inférieurs qui auraient jailli dans un passé très éloigné. Mais, malgré son caractère implicitement déterministe et la nécessité d'un auteur suprême, il ne faut cependant pas oublier l'avertissement de Lamarck : "c'est donc une véritable erreur que d'attribuer à la nature un but, une intention quelconque dans ses opérations".

2-2-3- L’adaptationnisme

L'adaptationnisme est un courant de pensée dans l'étude de l'évolution biologique qui insiste sur le fait que les traits des espèces vivantes, qu'il s'agisse d'un organe ou d'un comportement, sont principalement le résultat d'une adaptation aux pressions de sélection qui pèsent sur les individus.

Nous pouvons définir l’adaptation comme la modification évolutionnaire qui permet l’amélioration de la fitness sous pression de la sélection naturelle.

Cependant, la pression sélective dépend également du contexte environnemental. Elle cause ainsi des chemins évolutifs divers dans des contextes environnementaux différents. C’est cela qui explique la diversité du vivant que nous connaissons sur la planète. Cette adaptation radiative qui constitue une diversification dans l’espace écologique et géographique à des contextes différents peut aboutir à la spéciation des populations d’une espèce.

2-2-4- Le gradualisme

« Natura non facit saltum », cette expression latine, généralement attribuée à Linné, signifie que « la nature ne fait pas de sauts ». Darwin approuvait totalement cette devise ancienne (Gould, 1980). Disciple de Charles Lyell, l’apôtre du « gradualisme » en géologie, Darwin décrivait l’évolution comme un processus régulier agissant avec une telle lenteur que personne ne pouvait l’observer pendant la durée d’une vie. Les ancêtres et leurs descendants, selon Darwin, doivent être reliés par « une infinité de liens transitoires » qui forment une « belle succession d’étapes progressives ». Seule une longue période de temps permet à un processus si lent de réaliser une telle œuvre.

Darwin considérait les registres fossiles plus comme un embarras qu’une aide à sa théorie. Il demandait (Darwin, 1859 cités par Eldredge & Gould, 1972), pourquoi ne trouvons-nous pas de « liens transitoires infiniment nombreux » qui pourraient illustrer l’opération lente et constante de la sélection naturelle ? « Pourquoi toute formation géologique et toute strate ne sont-elles pas pleines de tels liens intermédiaires ? » Darwin résolvait ce dilemme en invoquant: « Les témoignages sur l’histoire géologique sont extrêmement imparfaits et ce fait à lui seul explique en grande partie pourquoi nous ne trouvons pas un nombre infini de variétés reliant entre elles toutes les formes de vie disparues et actuelles par une succession d’étapes progressives. Celui qui rejette ce point de vue sur la nature des registres géologiques pourra à juste titre refuser toute ma théorie ».

Darwin imposait ainsi une tâche pour la paléontologie évolutive (Gould et Eldredge, 1972) à savoir :

-         démontrer l’évolution,

-         extraire les rares exemples des processus darwiniens des séries de fossiles insensiblement graduées, épargnées d’une façon ou d’une autre des ravages de la décomposition, du non-dépôt, du métamorphisme, ou de la tectonique.

Dans son livre On the Origin of Species by Means of Natural Selection, Darwin expliquait que les nouvelles espèces pouvaient naître seulement de deux manières : par la transformation d’une population entière d’un état à un autre (évolution phylétique) ou par le fractionnement d’une lignée (spéciation) (Gould et Eldredge, 1972). Le second processus doit avoir lieu (spéciation) : sinon il ne pourrait pas y avoir une augmentation du nombre de taxons et la vie cesserait puisque les lignées s’éteindraient. Malgré tout, comme Mayr l’avait noté, Darwin a embrouillé cette distinction et a projeté la plupart de sa discussion en termes d’évolution phylétique. Quand Darwin discutait de la spéciation, il continuait à parler de transformation graduelle : il voyait la transformation lente et constante de deux lignées séparées. Donc, pour Darwin, la spéciation conduisait au même résultat que l’évolution phylétique : une chaîne graduelle longue et insensible de formes intermédiaires.

Nous pouvons résumer la théorie du gradualisme de Darwin en ces quatre points suivants (Gould et Eldredge, 1972) :

- les nouvelles espèces naissent par la transformation d’une population ancestrale en ses descendants modifiés.

- la transformation est égale et lente.

- la transformation implique de grands nombres, habituellement la population ancestrale entière.

- la transformation à lieu sur toute ou une grande partie de l’espace géographique des espèces ancestrales.

Ces énoncés impliquent plusieurs conséquences, deux d’entre elles semblent spécialement importantes aux paléontologues :

1-   idéalement, le registre fossile, pour l’origine de nouvelles espèces, devrait consister en une longue séquence de formes intermédiaires graduée liant l’ancêtre et son descendant.

2-   les ruptures morphologiques dans une séquence phylétique sont dues aux imperfections dans le registre géologique.

2-2-5- Les équilibres ponctués

Après Richard Goldschmidt dans les années 1940 et ses "monstres prometteurs", le paléontologiste Stephen Jay Gould formula avec Eldredge une théorie selon laquelle les espèces n'évoluent pas graduellement, mais restent stables pendant de longues périodes ponctuées par des phases de modifications très rapides. Ces alternances de stabilités et de discontinuités, baptisées "équilibres ponctués", fournissent une explication aux tendances évolutives qui se manifestent dans l'histoire des fossiles.

En effet, deux faits remarquables plaident en la faveur d'une évolution saccadée au lieu d'être uniformément graduelle. Tout d'abord, l'origine géologiquement "soudaine" des espèces nouvelles, associée à leur stabilité par la suite, constitue un indice sur la nature du principe évolutif et non des manques dans la continuité des traces fossiles. Selon la plupart des thèses actuelles, les nouvelles espèces proviennent de petites populations isolées dont la spéciation s'étale ensuite sur des milliers d'années. A notre échelle, cette durée semble extrêmement longue, mais elle ne représente plus qu'un infime instant lorsqu'elle est ramenée à l'échelle géologique. En outre, il ne faut pas s'attendre à des changements spectaculaires au sein d'espèces largement répandues. Cette inertie des populations établies explique la stase de la plupart des espèces fossiles pendant plusieurs millions d'années. Par conséquent, selon Gould, l'évolution des êtres vivants ne peut être attribuée à une transformation graduelle mais découle de la réussite différentielle de certaines espèces. L'évolution ressemble alors plus à la montée d'une volée de marches (ponctuations) suivie de longs corridors (stases), qu'à l'ascension continue d'un plan incliné.

Une autre source de discontinuité avancée par Gould réside dans l'hypothèse des extinctions brusques et massives qui ont ponctué l'histoire de la vie sur terre. Les dinosaures ont disparu il y a soixante-cinq millions d'années au cours du crétacé. Ils ont dominé la terre pendant cent millions d'années et la domineraient probablement encore s'ils n'avaient pas été anéantis et avec eux la moitié des espèces d'invertébrés des hauts-fonds marins. Certains éléments réunis depuis 1980 étayent l'hypothèse de l'impact d'un corps céleste avec notre planète, qui aurait provoqué cette extinction massive. Sans cette catastrophe, il est probable que les mammifères ne seraient encore aujourd'hui que de petites créatures insignifiantes et nous ne serions pas là pour en parler. Il semble que cinq extinctions massives de même type soient ainsi survenues au cours de l'histoire du vivant. Ces cataclysmes ont contribué, sans aucun doute, au caractère discontinu et imprévisible de l'évolution.

2-2-6- L’évolution synthétique ou néo-darwinisme

La génétique des populations ayant conduit à la réconciliation des darwiniens (partisans de la sélection naturelle, d’une évolution graduelle, d’adaptation à l’environnement, de petites variations cumulatives) et des mendéliens (rejetant la sélection naturelle, privilégiant la saltation et donc les mutations importantes) à partir des années 1910, il restait à produire une synthèse cohérente de ces conclusions. D’où l’émergence de la théorie synthétique de l’évolution dont les principaux acteurs vont être en 1937, Théodosius G. Dobzhansky (1900-1975), en mars 1942, Julian S. Huxley et en mai 1942, Ernst W. Mayr (1904 -2005).

  • La synthèse selon Dobzhansky

Précurseur de l’évolution synthétique, Il a réussi à faire converger les recherches mendéliennes expérimentales et les travaux d’histoire naturelle, ayant lui-même suivi un double cursus (génétique et taxinomie). Par contre, il était très peu au fait de la théorie mathématique de la génétique des populations. Gould souligne que la synthèse que propose Dobzhansky (tout comme celle de  Mayr) a elle-même évolué au fil du temps et cela pour passer d’une synthèse pluraliste à un adaptationnisme plus strict. Dans la première version de “Genetics and the Origin of Species”, Dobzhansky soutient que «la génétique expérimentale fournissait suffisamment de mécanismes pour rendre compte de l’évolution à tous les niveaux». Il souligne aussi le rôle de la dérive génétique, qu’il considère comme un mécanisme de dispersion de la variabilité. Il souligne encore que la dynamique évolutive dépend de la taille de la population car la sélection n’est pas toujours responsable de l’évolution.

Pour les éditions suivantes, l’idée d’adaptationnisme s’est développée au détriment des autres modes de changements évolutifs. Selon Gould, Dobzhansky est de plus en plus persuadé «du pouvoir de la sélection naturelle et de l’ampleur de son domaine d’application ainsi que de la nature adaptative de la plupart des changements évolutifs ». Dans cette perspective, le trépied darwinien retrouve son équilibre, les mutations, variations mendéliennes, permettent d’expliquer la sélection qui retrouve une place.

  • La synthèse selon Huxley

Dans son ouvrage “Evolution, The modern Synthesis”, Huxley mentionne pour la première fois la notion de « théorie synthétique ». Dans cet ouvrage il attribue à la génétique, ce que Darwin avait déduit de la sélection naturelle et qu’il n’avait pas pu vérifier étant donné l’absence des lois de l’hérédité. Il réfute aussi la thèse de L. Hogben qui estime que la fusion entre mendélisme et darwinisme change totalement le mécanisme de l’évolution et  qu’en conséquence un changement de nom était nécessaire. Le développement de Huxley se base sur le fait que toute théorie est appelée à se modifier. Le changement de nom n’étant nécessaire selon lui que s’il n’existe plus de continuité avec les fondements de la théorie, ce qui n’est pas le cas pour lui, dans la synthèse effectuée par Fisher, Haldane et Wright. Il souligne aussi que « l’adaptation est omniprésente ». Dans la synthèse telle que l’élabore Huxley, le darwinisme et donc la sélection est la conception centrale de l’évolution.

  • La synthèse selon Mayr

E. Mayr, naturaliste, comprend la synthèse comme une fusion de trois disciplines : la génétique expérimentale, la génétique des populations et l’histoire naturelle ou systématique. Pour lui, il s’agit « non pas d’une révolution mais plutôt de l’unification d’un champ de bataille jusqu’alors divisé, par l’information mutuelle et le développement d’une matrice interdisciplinaire ». Il ne fait en aucun cas une lecture réductionniste qui voit dans la génétique la discipline suprême. Dans son ouvrage, “Systematics and the Origin of Species”, il souligne la meilleure compréhension entre généticiens et systématiciens. Il utilise principalement des arguments darwiniens et les complète avec la génétique. Il ne donne pas un rôle prépondérant à l’adaptation dans la sélection. Il conclut à une démarche pluraliste. Mais dans son ouvrage de 1963, “Animal species et Evolution”, Mayr, comme Dobzhansky revient à un schéma quasi exclusivement adaptationniste.

Pour  Gould, la théorie synthétique perd de sa richesse au fur et à mesure qu’elle se tourne plus exclusivement vers l’adaptationnisme. Une telle lecture lui permet dans une certaine mesure de justifier ses propres découvertes et convictions.  

Cependant, un auteur en l’occurrence Jean Chaline résume mieux l’évolution synthétique : « Les populations présentent une certaine variabilité génétique due à l’existence des mutations et des recombinaisons qui apparaissent et se font au  hasard. Les populations évoluent graduellement par des changements dans la fréquence des gènes assurés par la dérive génétique aléatoire, le flux génique et la sélection naturelle. La formation des espèces se réalise selon les modèles de  spéciation allopatrique. Comme les populations se trouvent dans des environnements présentant des caractéristiques qui sont favorables ou défavorables aux divers génotypes, la  sélection naturelle  assure la persistance ou l’élimination des individus en fonction de leur compatibilité avec les paramètres de l’environnement, elle assure donc l’adaptation ». En 1959, pour le centième anniversaire de la publication de l’Origine des espèces, la théorie synthétique de l’évolution est à son apogée. Mais de nouvelles découvertes, notamment celle de l’ADN, vont amener les scientifiques à revoir encore leur conception de l’évolution.

CONCLUSION

La question centrale généralement formulée depuis de longues dates par l’homme, relativement à ses origines et ses particularismes dans le règne animal, semble avoir au-delà de toute passion religieuse, trouvé des pistes de réponses sérieuses dans le paradigme évolutionniste. En effet, grande théorie unificatrice, l’évolutionnisme a permis de faire converger divers champs de connaissances tels que l’astronomie, la géologie et la biologie pour mettre en relief les phénomènes naturels explicatifs de la diversité des espèces et la variabilité inter et intra-spécifiques. Les différents concepts de base développés à cet effet, qui se contredisent, se complètent voire se synthétisent, représentent les divers courants de pensées développés par les scientifiques pour l’expliquer et l’expliciter, tout en s’appuyant sur des constats parfois loin de faire l’unanimité.

Les mécanismes divers évoqués pour expliquer les changements morphologiques intervenus à l’intérieur des lignées d’espèces, ont finalement bénéficié de l’éclairage de la génétique, conférant ainsi la rationalité scientifique qui manquait à la plupart des concepts développés dans le paradigme à évolutionniste. L’une des conséquences de l’évolution est donc que les espèces actuelles sont d’autant plus proches, par leur ADN, leurs protéines, leur anatomie, etc. qu’elles sont plus étroitement apparentées entre elles, c’est à dire qu’elles partagent un ancêtre commun plus récent. Ceci a conduit à fonder désormais la classification du vivant sur les relations de parenté évolutive plutôt que sur les seules ressemblances morphologiques. Ceci revient à classer les organismes en fonction des caractéristiques héritées de leurs ancêtres communs,  c'est-à-dire en fonction de leur « généalogie » évolutive. C’est pourquoi on parle désormais de classification phylogénétique du vivant.

L’ensemble des informations réunies indépendamment par les différents domaines de la biologie et par la paléontologie constituent un faisceau d’arguments qui convergent de façon cohérente pour soutenir la notion d’évolution du vivant. Aucune donnée scientifique pertinente n’a pu jusqu’ici la remettre en cause en tant que telle, même si les mécanismes en œuvre restent l’objet de débats. La notion d’évolution s’est imposée comme tellement fondamentale pour la biologie que Theodosius Dobzhansky, un des grands spécialistes de l’évolution, a pu écrire :       « Rien n’a de sens en biologie, si ce n’est à la lumière de l’évolution ».

 

                                                                                                                                                                    


15/08/2013
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COURS Dr Kpatta Gerome

[BIOANTHROPOLOGIE ET PLURALITE HUMAINE]  08 août 2013
Cours de licence 1  d’Anthropologie (ISAD-UFR –SHS / Université FHB) Dispensé par : Dr. Jérôme KPATTA, Sociologue-Anthropologue
Portable : +22501766757/08410415 / e-mail :j_kpatta@yahoo.fr

INTRODUCTION
Les différences subsistent bien entre "espèces humaines". Un Africain ou un Asiatique ne se
ressemblent pas physiquement et au-delà, il n'aura ni les mêmes  habitudes que les
Occidentaux, ni la même manière de penser ou de se comporter, ni la même mentalité, la
même culture ou la même éducation. Certaines de ces différences peuvent être incomprises ou
choquer, voire plus, et lorsqu'elles ne sont plus supportées,  entraînent des discriminations ou
des exactions.  Et on sait qu'en Europe on marie les homosexuels, alors qu'en Afrique on les
emprisonne.
Pour  tenter de comprendre  « bianthropologie et pluralité humane »,  je propose la démarche
suivante, les étudiants doivent produire des  travaux dirigés  avec les termes ci-dessous  et cela
constituera l’ossature du cours:
1.  Approche définitionnelle des concepts : anthropologie ; biologie, pluralité humaine ;
2.  Diversité culturelle ou vision anthropologique de la pluralité humaine
3.  Diversité biologique ou vision biologique de la pluralité humaine
4.  Biologie et anthropologie quel rapport ?
En  réalité ce cours sous une forme CM/TD,  dont l’objectif général vise à sensibiliser les
étudiants sur la branche  « bioanthropologie »  qui cumule  deux disciplines pour mieux saisir
les  marqueurs  génétiques de certains comportements  des humains.  Toujours  dans leur
processus d’initiation en guise d’objectifs spécifiques, les étudiants seront capables:
1.  De  se familiariser à la définition des concepts clés  de cette spécialité  dans une
démarche « learning by doing » apprendre en travaillant ;
2.  De savoir que le biologique influence le culturel et inversement ;
3.  De pouvoir articuler la biologie et l’l’anthropologie ;
4.  De s’imprégner de la pluralité des humains ;
5.  De  comprendre que la diversité humaine se perçoit tant dans la culture que dans le
biologique.

 


[BIOANTHROPOLOGIE ET PLURALITE HUMAINE]  08 août 2013
Cours de licence 1  d’Anthropologie (ISAD-UFR –SHS / Université FHB) Dispensé par : Dr. Jérôme KPATTA, Sociologue-Anthropologue
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2
I-  CONCEPTUALISATION
Qu’est-ce que la sociologie ?
Sciences humaines et sociales ou de la nature ?
Par sciences humaines et sociales, on entend en général un ensemble de disciplines diverses et
hétérogènes, telles que la sociologie, l'économie,  l'anthropologie
1
, la psychologie, l'histoire,
la géographie, l'archéologie, la linguistique, la communication, voire aussi  les sciences de la
religion (ou théologie).
Les sciences humaines et sociales excluent :
  les «sciences de la terre et de la vie » ou «de la nature » (dans le sens d'une opposition
entre homme et nature, soit entre culture et nature),
  les «sciences et techniques » (dans le sens de connaissances pragmatiques, intuitives ou
appliquées),
  les « arts et lettres » (dans le sens des pratiques fondées sur la subjectivité, incompatibles
avec une objectivité),
  le droit appliqué (qui n’est pas une science, par définition, mais des règles).
La culture selon Edward Burnet Tylor
La première définition anthropologique de la culture est élaborée par le Britannique Edward
Burnet Tylor dans son ouvrage  Primitive Culture (la Civilisation primitive,  1871) : «  La
culture, considérée dans son sens ethnographique le plus large, est ce tout complexe qui
englobe les connaissances, les croyances, l’art, la morale, la loi, la tradition et toutes autres
dispositions et habitudes acquises par l’homme en tant que membre  d’une société ». La
culture est ici envisagée comme regroupant tous les traits humains qui peuvent être transmis
socialement et mentalement, plutôt que biologiquement. La définition de Tylor continue donc
d’envisager la culture en l’opposant à la nature.
Profondément ancré dans cette perspective universaliste et envisageant la « culture » au
singulier comme synonyme de la « civilisation », Tylor considère que les différences dans les
1
Démarche inventée par Dr. kpatta : partir de la définition de la sociologie pour situer l’Anthropologie.

[BIOANTHROPOLOGIE ET PLURALITE HUMAINE]  08 août 2013
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champs de la connaissance, des coutumes et des croyances témoignent des différences de
degré d’avancement entre les sociétés. Considérées sur une échelle de progrès définie en
fonction de la complexité relative de la technologie et des institutions sociales, ces différences
sont en effet imputables au niveau de  développement mental atteint biologiquement  par les
populations considérées. L’anthropologie se doit donc de classer les différentes cultures
observées selon un continuum allant du type le plus simple au plus élaboré.
La culture selon Franz Boas
Au début du XX
e
siècle, Franz Boas fournit une première critique de cette définition pour
imposer une approche résolument particulariste de la culture. L’anthropologue américain
d’origine allemande affirme que les formes et les modes de vie des hommes n’évoluent pas
selon un modèle linéaire et en fonction du niveau de leur développement mental, mais
qu’elles sont les produits de processus historiques locaux. Ces processus historiques sont
déterminés non seulement par les conditions environnementales dans laquelle vit la société
considérée, mais également par les contacts qu’elle entretient avec les sociétés avoisinantes.
Par conséquent, plutôt que de comparer des institutions observées dans différentes sociétés,
les anthropologues doivent, selon Franz Boas, analyser en priorité les  éléments d’une culture
dans le contexte de la société étudiée.
L’école « Culture et personnalité »
Cette perspective particulariste et relativiste de la culture donne naissance au milieu du
XX
e
siècle à l’école culturaliste américaine, connue également  sous le nom de « Culture et
personnalité » et représentée notamment par Margaret Mead, Ruth Benedict et Ralph Linton.
L’école culturaliste, qui établit le premier lien entre l’anthropologie et la psychanalyse,
envisage la culture dans une perspective holiste, où l’individu forme un tout indivisible qui ne
peut être expliqué par ses différentes composantes appréhendées séparément. Dans ce cadre,
l’individu est entièrement façonné par la culture du groupe dont il est issu  — par le biais de
l’éducation —, jusque dans sa personnalité, ses comportements, sa vision du monde. Le
relativisme culturel apporte ainsi une réponse directe aux thèses racistes de l’époque, qui
reposent largement sur les postulats évolutionnistes.
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Tout en se fondant sur les théories de Franz Boas, le courant de pensée culturaliste s’en
détache cependant en essayant de nuancer sa définition de la culture. Ainsi, au début des
années 1950, Alfred Kroeber et Clyde Kluckohn tentent-ils de recenser l’ensemble des
définitions de la culture dans l’espoir de proposer une approche plus comparative.
L’anthropologie culturelle américaine demeure toutefois très imprégnée de la conception
boasienne de la pluralité des cultures, l’analyse de la culture d’une société ne s’effectuant
qu’en référence à elle-même.
Culture et société
Le débat autour du concept de culture s’articule par la suite autour de la question de la
distinction entre culture et société. Les structuralistes proposent une vision moins inclusive de
la culture et moins déterministe dans la mesure où ils considèrent que seule l’analyse de la
structure sociale peut rendre compte de façon pertinente de la manière dont les individus et les
groupes produisent et sont les produits de leur contexte culturel. La culture, considérée alors
comme un ensemble de normes de comportement, de symboles et d’idées, apparaît secondaire
par rapport au système social.
Conclusion
Au-delà des échanges en plus des travaux dirigés (des étudiants), il serait intéressant de retenir
que la bio anthropologie  est une science humaine qui met en valeur sans souci discriminatoire
la pluralité des humains tant au plan biologique qu’anthropologique.  Cela  dans l’intérêt de
mieux connaître  l’homme dans sa diversité génétique  que culturelle.  En  réalité,  comment le
biologique influence le culturel et  vice  versa  sur tous les plans de la vie des humains ?  Des
investigations scientifiques  dans  certains  domaines tels que :  alimentation ;  environnement ;
santé ;  religion, pour ne citer que  ceux-là, pourrait à coup sûr  apporter  des pistes de  réponse.
Autrement  dit, les  diverses  modes de pensée, d’agir et d’être  confirment la pluralité des
humains.  Les  exemples sont légion :  à partir de l’étude de la dentition d’un individu on peut
donner sans erreur sa culture alimentaire (un édenté ne se réjouira pas à  croquer des os) ;
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l’excision    et la circoncision  sont des  pratiques  culturelles  qui déforment la physiologie des
individus des communautés qui la diffuse.
ANNEXES (De la lecture pour ceux que cette spécialité passionne)
Y a-t-il des races humaines ? Pourquoi autant de couleurs de peau ?  
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Sommes-nous tous de la même race ?
Depuis plusieurs siècles l’homme a tenté
d’ordonner la nature et les êtres vivants en
établissant des catégories, des groupes, des ordres.
Dans un premier temps les seules différences
anatomiques suffisaient à comparer deux
populations, ce qui faisait classer les chauves-souris dans l’ordre des oiseaux sur le simple fait
que les deux étaient dotés d’organes pour voler… !
Appliquée à l‘Homo sapiens, cette méthode allait marquer pour
longtemps les esprits ! La couleur de la peau, notamment, est
toujours un sujet de conversation et parfois de conflits entre
différentes populations...
Les anciennes tentatives de classifications de l'espèce humaine basées sur des pratiques culturelles ou
anatomiques continuent malheureusement d'alimenter aujourd'hui des théories racistes...
Historique des tentatives de classification humaine
Dans la Bible les hébreux classaient déjà les animaux selon des critères pratiques : purs et impurs,
comestibles ou pas...
En 1684 le médecin français François Bernier fut le premier à imaginer qu’il existait quatre races
d’hommes avec une méthode très simple et géographique  : à chaque continent son type d’homme.
En 1758 Carl Von Linné proposa dans Systema Natura quatre
variétés d’Homo sapiens, leur attribuant des caractéristiques peu
scientifiques :
- les Americanus : rouge, colérique et droit
- les Europeus : blanc, sanguin et musculaire
- les Asiaticus : jaune pâle, mélancolique et rigide
- les Afer : noir, flegmatique et décontracté
Il distinguait également deux autres variétés
fantaisistes : les monstrosus (êtres velus) et ferus
(les enfants sauvages).
Carl Von Linné fut malgré tout l'un des premiers à
tenter d'établir une recension des espèces.
En 1775, le naturaliste Johann Friedrich Blumenbach proposa, en s'appuyant sur
Linné, une nouvelle classification des Homo sapiens : De generis humani varietate
nativa. En 1795, il adopta définitivement la taxinomie suivante : la variété caucasienne
à peau pâle (l'Europe), la variété mongole (Chine et Japon), la variété ethiopienne à
peau sombre (Afrique), la variété américaine et la variété malaise (Polynésiens,
Aborigènes...).
La grande nouveauté de Blumenbach c'est qu'il établit une hiérarchie entre les variétés.
Il place la variété caucasienne à l'origine des autres selon un critère très personnel :
c'est le peuple le plus beau ! Les autres variétés sont une dégénérescence par rapport à
cette population originelle (il faut prendre en compte qu'il emploit le mot dégénérescence dans le sens
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"écart par rapport à").
Il indique toutefois que toutes les variétés d'hommes correspondent à une seule et même espèce : il
défend le principe d'unité de l'espèce humaine.
Toutes ces tentatives de classification vont marquer les époques et notre façon de voir le monde. Nous
en héritons et elles font partie de notre histoire. Certains utilisent encore ces théories (sans parfois les
connaître !) à des fins racistes.
La science, la génétique nous prouvent que l'Homo sapiens est une race à part entière, sans sous-catégorie... et nous ne pouvons pas faire de classification sur des critères aussi subjectifs que la couleur
de la peau, la géographie, la culture ou la beauté d'un individu !
Définition de la race et de l'espèce
Dans la classification générale du vivant on parle d’espèce pour regrouper toutes les populations
interfécondes et dont la descendance peut elle-même se reproduire.
La notion de race se base elle sur la notion de « gènes communs et exclusifs à un groupe d’individus ».
Francois Lebas (Directeur de recherche honoraire de l'INRA) propose la définition suivante : ..."au sein
d'une espèce, une race est généralement considérée comme une collection d'individus ayant en commun
un certain nombre de caractères morphologiques et physiologiques qu'ils perpétuent lorsqu'ils se
reproduisent entre eux..."
Des races humaines ?
Aucune population humaine ne possède exclusivement des gènes propres. Les Homo sapiens forment
une seule et même espèce. Les différences anatomiques que l’on perçoit, par exemple entre un individu
asiatique et un européen, ne sont que l’expression plus ou moins forte de gènes communs.
Cette mixité génétique dans l’espèce humaine est tellement importante que si vous avez besoin d’un don
d’organe ( un rein par exemple) vous avez autant de chance de trouver un donneur compatible dans
votre voisinage qu'à Dakar au Sénégal.
Pour André Langaney (ancien directeur du Laboratoire d'Antropologie du Musée de l'Homme) : "En
fait, il n'y a pas de marqueur génétique de la race. On n'a jamais pu en isoler un qui soit présent, par
exemple, chez tous les “Noirs” et absent chez tous les “Blancs”. Dès qu'on commence à définir une
race, en cherchant des critères de classification, on n'en finit plus. Certains sont allés jusqu'à 450 ! S'il
fallait pousser la classification à son terme, il faudrait définir une race par individu, car nous sommes
tous différents".
Les populations humaines forment un seul et même groupe taxinomique, une seule espèce.
L'espèce humaine, depuis quand ?
Les études génétiques démontrent que l'espèce humaine a une origine récente : il y a de très faibles
variations génétiques entre les différentes populations humaines.
Pour illustrer cette petite différenciation, on peut comparer deux chimpanzés (pris au hasard) et deux
humains. Les chimpanzés présentent plus de différences génétiques que les 2 humains entre eux... Leurs
origines sont donc plus anciennes que la nôtre... (voir dossier Homme-singe)
Le nombre de gènes est sans rapport avec la taille ou l'importance que nous accordons à une espèce : 14
000 pour la mouche Drosophile et... 30 à 40 000 pour l'Homo sapiens.  
[BIOANTHROPOLOGIE ET PLURALITE HUMAINE]  08 août 2013
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La couleur de la peau : une simple question de gène !
Quelle que soit la couleur de notre peau, nous possédons
tous des mélanocytes, produisant de la mélanine (pigment
naturel) sous contrôle de nos gènes. Suivant sa
concentration, ce pigment fonce plus ou moins notre
épiderme. Parallèlement, la quantité et l'intensité des
rayons solaires influent sur notre corps qui, pour se
protéger, produit plus ou moins de mélanine : c'est le
phénomène de bronzage.
Les mélanocytes
contrôlent la
production de
mélanine.
#DAD3CB
Distribution géographique de la pigmentation.
Toutes les nuances sont représentées...
Les populations exposées de façon continue au
soleil développent un "bronzage permanent" ! Si
vous partez à pied d'une région sub-tropicale vers
le nord, vous rencontrez, au fur et à mesure, des
populations de plus en plus claires, sans rupture...
C'est donc graduellement que cette variation se
déroule... du brun foncé au blanc-rosé. Il vous
est alors impossible de déterminer à partir de quel
moment un individu est blanc, noir ou jaune car
toutes les nuances sont présentes et s'enchaînent !
Du brun "chocolat" au blanc "cachet d'aspirine"
(voir graphique ci-contre), tous les homo sapiens
ont la même origine.
Elle remonte à environs 7 millions d'années et se
situe probablement en Afrique. Tout laisse à
supposer que notre ancêtre commun avait une
peau brune (pour résister au soleil) et de
nombreux poils... Malheureusement la peau ne se
fossilise pas (!) et il y a peu de chance que nous
retrouvions un jour des restes de l'épiderme de nos
ancêtres !
Proportion des couleurs
humaines dans la
population globale.
A lire   L'humanité au pluriel
Bertrand Jordan
La diversité génétique
humaine existe, même
si elle est bien
moindre que dans la
majorité des espèces
animales, mais elle
doit être considérée
comme une richesse. Et le terme
d’égalité ne doit pas être confondu
La malmesure de l'homme
Stephen Jay Gould
Stephen Jay
Gould se penche
sur la question
des races, du
racisme et des
différences entre
les groupes
humains. Il
présente ici toutes les tentatives
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avec celui d’identité ; au contraire,
c’est parce que nous sommes
différents qu’il est nécessaire de
nous proclamer égaux.
En savoir plus sur L'humanité au
pluriel
de mesure et de classification de
l'homme dans un but raciste, en
falsifiant les résultats...
Un livre touours d'actualité
malheureusement... En savoir
plus sur La mal-mesure de
l'homme
L'odyssée
de l'espece
Jacques Malaterre - Yves
Coppens
Le document-fiction qui a
permis à la
paleoanthropolog
ie de rentrer dans
tous les foyers...
Les races humaines ou les types humains
[BIOANTHROPOLOGIE ET PLURALITE HUMAINE]  08 août 2013
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Doit-on parler de « races humaines » ou de
« types humains » ? Les thèmes à propos des Noirs ou des Blancs sont souvent
évoqués, concernant par exemple les États-Unis d’Amérique, et depuis quelques
années concernant l’Europe, avec des changements rapides que l’on constate dans
la répartition des races dans les Amériques, mais aussi désormais en Europe ou en
France. Paradoxalement on constate également que certains réagissent avec
agressivité quand les médias relaient des propos qui désignent les groupes humains
biologiquement typés par le mot « race ». Nous allons exposer ici les principaux
arguments autour desquels se déroule la controverse contre ou pour les « races
humaines ».
La vision objective que nous privilégions dans cet article, basée sur les faits,
suscitera peut-être chez certains lecteurs des réactions réflexes hostiles plutôt que
de les amener à ouvrir les yeux sur les réalités. Certains lecteurs prennent position
selon leurs sensibilités idéologiques au lieu de considérer la question des races
humaines selon les faits objectivement établis. Chacun est bien-entendu libre
d’avoir des convictions quelles qu’elles soient, qu’elles reposent sur des
considérations rationnelles ou émotionnelles. Cela est vrai concernant le sujet
examiné ici – les races humaines – comme cela est vrai pour tout autre sujet. De
sorte que je ne chercherai pas à convaincre qui que se soit qu’il doit accepter les
points de vue qui sont exposés dans le présent article. Je souhaite seulement
partager avec ceux qui sont à la recherche de la vérité.
Les commentateurs sont donc libres de maintenir contre vents et marées leurs
[BIOANTHROPOLOGIE ET PLURALITE HUMAINE]  08 août 2013
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opinions, quelles qu’elles soient, et de montrer par leurs réactions sur ce sujet,
comme sur d’autres sujets, que les divergences d’opinion existent, même lorsque
sur un sujet donné on tient un discours basé sur les faits et que l’on apporte des
preuves irréfutables.
PARTIE 1 : LES CONFUSIONS À PROPOS DES ESPÈCES, DES RACES ET DU
RACISME
Les races humaines et le racisme
Lorsqu’on écoute les conversations on peut constater qu’actuellement en Europe le
mot « race » a principalement deux sens : l’un commun et l’autre scientifique.
Depuis quelques décennies la doctrine scientifique qui domine dans les médias
européens réserve le mot « race » au domaine animal pour désigner par exemple
des variétés obtenues par la sélection des éleveurs (c’est à dire les races d’animaux
domestiques comme les chats persans ou birmans etc.) ou des variétés qui sont
apparues indépendamment de l’action de l’homme et qui résultent de l’évolution
des groupes d’animaux de même espèce géographiquement séparés.
L’une des raisons qui expliquerait que notamment en France le mot « race » est mis
à l’écart pour désigner les types humains semble liée à l’idée que le mot « race »
crée une ambiguïté avec le mot « racisme ». Ce n’est pas parce que l’on constate
l’existence des races humaines qu’on est raciste. Dans le même ordre d’idées ce
n’est pas parce que l’on estime qu’il existe des différences entre les sexes que l’on
est sexiste. De même ce n’est pas parce que l’on remarque des différences entre les
religions que l’on est ennemi des religions.
Le racisme est l’incitation à la haine contre une race, c’est la manifestation de la
volonté de détruire une race. La confusion de la perception des races avec le
racisme vient de l’idée qu’une classification des groupes raciaux serait aussi
semble-t-il considérée par certains comme une incitation à la haine. Il n’en est rien  :
faire ces constats des différences entre les races n’incite pas à la haine contre
certaines races. Constater que par la taille les Scandinaves sont statistiquement
40 % plus grand que les Pygmées est un constat objectif de différence sur un critère
prédéfini, ce n’est pas une affirmation raciste. Si des différences existent entre les
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groupes raciaux, si ces différences peuvent être objectivement constatées, il doit
être permis d’exprimer ces faits. Pour cette raison, afin de pouvoir désigner les
variétés des groupes humains tout en évitant les accusations de racisme, de
nombreux scientifique qui veulent publier les résultats de leurs travaux sans être
agressés par des « antiracistes » ont fini par abandonner le mot « race » et
emploient plutôt le mot « type ».
Ainsi la règle de bienséance « politiquement correcte », qui s’est imposée ces
dernières années en France et en Europe, voudrait que l’on parle plutôt de « types »
que de « races » pour différencier des groupes humains biologiques.
De même, dans un autre domaine, mais dans le même ordre d’idées, cette
bienséance « politiquement correcte » a introduit l’expression « les gens du
voyage ». Par exemple on peut trouver dans les médias des informations du genre :
« le vol des métaux a été commis par un groupe de gens du voyage ». On entendant
ce genre d’information on peut se demander : « les gens du voyage sont sans doute
des gens qui voyagent sans cesse, donc ce sont peut-être les chauffeurs routiers qui
ont commis ce vol, à moins que ce ne soit un groupe d’hôtesses de l’air ? ».
Pourquoi en général, et pas uniquement dans le cas des « gens du voyage », on
propage des expressions « politiquement correctes » ? Le but visé semble être celui
d’introduire délibérément une confusion, de masquer la vérité, afin de rendre
confus et donc difficile le débat sur les questions de société. Dans la terminologie
administrative française ce terme « les gens du voyage » désigne en réalité ce que
l’on nomme habituellement les Tsiganes (terme utilisé partout en Europe), les
Gitans ou les Manouches (ces deux derniers termes étant utilisés dans les pays
francophones), ou les Roms (terme plus récent), qui sont biologiquement un sous-groupe racial qui malgré les métissages garde les spécificités de ses origines
indiennes. Les Tsiganes, que l’on rencontre partout en Europe, ont conservé une
langue d’origine indienne et par l’ensemble de leurs spécificités culturelles ils
correspondent également à la définition d’une ethnie [1]. En France, avec la
confusion introduite par l’expression « les gens du voyage », on constate
qu’actuellement dans leurs commentaires des faits divers les médias utilisent
souvent les interprétations suivantes : l’expression « les gens du voyage » désigne
les Tsiganes français, l’expression « les Roms » désigne les Tsiganes roumains.
Retenons que les Tsiganes sont à la fois un sous-groupe racial spécifique, du point
de vue biologique, et un groupe ethnique, du point de vue culturel. Nous
reviendrons plus loin sur la distinction de notions entre « races » et « ethnies ».
Tous les humains sont-ils des Noirs ?
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Certains, voulant nier l’existence d’une branche d’humanité spécifiquement
européenne, disent que puisque « les recherches admettent que l’Afrique est le
berceau de l’humanité cela signifie que chacun d’entre nous est originellement un
Africain ». Ce genre de phrase n’a aucun sens car le fait d’avoir les mêmes origines
très lointaines n’efface pas les différences qui existent entre deux groupes. Les
Blancs européens ont en effet avec les autres races des ancêtres communs mais
c’est une règle générale qui englobe tout ce qui est vivant sur cette planète : si on
remonte suffisamment loin dans le temps des ancêtres communs existent avec toute
vie qui est originaire de notre planète – singe, chameau, chat, mouche, verre de
terre, poisson, pommier, herbe, bactérie – puisque « les recherches admettent » qu’à
l’origine de toute vie sur cette planète se trouve un organisme unicellulaire qui est
apparu dans les mers.
Il existe plusieurs théories sur l’évolution de l’humanité et sur la formation de s
diverses branches de l’humanité. D’après la théorie le plus souvent mise en avant,
on estime actuellement que l’apparition de l’Homo Sapiens date le plus
probablement d’il y a environ 200 000 ans et que les branches de l’espèce l’Homo
Sapiens ont commencé a se différencier lorsque il y a environ 60 000 ans les
groupes humains ont commencé à migrer à travers les continents et ont évolué, par
l’effet des mutations génétiques successives, isolés les uns des autres dans plusieurs
régions de la planète. En 60 000 ans, l’évolution a eu le temps de façonner des
différences génétiques entre les branches de l’humanité auxquelles on a depuis
longtemps donné le nom de « races ».
Aujourd’hui les Noirs africains sont aussi distants des Africains d’il y a 60 000 ans
que le sont les Blancs européens. Par une succession de mutations génétiques les
Noirs africains ont pendant cette période de 60 000 ans suivi une certaine évolution
génétique alors que les Blancs européens ont suivi le chemin d’une autre évolution
génétique.
La pression exercée pour effacer la conscience de l’existence des races
La question de la race soulève parfois en France des réactions réflexes très hostiles,
de sorte que parfois les tribunaux sont appelés à la rescousse dans le but de punir
ceux qui parlent trop fort en public de l’existence des races. Lorsque quelqu’un en
France parle des Blancs ou des Noirs, lorsqu’il montre qu’il est conscient des
différences raciales, on l’accuse souvent de racisme.
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L’enseignement public dans les écoles françaises produit des citoyens qui sont
persuadés que les races humaines n’existent pas. Dans d’autres pays du monde
l’existence des races est un fait que chacun peut ouvertement constater et que l’on
prend en compte à tous les niveaux. Par exemple, aux États-Unis d’Amérique,
lorsque le FBI diffuse les fiches de signalement concernant les criminels
recherchés, la race de chaque individu est précisée car c’est un élément de
différenciation, un élément d’identification [2]. Par contre dans les débats internes
en France, préciser la race d’un individu semble gênant. En France on utilise des
contorsions, pour éviter de parler des races humaines on invente des termes comme
« minorités visibles » sans préciser quelle en est la signification, de sorte que l’on
introduit avec ce néologisme maladroit la confusion, car il y a des quantités de
minorités qui sont visibles : les handicapés moteurs, les chauves, les nains, les
riches tape-à-l’œil, les gros, les barbus etc.
D’ailleurs on peut également poser la question de savoir si en France les Blancs
sont une « minorité visible » : la question est légitime puisque les statistiques
raciales n’existent pas en France, donc on ne peut pas savoir avec certitude a quel
moment les Blancs sont devenus ou deviendront une « minorité visible ».
L’espèce et la race
L’homme s’est d’abord surtout intéressé à catégoriser les animaux d’élevage et les
animaux domestiques d’après les critères basés sur l’observation. C’était le premier
emploi du mot race.
C’est ensuite la zoologie, qui à partir du XVIII
ème
siècle a entrepris de classifier les
êtres, qui a donné la définition générale, applicable aux animaux, mais qui serait
applicable à tous les êtres sexués, de ce qu’est l’espèce et de ce qu’est la race :
– L’espèce définit les êtres vivants naturellement interféconds. L’espèce s’applique
donc aux êtres à reproduction sexuée.
– La notion de race s’applique à des individus d’une même espèce mais
appartenant à un groupe ayant des caractères biologiques héréditaires bien distinct
des autres groupes.
Ces notions s’appliquent aux variétés observées dans la faune en général et pas
uniquement concernant les animaux d’élevage.  
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À noter que du point de vue de la biologie, un être humain, un membre de l’espèce
humaine, est un animal, autrement dit il n’est pas une plante mais fait partie de la
faune. De ce fait le terme de race, utilisé pour les animaux en général, est adéquat
pour définir biologiquement des populations de l’espèce humaine.
La différenciation de l’espèce en races est le résultat des mutations génétiques. Les
mutations génétiques sont fréquentes. Certaines se propagent et se maintiennent,
d’autres disparaissent. Lorsqu’un groupe est isolé les mutations se propagent à
l’intérieur de ce groupe. C’est par des mutations successives que les groupes isolés
les uns des autres s’éloignent de plus en plus les uns des autres du point de vue des
caractéristiques biologiques.
L’évolution peut être imagée sous la forme d’une plante dont les branches poussent
de telle façon que chaque nouvelle branche est légèrement différente de la
précédente, à partir de laquelle elle a bourgeonné. Plus les branches sont éloignées
par la succession des ramifications, et plus elles sont différentes, à tel point que
certaines ne se ressemblent plus du tout comme si elles poussaient sur des plantes
différentes. Les branches qui sont proches peuvent être fécondes entre-elles, si elles
se touchent elles peuvent même parfois fusionner entièrement en perdant ce qui les
distingue, mais à partir d’une certaine distance la fécondation entre les branches
n’est plus possible, elles ne peuvent plus fusionner. Sur cette plante, certaines
branches, et même des ramifications entières, se fanent parfois, et disparaissent,
pour des raisons diverses, alors que d’autres apparaissent et foisonnent, sans cesse.
Les races animales
Nous avons vu qu’initialement le mot race a été en usage parmi les éleveurs
concernant les animaux domestiqués.
La définition du mot race, données par la zoologie, s’applique par extension à toute
la faune. Les races existent également parmi les animaux sauvages.
Ceci dit, par habitude, sans tenir compte de la définition « espèce/race », les
ouvrages de zoologie continuent de nommer les espèces animales sauvages là ou on
devrait en toute rigueur parler de races animales sauvages. C’est une habitude de
langage. Par exemple pour les ours on parle d’espèce « ours grizzly », d’espèce
« ours polaire » etc. alors qu’en fait tous ces ours sont interféconds. Si cette
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mauvaise habitude de langage était appliquée de façon analogue aux humains on
dirait que les Noirs sont une espèce humaine et que les Blancs sont une autre
espèce humaine – mais c’est bien entendu faux.
PARTIE 2 : LES ÉTUDES COMPARATIVES DES RACES HUMAINES ET
L’APPROCHE ADMINISTRATIVE DES RACES HUMAINES
Études comparatives sur les groupes humains biologiquement typés
Les différentes races humaines correspondent à des caractéristiques biologiques
spécifiques. L’étude statistique des critères objectifs met en évidence des
différences entre les groupes raciaux. Cela peut concerner l’aptitude à courir vite, le
QI etc. On peut toujours objecter en disant « votre étude dit que sur la
caractéristique X le groupe racial A obtient de meilleurs résultats que le groupe
racial B, mais voici l’individu Joe, qui appartient au groupe racial B et qui obtient
d’excellents résultats sur la caractéristique X – votre étude ne vaut donc rien ».
Bien entendu il y a toujours un certain nombre d’individus qui ont certaines
caractéristiques qui sont éloignés de la typologie moyenne du groupe racial auquel
ils appartiennent. L’étude statistique des critères objectifs tient compte de ces
écarts : ce sont les courbes gaussiennes représentatives d’un groupe que l’on
compare aux courbes établies pour un autre groupe.
Ce sont les aptitudes moyennes d’un groupe, comparées aux aptitudes moyennes
d’un autre groupe, qui sont les facteurs – non exclusifs – qui dans certaines études
sont pris en compte pour tenter d’expliquer les différentes voies d’évolution prises
par les deux groupes.
Sur le sujet des races humaines il existe actuellement en France un dogme qui
impose quelles sont les idées interdites et quelle est « la seule vérité » qu’il faut
propager. Au sujet des aptitudes comparatives entre les races il y a aussi un dogme
qui consiste à affirmer faussement « que toutes les races sont du même niveau, dans
tous les domaines ». Lorsque ces dogmes sont contredits par les faits a-t-on le droit
d’exprimer ces faits ? L’existence des races n’est pas établie seulement par
l’observation subjective simple mais repose sur des critères objectifs
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scientifiquement définissables. Les études comparatives établissent les différences
d’aptitudes entre les races. A-t-on le droit de constater dans un rapport scientifique
rendu public que les différences d’aptitudes entre les races humaines sont un fait
établi ? On en a le droit exactement comme on a le droit de constater que la planète
Terre gravite autour de l’étoile Soleil.
À partir de la détermination scientifique des groupes raciaux les recherches
scientifiques étendent désormais leurs champs d’investigation. Des études
déterminent la répartition de certaines aptitudes selon la race [17].
De façon analogue à ces recherches, certains États se donnent les moyens
d’investigation sociale qui tiennent compte des particularités raciales. Ce fait est
illustré au chapitre suivant par un graphe, établi par l’institut américain de
recensement, qui établit la répartition du revenu moyen selon l’appartenance à l’un
des quatre principaux groupes raciaux américains (« principaux » doit être compris
dans le sens « les plus nombreux »).
U.S. Census Bureau fournit une grande variété de données statistiques sur la
population américaine qui tiennent compte du critère racial. Le recensement de
2005 a par exemple établi quelle est la répartition selon la race du revenu annuel
moyen :
On peut parmi d’autres pays multiraciaux citer le cas du Brésil qui produit
également des statistiques raciales – nous y reviendrons.
L’existence des races est donc un fait, perçu par les simples sens humains depuis
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longtemps, établi depuis peu scientifiquement, et intégré dans la gestion
administrative de nombreux États de par le Monde.
Analogie entre homogénéité raciale et homogénéité linguistique
Avant de voir quel est l’avenir des races humaines actuelles, nous allons utiliser
une analogie pour illustrer le fait qu’une race existe de façon certaine et indéniable
même lorsqu’elle est soumise à un faible taux de mélange, de métissage.
C’est l’analogie avec les langues littéraires – allemand, italien, anglais, français etc.
– qui par l’illustration de l’identité linguistique apporte un éclairage supplémentaire
sur la question de l’identité raciale.
Comme les races, les langues aussi ont des racines communes, les langues aussi
sont comme des branches qui sont entre-elles proches ou distantes, ont des airs de
famille ou des différences très marquées. Si on n’examine l’évolution des langues
littéraires que par exemple sur les trois cents dernières ann ées, on constate qu’elles
n’évoluent pas de façon hermétiquement isolée mais qu’elles changent par des
apports externes de vocabulaire, de syntaxe et même d’orthographe et de
grammaire.
Parce qu’une langue est constituée d’une certaine proportion d’éléments
« métissés » – et c’est peut-être le cas de toutes les langues – peut-on prétendre que
cette langue n’existe pas, qu’elle n’a pas son identité propre ? Par exemple la
langue française, issue des racines linguistiques communes avec d’autres langues,
et qui dans sa structure contient des apports récents d’allemand, d’italien, d’anglais
etc., peut-elle être reconnue comme une langue individualisées, spécifique,
particulière, identifiée ? La réponse est bien évidemment : oui l’identité de la
langue française existe. En France les gouvernements successifs le confirment par
leurs actions en faveur de la défense de la langue française.


15/08/2013
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epistemologie et methodologie en bio anthropologie

 

Introduction

L’anthropologie désigne aujourd’hui l’ensemble des disciplines qui se consacrent à l’étude des populations humaines à la fois sous l’angle de la morphologie (anthropologie biologique et paléoanthropologie) et sous celui des formes de sociétés contemporaines (ethnologie, anthropologie sociale et culturelle) ou anciennes (archéologie et préhistoire). Cette acceptation est assez moderne puisqu’il y a encore peu de temps, l’anthropologie désignait l’ensemble des savoirs sur l’homme mais dans une vision souvent « naturaliste ». Durant la première moitié du XXe siècle, l’anthropologie physique est devenue l’étude des caractères

physiques et biologiques de l’homme. Dans les pays anglo-saxons, le sens du mot anthropology est beaucoup plus vaste puisqu’il englobe aussi, la primatologie, la préhistoire et l’ethnologie.

L'anthropologie biologique possède un champ d'investigation assez vaste, se situant à l'interface du biologique et du social. Elle étudie à la fois l’évolution de l’homme et sa diversité biologique actuelle tout en prenant compte à chaque fois, non seulement la dimension biologique, mais aussi l’influence du rapport Nature/Culture.

Elle se situe à l’interface de la biologie et des sciences humaines et intègre les apports d’autres disciplines : biologie, anatomie, génétique et biologie moléculaire, biodémographie, médecine, statistiques, histoire, linguistique, ethnologie… Au XIXe siècle, elle demeure dans le cadre élaboré par les naturalistes du XVIIIe siècle (Linné et Buffon) et Broca en 1860 qui définit l'anthropologie «physique» comme l'«histoire naturelle de l'homme». Cette discipline est aujourd’hui subdivisée en « sous-spécialités » : génétique des populations, biologie humaine (variabilité humaine actuelle et processus d’adaptation à l’environnement et aux conditions pathogènes), paléoanthropologie (étude des populations du passé à partir de matériel fossile principalement os et dents) et anthropologie funéraire, primatologie (étude des primates non humains), écologie humaine, biodémographie, anthropologie médico-légale… Elle se distingue de l’anthropologie sociale et culturelle qui se rapproche de l’ethnologie et de la sociologie. L’anthropologie biologique (ou encore l’anthropobiologie) connaît actuellement une deuxième jeunesse parallèlement aux progrès techniques dans les domaines de la génétique, de l’imagerie, de l’informatique et des biostatistiques.

Il paraît impossible d’en établir de manière exhaustive un historique tant ses racines sont multiples et profondes au sein des sciences biologiques et humaines.

 

En définitive, la relation entre tous les individus de la population permet de définir l’expression biologique de l’anthropologie.

L’importance des questions méthodologiques et épistémologiques pour l’anthropologie biologique découle de plusieurs raisons:

- la nature animale de l'homme et son étroite parenté avec les autres animaux (référence à la primatologie, l’éthologie) ;

- l’impossibilité d'interpréter l'évolution humaine exclusivement en terme de survie du plus apte (lamarckisme et darwinisme) ; ceci renvoie à une conception pragmatique et empirique du savoir anthropologique (transposition du biologique au social) ;

- la plasticité morphologique de l'homme (étude de l’adaptabilité au moyen de la biométrie humaine) ;

- la similitude fondamentale entre toutes les populations humaines (les plus grandes variations sont liées au dimorphisme sexuel et à l'âge) ;

- la micro-évolution au sein d’homo sapiens ne peut pas se penser uniquement en terme « naturaliste » mais doit intégrer la culture : l’anthropologie biologique doit donc être « bio-culturelle » ;

- les conséquences pratiques sur l’homme et son environnement, donc soumise à la pression des intérêts;

- l’appartenance aux sciences sociales, donc soumise à la pression des idéologies.

En définitive, l’Anthropologie biologique est une discipline qui regroupe plusieurs dimensions sur lesquelles reposent sa scientificité et sa méthodologie dans l’univers de la recherche.  

 

I-Objectifs

Ce cours consacré à la formation épistémologique et méthodologique en bioanthropologie des étudiants inscrits en Licence 1 en Anthropologie vise l’acquisition de la culture scientifique et la démarche en bioanthropologie.

Les enseignements proposés, alternent en CM et TD.

 

II- Naissance et épistémologie d’une discipline majeure de l’Anthropologie

 

II-1. Naissance et développement de l’Anthropologie biologique

 

L’anthropologie biologique naît véritablement au XIXe siècle. En Europe et en particulier en France, la discipline se développe à partir de la médecine et de la biologie, en Amérique du nord, elle embrasse un cadre plus large incluant l’anthropologie sociale et culturelle qui chez nous correspond à l’ethnologie. L’anthropobiologie est d’abord uniquement morphologique, « anatomique » ou « physique » se basant en particulier sur l’ostéologie. C’est le crâne, structure osseuse jugée la plus noble chez l’homme, qui va susciter le plus d’études et devenir une sous-spécialité dénommée craniologie. Johann Friedrich Blumenbach (1752-1840) est considéré comme le fondateur de l’anthropologie physique. Nommé professeur de médecine à 24 ans, il a été à l’origine de la craniologie, de l’anatomie comparative, et de la séparation homme/grands singes. Il individualise cinq « races » au sein de l’humanité : mongoloïde, américaine, caucasienne, éthiopienne, et malaise. Le terme « caucasien » (qui n’implique pas une origine dans les monts du Caucase mais qui était synonyme de « peuple magnifique » dans cette classification racialiste) persiste encore dans la littérature médicale actuelle surtout de langue anglaise. En France, Broca et de Quatrefages effectueront de nombreux travaux de craniologie. Les débuts de l’anthropologie sont teintés de théories racialistes qui culmineront malheureusement lors de la Seconde Guerre mondiale avec le national-socialisme hitlérien.

La préhistoire, discipline également très « française » comporte de nombreuses passerelles avec la paléoanthropologie. La réalité du concept d’homme préhistorique va apparaître grâce à l’étude de couches géologiques, la découverte d’outils de silex façonnés par l’homme et de restes fossiles animaux par Casimir Picard (médecin) dans la Somme. À partir de tout ceci, Jacques Boucher de

Perthes, un des « pères » de la préhistoire, propose la dénomination « d’homme antédiluvien » (1837). Deux disciplines vont ainsi voir le jour : la préhistoire et la paléontologie humaine qui s’intégreront à l’anthropologie. C’est la période « de la ruée vers l’os » durant laquelle ces problématiques vont attirer tous types de chercheurs comme par exemple Édouard Lartet (1801-1871), avocat gersois, qui fouille la grotte d’Aurignac en Ariège, démontre la coexistence ancienne de l’homme avec des espèces disparues, propose une chronologie de la période préhistorique en y individualisant le néolithique et corrèle la taille du cerveau avec la dynamique évolutive.

Il sera nommé sur le tard à la chaire de paléontologie du Muséum d’histoire naturelle de Paris. La Société d’Anthropologie de Paris fondée en 1859 par le chirurgien Paul Broca devient la première société savante à focaliser les recherches sur ce thème au travers de sa revue Les Bulletins et Mémoires de la Société d’Anthropologie de Paris. Dans les années qui suivent, les découvertes de sites préhistoriques vont se succéder dans la région franco-cantabrique (grottes de Dordogne, de Haute Garonne, d’Altamira…) livrant les témoignages artistiques de ces temps lointains.

En 1856, près de Düsseldorf en Allemagne, dans la vallée du Neander, est découvert une calotte crânienne aux caractères morphologiques particuliers. Ce vestige osseux, d’abord faussement attribué à un cosaque tué pendant la guerre ou à un individu atteint de rachitisme (hypothèse émise par le réputé anatomiste allemand Rudolf Virchow), est en fait celui d’un homme de Neandertal. Il est d’abord considéré comme le « chaînon manquant », puis ensuite comme le représentant d’une autre « humanité » concurrente des sapiens (les premiers crânes néandertaliens furent en fait exhumés dans la région de Liège en 1830 et à Gibraltar en 1848 mais leurs caractéristiques particulières n’interpellèrent personne et leur « identité » ne fut révélée que bien plus tard). Cette découverte marque pour beaucoup de spécialistes les débuts de la paléoanthropologie. Marcellin Boule (1861-1942), fondateur de l’Institut de paléontologie humaine, est l’auteur de la première étude complète sur l’homme de Neandertal dans son ouvrage L’homme fossile de la Chapelle-aux-Saints paru en 1911. C’est selon lui un être bestial qui ne saurait être l’un de nos ancêtres. Il y aura alors une individualisation de l’archéologie préhistorique, discipline basée sur l’examen des vestiges, à la suite de fouilles des produits de l’activité humaine (« les archives de la terre » selon Leroi-Gourhan). L’Abbé Breuil (1877-1961) sera considéré comme le « pape » de l’art paléolithique. Avec la mise en place de repères chronologiques, on se lance dans l’étude des coupes stratigraphiques, la climatologie, la description de types humains anciens et d’industries (ethnologie préhistorique). En 1859, Darwin publie sa théorie sur l’origine des espèces et la sélection naturelle. L’interprétation exclusivement religieuse des origines de l’Homme (créationnisme) va céder sa place à une véritable vision scientifique. En 1866, Grégor Mendel, un moine de Silésie, décrit les règles de transmission des caractères génétiques en croisant des plants de petits pois dans son monastère de Brno. Ce travail n’aura aucun écho au sein de la communauté scientifique de l’époque et ces mécanismes fondamentaux seront « redécouverts » plusieurs décennies plus tard par d’autres chercheurs. Au début du XXe siècle, c’est l’avènement de la séro-anthropologie avec la découverte du premier système de groupes sanguins, le système ABO (Landsteiner, 1900). L’une des premières publications sur ce thème proposa une classification « raciale » basée sur la distribution des groupes érythrocytaires ABO chez 500 soldats de diverses origines du front de Salonique lors de la première guerre mondiale en défi nissant un « index biochimique » A/B (Hirszfeld & Hirszfeld, Anthropologie 1919). À l’aube des années 1930, Fisher, Haldane et Wright jettent les bases de la génétique des populations. Pierre Teilhard de Chardin (1881-1955) paléontologue français et jésuite du début du XXe siècle a associé l’évolution humaine à son rapprochement vers Dieu. Arthur Ernest Mourant (1904-1994), hématologiste mais aussi géologue, chimiste, et généticien (!), démontre l’intérêt anthropologique de la distribution des groupes sanguins au sein de nombreuses populations. En France, le concept d’hématologie géographique et d’hémotypologie a été développé par deux médecins hématologistes, Jacques Ruffi é (1921-2004, titulaire de la chaire d’anthropologie physique au Collège de France) en association avec Jean Bernard (1907-2006). L’invention de l’électrophorèse des protéines permet d’étendre les possibilités d’étude de la variabilité humaine. Elle sera par exemple appliquée à la séparation des différents types d’hémoglobine (Hb). L’Hb S sera la première « pathologie moléculaire » mise en évidence en 1949 par Pauling. La découverte du système HLA dans les années 1970 par Jean Dausset ouvre encore plus largement le champ de la biologie des populations. Dans les deux dernières décennies du XXe siècle la génétique fait son entrée dans l’univers de l’anthropobiologie.

Un personnage important de la génétique des populations est Luca L. Cavalli Sforza, auteur de l’ouvrage de référence The history and geography of human genes, paru en 1994. Cet excellent chercheur et vulgarisateur a étudié dès les années 1960 la distribution d’un grand nombre de caractères selon les populations. Au niveau de l’Europe, il a individualisé des populations « à part » comme les Sardes, les Basques ou les Lapons. Il a élégamment présenté ses résultats sur des cartes géographiques synthétiques où il met en relief les corrélations de la génétique avec des faits historiques ou culturels. C’est un farouche défenseur de l’approche multidisciplinaire dans laquelle l’anthropologie côtoie la linguistique, l’histoire, l’archéologie… On dispose maintenant de techniques performantes comme la PCR ou le séquençage permettant d’étudier les polymorphismes de l’ADN. Alors que les découvertes de fossiles d’hominidés se succèdent à travers le monde, les progrès dans la connaissance de l’histoire de cette famille sont en ce début de XXIe siècle le fruit de la confrontation des données entre deux types d’anthropobiologistes ceux de « l’os » et ceux de « l’ADN ».

 

II-1 Les théories majeures  de l’anthropologie biologique

 

III-1-1. Darwin et les concepts d’évolution et de sélection naturelle

 

La théorie de Darwin a été confirmée et « ressuscitée » par les données modernes de la biologie moléculaire et de la génétique. Elle constitue la base du raisonnement en anthropobiologie. Avant Darwin, la vision du monde était surtout dictée par les préceptes religieux. Les formes de vie sur terre étaient considérées comme les produits de la création divine. Certains calculs effectués d’après l’Ancien Testament stipulaient que la terre avait 6 000 ans et que les hommes avaient été créés en 4004 avant J.-C. Les fossiles étaient sensés représenter les survivants du déluge biblique voire l’oeuvre du diable. Néanmoins, des conceptions scientifiques du monde vivant avaient déjà été proposées. Carl von Linné avait énoncé en 1735 une classification des êtres vivants (taxinomie) au sein de laquelle sera inclus l’Homme en tant qu’Homo sapiens.

L’embryologiste allemand Haller expose en 1744 sa théorie de l’humunculus qui considère que l’être humain est déjà formé à toute petite échelle dans les spermatozoïdes et qu’il verra simplement sa taille augmenter au cours de la gestation au sein du « réceptacle » utérin. Georges Cuvier (1769-1832) soutient la théorie du fixisme qui prétend que les espèces vivantes sont immuables et incapables de se transformer. Les notions même d’évolution et de sélection avaient cependant déjà été évoquées avant Darwin. Un économiste britannique (et pasteur) Thomas Robert Malthus dans son ouvrage Essay on the principle of population (1798), prétend que la progression démographique excède celle des ressources, ainsi, tous les descendants d’une génération ne peuvent survivre. Malthus prônait un contrôle des naissances. Jean Baptiste Lamarck (1744-1829) est véritablement le premier théoricien de l’évolution. Il propose l’idée de transformisme : les individus s’adaptent en développant ou atténuant certaines fonctions selon l’usage ou le non-usage de l’organe correspondant (exemple classique de la girafe dont le cou s’est allongé car ces individus qui devaient consommer leur nourriture végétale de plus en plus haut du fait de l’assèchement du climat ont transmis ce caractère à leur descendance).

Pour Lamarck, il existe une hiérarchie dans le monde vivant, il croit au phénomène de génération spontanée et à une hérédité des caractères acquis. Selon William Patey (1802), « il ne peut y avoir de créature sans créateur » (La théologie naturelle).

Charles Lyell, géologue, dans son ouvrage Les principes de géologie (1830), considère que la terre a évolué progressivement et a accueilli au fur et à mesure de nouvelles espèces.

Charles Darwin, en observant des fossiles (témoins chronologiques de séquences évolutives) et en effectuant des travaux d’anatomie comparée (discipline initiée par Cuvier), il acquiert la certitude de l’évolution des formes de vie dans le temps. Il s’immerge dans la forêt tropicale au Brésil, côtoie les peuples de la Terre de Feu, découvre le corail et les atolls d’Océanie… Aux îles Galápagos, il constate de visu l’importante variabilité entre diverses espèces animales et végétales qui partagent pourtant un fort degré de parenté. Ces différences reflètent pour lui une nécessité, celle d’une meilleure survie de ces espèces dans un milieu donné, c’est le concept de sélection naturelle.

 

II-1-2. De la sélection sexuelle

 

L’ouvrage The descent of Man and selection in relation to sex (1871) constitue une extension à l’Homme de la théorie de la descendance avec modifications. Comme toute autre espèce, l’Homme « descend » d’autres formes préexistantes comme le suggère l’anatomie comparée. Darwin y souligne la notion de variabilité sur le plan de l’anthropométrie, de l’éthologie ou de la sociologie (peuples « civilisés » versus « exotiques »). Il amène ainsi la biologie vers l’anthropologie sociale. Dans le monde

civilisé, c’est l’éducation qui gouverne le devenir des groupes humains et non plus la sélection naturelle. La sélection sexuelle représente un phénomène plus subtil que la sélection naturelle. C’est « l’avantage que certains individus ont sur d’autres de même sexe et de même espèce sous le rapport exclusif de la reproduction ».

Elle est illustrée dans la nature par la rivalité des mâles qui vont développer certaines caractéristiques favorables pour la possession des femelles (exemples : crinière plus épaisse du lion, plumage plus éclatant du paon ou chant plus mélodieux chez l’oiseau). Les caractères sexuels secondaires sont plus accentués chez les mâles des espèces polygames. Darwin pense que la sélection sexuelle pourrait expliquer la diversité des types humains selon la géographie que l’on a appelé « races ». Il prend des exemples qui illustrent que les canons de la beauté varient selon les zones du globe : pour les Chinois, c’est une face et un nez larges et aplatis, des pommettes hautes et une obliquité des yeux (les premiers occidentaux y étaient décrits comme « ayant un bec d’oiseau avec le corps d’êtres humains ») ; pour les Hottentots, la partenaire la plus recherchée est celle qui possède les fesses les plus proéminentes (concentration de graisse ou stéatopygie). L’avantage reproductif conféré par ces caractéristiques spécifiques à chaque population est ainsi susceptible d’avoir accentué les différences entre les phénotypes humains au fil du temps.

 

II-2-Epistémologie de l’Anthropologie Biologique

 

II-2-1 Contexte historique de l’épistémologie

 

L’épistémologie, d’un point de vue étymologique est formée d’un préfixe « épistémè » qui signifie science et d’un préfixe « logos » qui veut dire discours.

L'épistémologie (aussi appelée théorie de la connaissance) est l'étude de la nature de la preuve. Des questions d'épistémologie surviennent en permanence : comment, dans une discipline donnée, la connaissance s’opère-t-elle ? Quel est, pour un champ déterminé, la manière dont s’établit le savoir ? Ou bien, quels sont les procédés utilisés par une science ou une discipline pour constituer son ou ses objets ?

 

Piaget (1967), propose quelques distinctions essentielles. Il distingue d’abord la logique de l’épistémologie.

logique = étude des conditions formelles de vérité.

épistémologie = étude des conditions d'accession et des conditions constitutives des connaissances valables, c'est-à-dire, pour Piaget, scientifiques.

L’épistémologie est le discours de la science. Etant donné que la science est un discours sur la réalité, elle désigne à la fois des activités productrices de connaissances et les résultats des activités : théories, méthodes de travail et règle de comportement.

L’épistémologie est donc la théorie de la science. Elle truste la méthode spécifique des sciences, entre processus les plus généraux de la connaissance, leur logique et leurs fondements. Elle évalue la portée du savoir qu’elle construit et en dégage le sens pour l’ensemble des pratiques humaines. L’épistémologie est donc la théorie de la science en général, c’est-à-dire la théorie qui essaie de définir les méthodes, les fondements, les objets et les finalités de la science.

 

Depuis l’antiquité grecque, les champs d’études de l’épistémologie étaient occupés par la logique, la philosophie des sciences, l’histoire des sciences, la théorie de la connaissance et la sociologie des sciences dont le but est de distinguer le bon grain de l’ivraie afin de déterminer des critères de scientificité. Mais aujourd’hui, ces champs ne sont-ils plus d’actualité ? Répondre par l’affirmative reviendrait à dire que l’épistémologie est caduque et que son objet n’a plus de sens. Dans cette perspective, elle devrait donc repréciser ses champs d’action.

En fait, l’épistémologie s’est détachée de la philosophie des sciences pour se constituer au XXè siècle en une discipline autonome en partie. La philosophie es sciences s’intéresse à la connaissance en général quand l’épistémologie s’investit à la connaissance scientifique.

L’histoire permet à l’épistémologie d’aborder les sciences de deux manières, à savoir l’étude diachronique de leur développement parce qu’une science évoque indéniablement dans ses concepts, ses théories, ses méthodes.

La science progresse par phase : phase normale-phase révolutionnaire-phase normale. Ainsi, la connaissance scientifique ne progresse par accumulation progressive, mais par révolution en rupture. Autrement dit, l’épistémologie contemporaine se préoccupe de l’aspect continu ou discontinue du savoir empirique. Ainsi, c’est à travers la connaissance ordinaire que l’épistémologie donne sens aux connaissances scientifiques.

 

De tout ce qui préccède, à quel degré de certitude la bioanthropologie est-elle capable d’accéder à partir des moyens dont elle dispose ? Quelle sorte de vérité propose-t-elle ?

 

En formulant notre question : l’anthropologie biologique  est-elle scientifique ? C'est la notion normative du terme « scientifique » qui fait véritablement autorité. Ce qui nous importe, c'est d'établir si l’Anthropologie biologique est vraiment scientifique.

L'épistémologie n’étant pas formelle est toujours associée, implicitement ou explicitement, à une ontologie, c’est-à-dire à des considérations sur la nature des choses. Par conséquent, l’épistémologie d'un objet (ou domaine) de connaissances donné ressort à la fois d'une épistémologie générale et d'une épistémologie particulière: en fonction des disciplines scientifiques (épistémologie de la physique, épistémologie de la biologie, épistémologie de la sociologie, etc.); en fonction des objets de connaissance eux-mêmes (qui peuvent être au croisement de plusieurs disciplines scientifiques).

Cette distinction caricature à la fois les sciences de la matière et les sciences humaines. Toutes les sciences sont nomothétiques, car elles s’efforcent de dégager des lois objectives et contraignantes. Toutes les sciences sont aussi herméneutiques, car pour constituer un fait ou le vérifier, il faut en définitive trouver ou retrouver dans une intuition une abstraction exprimée dans un énoncé.

Par ailleurs, une autre caractéristique du champ de l'anthropologie est son approche  bioculturelle. C'est-à-dire, l'anthropologie cherche à décrire et expliquer les interactions entre notre nature comme espèce biologique et, le comportement culturel qui constitue pour notre  espèce le plus saisissant et important trait. 

Mais toutes ces différentes dimensions rendent l'étude de l'espèce humaine complexe et excitante, et ainsi l'anthropologie, la discipline qui prend ce défi, est typiquement divisée en un certain nombre de sous-champs (le schéma 1).  L'anthropologie culturelle  est l'étude de la culture comme caractéristique de notre espèce et de la variation de l'expression culturelle parmi les groupes humains.

 

 

ANTHROPOLOGIE

ANTHROPOLOGIE BIOLOGIQUE

ANTHROPOLOGIE CULTURELLE

ANTHROPOLOGIE LINGUISTIQUE

ARCHEOLOGIE

Culture comme trait de caractère de l’espèce ;  Variation de l’expression culturelle humaine

Archéologie préhistorique ; Archéologie historique ; gestion des ressources culturelles

Lingustique descriptive ; Evolution du langage.

Biodiversité ; primatologie ; Ecologie humaine ; génétique.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Fig. 1. Sous-champs majeurs de l’Anthropologie

 

Chaque sous-champ présente d’autres spécialités. Pour l'anthropologie biologique, ces spécialités s’expriment mieux termes d’interrogations que nous cherchons à répondre au sujet de la biologie humaine :

Quelles sont les caractéristiques biologiques qui définissent l'espèce humaine ? Comment nos gènes codent-ils ces caractéristiques ? Juste combien les gènes contribuent-ils à nos traits ? Comment l'évolution fonctionne-t-elle, et comment s'applique-t-elle à nous ?

Quel est la preuve physique de notre évolution ? C'est la spécialité désignée sous le nom  de paléoanthropologie,  de l'étude des fossiles humains basés sur notre connaissance de biologie squelettique, ou  de l'ostéologie  qui s’en occupent.

Quelle sorte de diversité biologique voyons-nous dans notre espèce aujourd'hui ? Comment a-t-elle évolué ? Que les traits variables signifient-ils pour d'autres aspects de nos vies ? 

Que pouvons-nous nous renseigner sur la biologie de nos parents étroits, les primates non humains, et que cela peut-il nous indiquer au sujet de nous-mêmes ? Cette spécialité s'appelle  la primatologie.

Que connaissons-nous de  l'écologie humaine,  les rapports entre les humains et leurs environnements ?

Comment pouvons-nous nous appliquer toute cette connaissance ? 

 

 

II-2-2.Scientificité de l’anthropologie biologique

 

L'anthropologie biologique  (ou  la bioanthropologie   ou  l'anthropologie physique) doit être définie dans le contexte de l'anthropologie de l'ensemble, et ceci est à la fois simple et complexe.  L'anthropologie, en général, est définie comme l’étude de l'espèce humaine. Autrement dit, les anthropologues étudient l'espèce humaine comme n'importe quel zoologiste étudierait une espèce  animale.  En somme, elle examine chaque aspect de la biologie du patrimoine génétique, l’anatomie, la physiologie, le comportement, l’environnement, les adaptations, et l’histoire  évolutionnaire soumis à la  contrainte des corrélations parmi ces aspects.

Ce genre d'approche, examinant un sujet en se concentrant sur les corrélations  parmi ses parties s'appelle holistique.  L'approche holistique est le cachet de l'anthropologie. Nous comprenons que toutes les facettes de nos espèces, notre biologie, notre comportement, notre passé, et notre présent agissent l'un sur l'autre pour faire de nous ce que sommes. Mais certaines matières sont si complexes qu’elles requièrent la nécessité d'être étudié séparément  juste comme pour prendre des cours d'histoire, de sciences économiques, de psychologie, d’art, d’anatomie, et ainsi de suite. Le travail des anthropologues en pareil cas consiste à rechercher les raccordements parmi ces sujets, parce que dans la vie réelle, elles ne sont absolument pas séparées.

Mais ici, elle semble compliquée, car la caractéristique essentielle du comportement de nos espèces relève de la  culture, et le comportement culturel n'est pas programmé dans nos gènes, comme cela se présente par exemple, pour une grande partie du comportement des oiseaux et pratiquement de tout le comportement des fourmis. La culture humaine est apprise. Nous avons un potentiel biologique pour le comportement culturel en général, mais précisément, comment  nous nous comportons vient à nous par toutes nos expériences. Apprendre une langue par exemple. Tous les humains naissent avec la capacité d'apprendre une langue, mais c'est la langue parlée par nos familles respectives et nos plus cultures proches qui déterminent quelle langue nous parlerons. L'anthropologie biologique regarde notre espèce d'un point de vue biologique. 

 

La plupart des anthropologues ne portent pas les manteaux blancs de laboratoire ou ne travaillent pas avec des tubes et des produits chimiques à essai. Beaucoup d'anthropologues étudient les choses qui ne peuvent pas être directement observées en nature ou être recréées dans le laboratoire parce qu'elles se sont produites dans le passé. Mais la bioanthropologie  est  une science, au même titre que beaucoup d’autres, à l’image de la chimie, la physique et la biologie. 

 

Une image populaire d'un scientifique est celle d'une encyclopédie en marche. La Science est souvent vue comme un rassemblement de faits : juste pour indiquer que les scientifiques savent beaucoup de faits. 

Les faits sont certainement importants pour la science. Ils sont la matière première de la science, à travers l'utilisation de données scientifiques, rassemblées par l'observation et l'expérimentation.

Mais le but de la science est de relier et d’unifier des faits afin de produire, par la suite, de larges principes connus sous le nom de  théories. La Science,  en d'autres termes, est une méthode d'enquête, une manière de répondre à des questions au sujet du monde. Mais comment la science fonctionne-t-elle ? La science est-elle la seule méthode valide et logique pour expliquer le monde autour de nous ?

 

Théorie : Une idée générale soutenue qui explique un grand ensemble de modèles effectifs et prévoit d'autres modèles.

La science : la méthode d'enquête qui exige la génération, l'essai, et l'acceptation ou le rejet des hypothèses.

 

Comme des scientifiques, nous devons répondre à ces questions en s’appuyant sur un ensemble de règles spéciales découlant de la méthode scientifique.

La méthode scientifique implique un cycle d’étapes, pouvant commencer n'importe où sur le cycle et en réalité. L'étape la plus fondamentale est de poser des questions auxquelles nous souhaitons répondre ou décrivant les observations que nous souhaitons expliquer. Nous recherchons alors des modèles, des raccordements et des associations de sorte que nous puissions produire des conjectures de connaissances relatives aux explications possibles. Ces conjectures de connaissances s'appellent  les hypothèses.

 

Peut-on parler de l’objectivité scientifique de la bioanthropologie ? Quel est le degré de certitude  à la lumière des courants de l’épistémologie ?

-          Le rationalisme

 « Toute connaissance provient essentiellement de l’usage de la raison » (Kant, Descartes, Leibnitz). → l’expérimentation est facultative ↔ la bioanthropologie ….. ?

-          L’empirisme

« Toute connaissance provient essentiellement de l’expérience … Les observations permettent de rendent compte ». Dans ce contexte où le fonctionnement a pour but de produire des idées qui permettent de  faire de nouvelles expériences ↔ la bioanthropologie … ?

-          Le positivisme

Le privilégie le management de l’observation et de l’expérimentation. Il se fonde sur des faits mésurables ↔ la bioanthropologie … ?

-          Le constructivisme

«Le constructivisme considère toute connaissance scientifique au même titre que n’importe quelle autre connaissance construite à partir d’expérience cognitive » ↔ la bioanthropologie … ?

-          Le  réalisme

« Les modèles scientifiques sont des constructions destinées à prédire certaines sphères d’une réalité objective qui existe indépendamment de l’observateur » ↔ la bioanthropologie … ?

-          L’objectivité

L’idéal de tout discours scientifique est la production d’une connaissance objective. La science vise à produire des connaissances rigoureuses pouvant être soumises à la critique et aux épreuves de récitation et de vérification.

 

II-2. La construction moderne de l'objet en anthropologie biologique.

 

Contrairement à l'anthropologie physique "typologiste", qui s'inspire d'une conception de l'hérédité antérieure aux découvertes de Mendel et d'une vision fixiste de l'humanité, l'anthropologie biologique (ou anthropobiologie), ne se contente pas de décrire la diversité biologique humaine; elle reprend paradoxalement une partie du vieux projet de l'anthropologie, à savoir d'essayer d'en comprendre la nature et la genèse.

Mais, contrairement à la pensée typologiste qui rassemble sous une même dénomination l'individu et la population (= le type), l'anthropologie biologique va partir simultanément de ces deux niveaux fort distincts.

Biologiquement, l'individu varie sans cesse, de la naissance à la mort, au long de processus de croissance, de maturation puis de vieillissement. L'anthropologie biologique part aussi de la constatation que deux ordres de facteur interagissent : ceux relevant du génétique et ceux relevant du milieu. Elle se trouve face à des morphologies individuelles, donc des phénotypes, qui sont le résultat de l'expression du génotype et de l'action du milieu.

Depuis Darwin et l'hypothèse de la souche humaine unique, toute théorie se référant à un quelconque concept de race ne peut se développer que dans le cadre d'une pensée évolutionniste. En théorie, ce phénomène de "raciation" requiert deux conditions: l'isolement sexuel et la sélection naturelle.

L'isolement sexuel provoque un paysage génétique et morphologique singulier, due en particulier au phénomène de dérive génique. Ce n'est plus la présence d'un caractère qui importe, mais sa fréquence dans la population.

L'apport de la génétique devient essentiel pour comprendre les mécanismes de l'hérédité. Le cadre conceptuel changeait car les individus d'une génération G + 1 n'étaient plus le produit d'un "mélange" entre deux parents de la génération G, mais des individus différents résultant d'une recombinaison génétique.

C'est pourquoi, si certains ont pu croire, dans un premier temps que la génétique allait permettre de fonder une nouvelle typologie raciale plus "moderne", nous verrons que les travaux en génétique humaine ont vite montré, finalement dès les recherches sur les groupes ABO, que la variabilité génétique était considérable.

Dès lors, l'anthropologie devait définitivement rompre avec la pensée typologiste, puisqu'elle sa seule raison d'être devenait l'étude des processus d'évolution, donc de la variation au sein de notre espèce (Gomila, 1976; Hiernaux, 1980); les autres branches de la biologie étaient là pour étudier notre espèce (anatomie, physiologie, génétique,...).

L'anthropologie biologique devenait une discipline reposant entièrement sur un modèle de pensée populationniste.

 

 

III-L’UTILISATION ABUSIVE DU SAVOIR ANTHROPOLOGIQUE OU LES DEVIATIONS EPISTEMOLOGIQUES

 

       Les données fournies par le savoir anthropologique vont servir de prétexte à certains extrémistes pour  imaginer des idéologies racistes ou manifester des comportements de  mépris vis-à-vis de certains peuples ou d’individus naturellement défavorisés. Il s’agit parfois aussi de théories scientifiquement construites. Ainsi verront le jour le darwinisme social, le racisme, l’eugénisme, la sociobiologie et la psychologie évolutionniste. 

 

III-1 Le racisme  et la psychologie raciale

ü  Le racisme

      

          Le privilège de la « race » blanche ou plus précisément de la nation Aryenne, a été réaffirmé au XIX e siècle avec la contribution de certains auteurs comme Joseph-Arthur Comte de GOBINEAU. Diplomate et écrivain il est connu pour son Essai sur l’inégalité des races humaines.  Dans cet ouvrage il examine l’origine de l’humanité et celle des races, puis « démontre leur inégalité en force, en beauté et surtout en intelligence. Ses intentions sont claire affirmer la supériorité de la « race » blanche par la hiérarchie des « races » conformément au contexte idéologique et politique de son époque et ce malgré l’abolition de l’esclavage en 1848. Il affirme que l’origine de l’humanité est des  « races » est multiple et que le Blanc, le Nègre, le Jaune appartiennent à des espèces différentes, qui sont apparues ou ont été créées séparément. Cela lui semble s’imposer à la vue de différences physiques et mentales qui lui sont évidentes. Pour lui à la vision d’un « Nègre de côte occidental d’Afrique (….) l’esprit se rappelle involontairement la structure du singe et se sent enclin à admettre que les races nègres (…) sont sorties d’une souche qui n’a rien de commun, sinon des rapports généraux dans les formes, avec la famille mongole »[1] Et quand il en arrive aux habitants de l’Europe, il leur trouve « une telle supériorité de beauté, de justesse dans la proportion des membres, de régularité dans les traits du visage que tout de suite, on est tenté d’accepter la conclusion » de la multiplicité des races. La vision de Gobineau promet à l’humanité un sort d’autant plus misérable que le mélange des « races » y sera plus complet : « le dernier terme de la médiocrité dans tous les genres », puisque « l’espèce blanche a désormais disparu de la face du monde » et que « la part du sang arien, subdivisé déjà tant de fois, qui existe encore dans nos contrées, et qui seule soutient l’édifice de notre société, s’achemine vers les termes extrêmes de son absorption. Gobineau trouve donc dangereux le métissage par les mariages interraciaux qui risque de faire disparaitre la « race » aryenne  (blanche). 

 

       Madison Grant, un avocat plus connu comme un écologiste et eugéniste créé le mouvement "racistes" en Amérique préconisant l'extermination des "indésirables" et certains "types" course à partir du pool des gènes humains. Il a joué un rôle crucial dans la politique restrictive de l'immigration américaine et les lois anti-métissage. Ses travaux ont servi de justification à la politique nazie de stérilisation forcée et l'euthanasie. Il a écrit deux des oeuvres fondatrices du racisme américain: The Passing of the Great Race (1916) et la conquête d'un continent (1933). The Passing of the Great Race obtient un succès populaire immédiat et mis en place des subventions comme une autorité en anthropologie, et jeté les bases pour ses recherches sur l'eugénisme.

En 1911, une affamée et presque nus homme indien a pris refuge dans un abattoir de Californie du Nord. Il a été remis à l'anthropologue Thomas T. Waterman, qui l'a amené à vivre à l'Université de Californie du musée d'anthropologie. Il a été donné le nom Ishi, qui signifie «homme» dans sa langue maternelle. La plupart des membres de la tribu de Ishi, le Yahi-Yana, ont été massacrés pendant la ruée vers l'or en Californie. Surnommé «l'homme sauvage dernier en Amérique", il est devenu une attraction populaire, et dans ses six premiers mois au musée, 24.000 visiteurs le regardait démontrer arrow-faire et le feu des capacités. Ishi vécu au musée jusqu'à ce qu'il meurt de tuberculose en 1916.

En 1926, l'American Association of Physical Anthropology et le National Research Council a organisé un Comité sur le Noir, qui était axée sur l'anatomie des Noirs et reflète le racisme de l'époque. Parmi ceux qui sont nommés au Comité sur la couleur, étaient Hrdlicka, Earnest Hooton et eugéniste Charles Davenport. En 1927, le Comité a approuvé une comparaison des bébés africains avec de jeunes singes. " Dix ans plus tard, le groupe a publié les résultats dans l'American Journal of Physical Anthropology de "prouver que la race nègre est phylogénétiquement une démarche proche de l'homme primitif que la race blanche

 

ü  La psychologie raciale

 

        Certains psychologues dont les plus célèbres, WECHSLER, STERN, TERMAN se sont contentés à caractériser  l’intelligence par certaines aptitudes (à juger, à comprendre, à imaginer, …) et ont cherché à déterminer l’âge mental et à faire correspondre  cet âge à l’âge réel afin de déduire, le retard d’intelligence ou l’avance d’intelligence par rapport à une norme qu’ils ont calculé.  Ils sont partis de l’hypothèse suivante : le développement intellectuel de chaque enfant se réalise de façon continue et à vitesse constante. De cette hypothèse ils ont terminé le quotient intellectuel (QI) qui égal à l’âge mental divisé par l’âge réel. Ces mesures sont réalisées à partir de tests. Les plus radicaux vont  déterminer à partir de ces tests des « idiots » (retardé mental) et des super-doué.  D’autres encore à partir de recherches initiées, comme le psychologue Arthur JENSEN (1974), Cyril BURT avec ses travaux sur les jumeaux homozygotes, vont déterminer dans l’intelligence la part de l’inné (gène) et de l’acquis (le milieu). Ils aboutissent à la conclusion que l’intelligence est génétiquement déterminée  à 80% et 20% par le milieu. On est ainsi amené à voir dans l’intelligence un ensemble de traits moins qualitatifs que quantitatifs donc susceptibles de mesures.

            Le plus grand retentissement de toutes ses études est la déduction d’une inégalité des QI selon les classes sociales et les « races ». Les premières réflexions de JENSEN présentées dans un article de la Harvard Educational Review en 1969, exposaient des comparaisons de QI entre les Blancs et les Noirs américains. Ces comparaisons montraient que la moyenne observée chez les Noirs est inférieure de 15 points à celle des Blancs. S’appuyant sur les conclusions de BURT, JENSEN justifie cet écart par le fait que le QI est déterminé à 80% par le patrimoine génétique ; l’infériorité intellectuelle des Noirs telle qu’elle est mesurée par les tests, révèle donc une infériorité biologique innée, contre laquelle aucune action ne peut lutter.  Des remarques semblables ont été faites par le psychologue anglais Hans Eysenck dans un ouvrage paru en 1977. S’appuyant sur des résultats d’études empiriques effectuées dans certains pays, il dresse un tableau des QI des diverses professions (cadres supérieurs : professeurs, savants, chercheurs ; cadres moyens : chirurgiens, avocats… ; commerçants ; jardiniers…). Combinant avec l’affirmation, affichée comme un dogme, que le QI est déterminé pour 80% par le patrimoine génétique son étude veut démontrer que les inégalités sociales sont la conséquence des inégalités génétiques contre lesquelles personne ne peut rien. Il s’agit ici un avatar du darwinisme social.  Les conséquences de ces différents tests seraient inévitablement la conclusion suivante : Pour le bien de l’espèce humaine, il faut que les « meilleurs » (les mieux intelligents) participent plus que les autres à la transmission du patrimoine biologique. Au nom de telles affirmations la vie entière de certains peut être sacrifiée, notamment au cours de l’épouvante course d’obstacle qu’est devenue la scolarité. La ségrégation de groupes entiers, leur exploitation peuvent être présentées comme justes car conformes aux conclusions de la science

 

III-2 Le darwinisme social et l’Eugénisme

 

ü  Le darwinisme social

 

         Le darwinisme social est une doctrine politique évolutionniste apparue au XIXe siècle selon laquelle la lutte pour la vie entre les hommes est l'état naturel des relations sociales et la source fondamentale du progrès et de l'amélioration de l'être humain, et qui prescrit à l'action politique de supprimer les institutions et comportements qui font obstacle à l'expression de la lutte pour l’existence et à la sélection naturelle qui aboutissent à l’élimination des moins aptes et à la survie des plus aptes

    

         Envisagé à l’échelle de la compétition entre les individus, il préconise la levée des mesures de protection sociale, l’abolition des lois sur les pauvres ou l’abandon des conduites charitables. Son versant racialiste fait, à l’échelle de la compétition entre les groupes humains, de la lutte entre les « races » le moteur de l’évolution humaine. Il s’est conjugué à la fin du XIXe siècle avec les théories eugénistes.

 

       Les origines de cette théorie monte à HERBERT SPENCER (1820-1903), savant contemporain anglais de Darwin, Ingénieur, philosophe et sociologue et tout aussi populaire, interprète cette théorie par la « sélection des plus aptes » (Survival of the fittest). Le darwinisme social suggère donc que l'hérédité (les caractères innés) aurait un rôle prépondérant par rapport à l'éducation (les caractères acquis). Il s'agit ainsi d'« un système idéologique qui voit dans les luttes civiles, les inégalités sociales et les guerres de conquête rien moins que l'application à l'espèce humaine de la sélection naturelle ». Il fournit ainsi une explication biologique aux disparités observées entre les sociétés sur la trajectoire prétendument unique de l'histoire humaine : les peuples les moins « adaptés » à la lutte pour la survie seraient restés « figés » au stade primitif.

 

       Sur le plan politique, le darwinisme social a servi à justifier scientifiquement plusieurs concepts politiques liés à la domination par une élite, d'une masse jugée moins apte. Parmi ceux-ci notons le colonialisme, l'eugénisme, le fascisme et surtout le nazisme. En effet, cette idéologie considère légitime que les races humaines et les êtres les plus faibles disparaissent et laissent la place aux races et aux êtres les mieux armés pour survivre.

        À la fin du XIXe siècle, le darwinisme social a été étendu aux rapports entre les nations. Ce mouvement s'est surtout développé dans les pays anglo-saxons, et dans une moindre mesure en Russie. Si cette idée ne débouche en général pas sur des attitudes belliqueuses, il n'en est pas de même en Allemagne où l'affrontement entre les nations « jeunes », comme l'Allemagne, pleines de vitalité « virile », et les nations « anciennes », qualifiées par les tenants de cette théorie de « décadentes », comme la France, est considéré comme inévitable.

        Dès le 19e siècle, les travaux de Spencer sont utilisés pour démontrer les fondements biologiques du retard technologique et culturel de populations dites « sauvages », justifiant scientifiquement les politiques coloniales en leur donnant une caractéristique morale de civilisation, alors même qu'elles sont fondamentalement rendues nécessaires par la contraction des marchés locaux.

 

      Le « darwinisme social », serait également une idéologie réactionnaire du capitalisme.  En 1848, la parution du Manifeste communiste offre une vision révolutionnaire de la question, qui place l'homme et son activité, sur un plan social, au cœur du progrès historique. Cette vision ne peut évidemment satisfaire la nouvelle classe dominante, la bourgeoisie, qui vit avec enthousiasme la pleine ascension du système capitaliste. D'une part, cette ascension se fonde sur une idéologie particulièrement axée sur l'individualisme, et d'autre part, il est bien trop tôt pour la bourgeoisie de concevoir, même sur un plan strictement intellectuel, la possibilité d'un dépassement du capitalisme. A  cette époque  en Angleterre, la classe dominante est toujours traversée de courants radicaux qui remettent en cause les privilèges héréditaires, qui constituent des freins aux nouvelles formes de développement offertes par le capitalisme. Spencer fréquente ce milieu des « dissidents », fortement ancré dans l'anti-socialisme.  Il ne voit dans la misère noire de la classe ouvrière anglaise, que les stigmates provisoires d'une société en adaptation et qui, sous l'effet de l'explosion démographique, finira par se réorganiser, constituant ainsi un facteur de progrès. Pour lui, le progrès est inévitable, puisque les hommes s'adapteront à l'évolution de la société, si tant est qu'on les en laisse libres.

Cette euphorie est à peu près partagée par l'ensemble de la bourgeoisie. S'y ajoute un fort sentiment d'appartenance à la nation qui achève sa construction et qui peut être renforcé par les événements guerriers comme en France suite à la défaite contre la Prusse. Le développement de la lutte de classe, qui accompagne le développement du capitalisme, pousse la bourgeoisie à développer une autre conception de la solidarité sociale, fondée sur des données qu'elle espère indéniables.

 

        Tout ceci constitue le terreau d'une théorisation de l'ascendance capitaliste et de ses effets immédiats : la prolétarisation dans la sueur, la colonisation dans le sang, la concurrence dans la boue.

 

Du strict point de vue scientifique, les travaux de Spencer inspireront des études plus ou moins variées, comme la craniologie (l'étude de la forme et la taille du crâne, dont les résultats s'avèreront finalement arrangés), les tentatives de mesure de l'intelligence ou encore l'anthropologie criminelle avec la théorie du « criminel né » de Lambroso, dont les échos se font encore entendre aujourd'hui dans les sphères politiques bourgeoises quand il s'agit de détecter au plus tôt le futur criminel.

    

      La prépondérance de l'inné conduit également Spencer à dessiner les contours d'une politique éducative dont les répercussions sont encore visibles dans le système scolaire primaire britannique, qui cherche à fournir à l'enfant un environnement propre à son épanouissement personnel, à ses propres recherches et découvertes, plutôt que de fournir un enseignement magistral susceptible de développer de nouvelles aptitudes. C'est également le fondement théorique qui sous-tend le concept d' « égalité des chances ».

 

 

ü  L’Eugénisme

 

          La descendance la plus réputée du darwinisme social réside avant tout dans l'EUGENISME. Ce dernier  se présente comme  la version radicale du darwinisme social. C'est FRANCIS GALTON, cousin de Charles Darwin, qui pose les premiers concepts de l'eugénisme en suivant l'intuition sous-jacente de Spencer selon laquelle si la sélection naturelle doit conduire de façon mécanique au progrès social, tout ce qui l'entrave ne peut que retarder l'accession de l'humanité au bonheur. Plus simplement, Galton craint que les mesures d'ordre social que la bourgeoisie est amenée à prendre, la plupart du temps sous la pression de la lutte de classe, induisent à terme une dégénérescence globale de la civilisation.

 

      Alors même que Spencer serait plutôt adepte du « laisser-faire », de la non intervention de l'État (un de ses ouvrages, paru en 1850, porte le titre Le droit d'ignorer l'État) Galton va préconiser des mesures actives pour faciliter la marche de la sélection naturelle. Il inspirera ainsi longtemps et plus ou moins directement des politiques de stérilisation des malades mentaux, la pratique de la peine de mort pour les criminels, etc. L'eugénisme est également toujours considéré comme caution scientifique centrale dans les idéologies fascistes et nazies, même si déjà chez Spencer, les éléments sont présents pour élaborer des visions racistes conduisant à la hiérarchisation des races.

 

       Le mouvement mondial eugénique gagné en force aux Etats-Unis à la fin des années 1890, quand les théories de la reproduction sélective adoptée par l’anthropologue britannique Francis Galton et son protégé Karl Pearson, a gagné du terrain. Connecticut a été le premier de nombreux Etats, en commençant en 1896, d'adopter des lois du mariage avec les dispositions eugéniques, interdisant à quiconque qui était «épileptique, imbécile ou de faiblesse d'esprit» de se marier. Le célèbre biologiste américain CHARLES DAVENPORT, docteur en biologie en 1892 et devenu directeur de la recherche dans un Laboratoire de biologie à New York en 1898, obtient un financement de l'Institut Carnegie pour créer la station de recherche expérimentale sur l'Evolution. Puis, en 1910, il profite avec HARRY  LAUGHLIN de leurs positions au Record Office eugénisme pour promouvoir l'eugénisme.

       L'ERO (Record Office eugénisme) a conclu après des années de collecte de données sur les familles que les pauvres étaient la principale source des inaptes. " Davenport et autres employés hautement considéré eugénistes comme le psychologue Henry H. Goddard et écologiste Madison Grant lancé une campagne pour lutter contre le problème des inaptes ". Goddard, en utilisant des données fondées sur ses recherches sur la famille Kallikak, ont fait pression pour la ségrégation, alors que Davenport restriction à l'immigration préféré et la stérilisation en tant que méthodes primaires. Subvention, le plus extrême des trois, d'accord avec deux de ses collègues, et même considéré comme l'extermination en tant que solution possible.

 

      CHARLES DAVENPORT publie en  1911 un livre, l'hérédité dans la liaison à l'eugénisme, qui a été une œuvre majeure dans l'histoire de l'eugénisme. Avec un assistant, Davenport a également étudié la question du métissage, où, comme il disait, «race de passage" chez l'homme. En 1929, il publie Race Crossing, en Jamaïque, qui était censée donner des éléments statistiques sur les dangers du métissage entre Blancs et Noirs.

 

         L'eugénisme permet de franchir un pas supplémentaire en envisageant la suppression de masses d'individus jugés inaptes et donc en mesure potentiellement de retarder le progrès de la société. Alexis Carrel, en 1935, ira même jusqu'à préconiser, et même décrire avec force détails, la création d'établissements où se pratiquerait l'euthanasie généralisée. Ainsi au nom de l’Eugénisme et de ses principes, des crimes contre l’humanité ont été commis dans l’histoire de l’humanité. Citons parmi ces crimes l’antisémitisme des juifs, l’extermination des Aborigènes d’Australie par les colons anglais dont l'expansion débuta en 1770, les Amérindiens ou Indiens d’Amérique ont connu le même sort lors de la colonisation de ce continent par les Britanniques.   

 

 

III-3 La sociobiologie

 

        La sociobiologie est une théorie exposée en 1975 par Edward Osborne Wilson de l'université de Harvard (États-Unis), dans son ouvrage Sociobiology. A New Synthesis (Sociobiologie, la nouvelle synthèse). Il s’agit de la synthèse entre la génétique, l’écologie et l’éthologie qui cherche l’origine biologique des comportements des animaux sociaux y compris l’homme. Elle repose sur les deux principes suivants :

 

-          La hiérarchie rencontrée dans la plupart des sociétés animales est d'origine génétique. Elle tient à des comportements d'agressivité et de dominance. Biologiquement, certains sujets sont faits pour commander, alors que d'autres sont faits pour obéir. Cela est vrai aussi bien chez les insectes que chez les hommes. La position que chacun occupe dans la hiérarchie sociale n'est que le fruit de la compétition qui sait reconnaître les « meilleurs » des « moins bons » ; elle lui est assignée par la sélection naturelle.

-          Tous les comportements d'un individu obéissent à une loi fondamentale, diffuser ses propres gènes d'une façon aussi large que possible. Ainsi, l'agressivité (qui conduit à éliminer tout rival sexuel), l'altruisme (qui s'applique aux membres d'une même famille portant certains gènes identiques) ne poursuivent pas d'autre but. Quant à l'altruisme que nous manifestons pour nos amis, il tient au fait que ceux-ci peuvent nous aider à élever notre progéniture

 

       Pour la sociobiologie, l’objectif essentiel d’un organisme est de garantir la transmission de ses gènes. Les êtres vivants sont donc en compétition incessante, l’existence de l’être vivant ne se justifiant que pour assurer la meilleure transmission possible de ses gènes qualitativement et quantitativement. Comme Lamarck, Wilson admet la transmission héréditaire des comportements acquis. De ce point de vu, la sociobiologie est qualifiée de néo-lamarckisme. Il a appliqué sa théorie chez l’homme en 1978, dans un livre intitulé On Human Nature où il affirme un égoïsme biologique des individus dans leur comportement social. Les êtres vivants sont donc en compétition constante pour imposer dans la nature et cet appétit de leur génotype s’accompagne d’une volonté agressive de domination sociale. Selon Wilson, les divers comportements sociaux seraient programmés génétiquement. Il conçoit l’altruisme comme  « un comportement autodestructeur mis en œuvre pour le bénéfice des autres ». La sociobiologie se présente comme un avatar du darwinisme social que certains vont appeler un néo-darwinisme social. Elle prend des proportions sexistes et implique des sous-entendus eugénistes en s’occupant des infanticides et de la criminalité. Elle a pris à cet effet une dimension politique. En France elle a été défendue par Yves CHRISTEN. Face aux différentes attaques faites à la sociobiologie John TOOBY et Leda COSMIDES, lui donneront en 1990, la nouvelle appellation psychologie évolutionniste

 

IV- LES RUPTURES EPISTEMOLOGIQUES DE LA BIOANTHROPOLOGIE

 

IV-1 Les ruptures

    

       Toutes les dérives ou du moins déviations épistémologiques qui viennent d’être citées plus haut ne sont en réalité basées sur aucune théorie scientifiquement fondée.  Que ce soit le racisme, l’eugénisme, le darwinisme social ou la sociobiologie, ils prennent leur origine dans des contextes idéologiques et politiques controversés. 

 

 

ü  Les limites du concept de « race » chez l’humain

 

         La notion de race au sens strict du terme n’a aucun sens en biologie quant il s’agit de l’Etre humain. La « race » peut biologiquement se définir comme des  individus qui portent tous certains caractères génétiquement fixés c'est-à-dire transmis par l’hérédité et ayant en commun une part importante de leur patrimoine génétique. Ceux qui apparaissent sous l’influence du milieu (caractère acquis) n’ont aucune valeur classificatoire. Il s’agit de caractères intrinsèques des divers groupes humains, indépendamment de leurs conditions de vie, de leur milieu géographique, de leur classe sociale, de leur groupe ethnique, de leur culture ou de leur religion. Les individus qui composent le groupe « raciale » ne présentent que des différences mineures. Or les classifications faites par les taxonomistes (classificateurs) ne reposent que sur des données fournies  directement par l’observation  de quelques caractères visibles (phénotypes) : couleur de la peau, texture des cheveux, les mesures du crâne et de la taille, forme du nez … En génétique et en Anthropologie on utilise le terme de « population » pour désigner ce que les autres ont nommé race. Il est infondé d’opérer une classification raciale des humains en se basant sur un caractère unique ou encore moins sur l’appartenance géographique ou culturelle.  En arrêtant certains caractères spécifiques le système ABO et le système Rhésus, ont peut obtenir des individus de la même population génétique appartenant à des espace géographique différent (continent) ou à des cultures différentes. La classification dépasse désormais le cadre du phénotype et concerne l’ « univers des génotypes » Gobineau en a abusé au point qu’il est parvenu t à utiliser le mot espèce pour qualifier les groupes humains qu’il définissait comme des groupes raciaux. Or l’interfécondité entre des individus permet de déterminer le concept d’espèce. Une espèce est un groupe d’individus à l’intérieur duquel l’interfécondité ou la fécondité entre les sous-groupes est possible. En utilisant le mot espèce pour qualifier les différents groupes humains, est-ce une façon pour Gobineau d’exprimer ouvertement sa négation contre le métissage entre les populations européenne et celles d’Afrique ?

             La génétique a permis donc de donner un contenu plus objectifs au concept de « race » et parler désormais de population à la place de race quand il s’agit de l’humain.

 

ü  Les limites de la psychologie  raciale 

 

          En réalité les différents travaux réalisés sur les jumeaux homozygotes comportent des insuffisances au niveau des échantillons utilisés (échantillon assez réduit). Plus encore les travaux de Burt portant sur un nombre important de jumeaux homozygote (53), révèle des insuffisances méthodologiques remarquables : les tests utilisés ne sont pas précisés, le sexe et l’âge des enfants non plus, des doutes peuvent même être formulés sur l’existence réelle de certains jumeaux.  Parmi ces études de jumeaux, celle de SCHIELDS porte sur un effectif important avec toutes les précisions méthodologiques, mais celle-ci ne peut être admise sans précautions car l’échantillon qu’il a étudié est bien peu représentatif (deux fois plus de filles que de garçons, plus d’enfants issus de classes sociales très pauvres) ; en plus la plus de ces jumeaux ont passé une part importante de leur enfance ensemble dans une même famille.   En somme toutes ces recherches comportent des limites pour tirer des conclusions sur la détermination génétique de l’intelligence.

 

      Une autre limite de ces études réside au niveau de l’origine culturelle des tests utilisés pour mesurer le QI. Ces tests ont été mis au point sur des enfants ou des adultes blancs élevés en Europe ou en Amérique du Nord. Toutes les valeurs implicitement admises dans leur éducation sont nécessairement intervenues ; comment porter un jugement avec de tels tests sur des sujets baignant dans une culture totalement différente ? Les tests réalisés par Arthur JENSEN sont définis à partir de caractéristiques culturelles de la société blanche aux Etats Unis à la fin de 1960, Or à cette époque et même de nos jours dans certains Etats d’Amérique, la société noire ne bénéficie toujours pas des mêmes privilèges éducatifs et socioculturels que les Blancs. Une comparaison issue de tels tests  ne peut être que lacunaire et biaisée.

 

ü  Les limites du pseudo-darwinisme social

 

      Dans De l'Origine des espèces (sous-titré : La Préservation des races favorisées dans la lutte pour la vie), Darwin n'analyse pas la société humaine et n'a pas d'implication personnelle citée dans le « darwinisme social ». Herbert Spencer n'est pas un « darwinien » mais un lamarckiste ; il voit, en effet, dans l'évolution la marque d'une marche vers un progrès inéluctable, contrairement à Darwin, pour qui elle est le résultat du hasard.

 

         En 1910, le sociologue Jacques NOVICOW, dans un ouvrage intitulé La critique du darwinisme social,  critique de manière acerbe la tendance de ses collègues et savants de son temps à mettre en avant le conflit et la guerre comme moteur de l'évolution et du progrès social. Il donne la définition suivante au darwinisme social. « Le darwinisme social peut être défini : la doctrine qui considère l'homicide collectif comme la cause des progrès du genre humain. »

 

        L'épistémologue Patrick TORT a mis en évidence l'incompatibilité des thèses du darwinisme social, particulièrement dans leurs prolongements malthusien et eugéniste, avec les propres positions de Charles Darwin à propos de l'évolution humaine, en s'appuyant sur un ouvrage peu connu de ce dernier, paru en 1871.

 

          Dans ce ouvrage, contrairement aux interprétations  du « pseudo-darwinisme » social, C. Darwin affirme la rupture qui s'établit chez l'homme dans le processus de lutte pour la survie, fondée sur l'élimination des faibles : « Nous autres hommes civilisés, au contraire, faisons tout notre possible pour mettre un frein au processus de l'élimination ; nous construisons des asiles pour les idiots, les estropiés et les malades ; nous instituons des lois sur les pauvres ; et nos médecins déploient toute leur habileté pour conserver la vie de chacun jusqu'au dernier moment. Il y a tout lieu de croire que la vaccination a préservé des milliers d'individus qui, à cause d'une faible constitution, auraient autrefois succombé à la variole. Ainsi, les membres faibles des sociétés civilisées propagent leur nature. » (ibid,p223) C. Darwin conclut alors par l'hypothèse d'une forme d'extraction de la nature humaine de la loi de la sélection naturelle, sans pourtant contrevenir à son principe originel, à travers le processus de civilisation, fondé sur l'éducation, la raison, la religion et la loi morale : « Si importante qu'ait été, et soit encore, la lutte pour l'existence, cependant, en ce qui concerne la partie la plus élevée de la nature de l'homme, il y a d'autres facteurs plus importants. Car les qualités morales progressent, directement ou indirectement, beaucoup plus grâce aux effets de l'habitude, aux capacités de raisonnement, à l'instruction, à la religion, etc., que grâce à la Sélection Naturelle ; et ce bien que l'on puisse attribuer en toute assurance, à ce dernier facteur les instincts sociaux, qui ont fourni la base du développement du sens moral. » (ibid, p740).

 

           La sociobiologie admet le principe de « sélection de parenté » selon lequel, le comportement social est déterminé par la nécessité de maximiser le potentiel reproductif, l’important est alors de transmettre le maximum de ses gènes.  Or la parenté n’est pas un fait biologique mais d’abord un fait culturel, caractéristique des sociétés humaines. Les hommes ne se définissent pas d’abord par leurs attributs physiques mais par leurs propriétés symboliques.

 

      Il y a toutes sortes de motivations différentes à la base de l’agression, de même le Don peut relever de l’altruisme comme de l’agressivité (Potlatch). Ce que la sociobiologie ignore, c’est qu’entre le biologique et le social s’insère la Culture qui est symbolisation et interprétation et est donc une cause d’indétermination. La sociobiologie ignore la signification de l’acte humain.

 

      Les sociobiologistes dévoient (détourne de son sens)  le concept darwinien d’évolution. La notion de maximisation du pool génétique qu’ils ont utilisé n’a aucun sens dans l’évolution darwinienne puisque l’adaptation dépend du contexte en question. La sociobiologie inverse le rapport entre l’organisme et la sélection : dans ce cadre, c’est l’organisme qui essaie de maximiser sa situation et se sert de la sélection pour cela. Dans le cadre darwinien, l’organisme est l’objet de la sélection.


          En somme Darwin n'est pas le père du darwinisme social, ni de la sociobiologie ni de l'eugénisme, ni du racisme scientifique, encore moins du libéralisme économique, ou de l'expansion coloniale. Darwin n'est pas malthusien non plus. Bien plus encore, c'est lui qui, parmi les premiers, apporte la contradiction la plus développée aux théories de SPENCER et de GALTON.

 

        Après avoir exposé sa vision du développement et de l'évolution des organismes dans L'origine des espèces, Darwin se penche, douze ans plus tard, sur les mécanismes à l'œuvre  au sein de sa propre espèce, l'homme. En publiant La filiation de l'homme en 1871, il va contredire tout ce que parallèlement, le darwinisme social a construit. Pour Darwin, l'homme est bien le produit de l'évolution et se place donc bien au sein du processus de sélection naturelle. Mais chez l'homme, le processus de lutte pour la survie ne va pas passer par l'élimination des faibles.

 

           Ainsi, par le principe de l'évolution, l'homme s'extrait du mécanisme de la sélection naturelle en plaçant au-dessus de la lutte compétitive pour l'existence, tout ce qui contribue à favoriser le processus de civilisation, à savoir les qualités morales, l'éducation, la culture, la religion... ce que Darwin nomme les "instincts sociaux". De cette façon il remet en cause la vision de Spencer de la prépondérance de l'inné sur l'acquis, de la nature sur la culture.

 

En définitive, l'épistémologie des sciences empiète parfois sur ce qu'on appelle couramment la méthode scientifique. On peut se demander, par exemple pourquoi, les théories de Darwin et d'Einstein constituaient-elles des progrès par rapport aux croyances de l'époque? Quelle est la nature de la preuve en sciences, de façon générale? C'est étonnamment difficile, mais c'est aussi difficile d'expliquer comment faire du vélo, même s'il est évident que nous savons comment en faire.

Piaget distingue aussi la méthodologie de la logique et de l’épistémologie.

 

 

V- METHODOLOGIE PLURIDISCIPLINAIRE EN ANTHROPOLOGIE BIOLOGIQUE

 

Méthodologie : littéralement définie comme « science de la méthode » ou discours sur la méthode pour un objet ou domaine de connaissances donné, la méthodologie constitue le croisement entre logique appliquée et épistémologie appliquée. D’une part, elle n’a pas une consistance propre. D’autre part, on ne peut parler de logique et d’épistémologie sans déborder sur la méthodologie qui est nécessaire pour les mettre en œuvre.

Les méthodes sont seulement des moyens qui aident à rassembler un savoir. Elles ne constituent pas un ensemble de critères pour savoir de quel savoir il s’agit. Elles ne donnent aucun critère de vérité, aucune contrainte factuelle, aucun principe théorique. En résumé, elles ne font pas épreuve par elles mêmes.

 

Par nature interdisciplinaire, l’anthropologie biologique a toujours été très liée aux domaines de recherche des disciplines voisines, biomédicales, sociales ou culturelles. Elle en a souvent adopté les méthodologies et les perspectives, au risque, parfois, de s’y fondre. L’investissement croissant des anthropologues dans des problématiques nouvelles en sciences biologiques, environnementales, ou sociales va de pair avec une dispersion thématique qui constitue à la fois la richesse, mais également la faiblesse de l’anthropologie biologique.

Et pourtant, l’anthropologie biologique possède une démarche scientifique spécifique, qui traverse la multiplicité de ses champs d’intervention.

Le point commun à tous les anthropologues est de partager le même paradigme : celui de l’espace/temps, c’est à dire celui de la diversité et de l’évolution humaine. Dans cette perspective singulière, quel que soit le thème de recherche abordé, l’homme est toujours envisagé en tant qu’être  biologique, en total interaction avec son environnement physique, socio-économique et culturel.

 

Pour se développer, l’anthropologie biologique doit s’appuyer sur une de ses caractéristiques essentielles : l’interdisciplinarité. Le caractère holistique de l’anthropologie biologique est en soi une chance pour la connaissance scientifique en général. A une époque où la parcellisation des savoirs et l’hyperspécialisation de la recherche commencent à atteindre leurs propres limites d’efficacité, le développement d’un champ disciplinaire par nature ouvert à tous les aspects de la diversité biologique humaine s’avère particulièrement important sur le plan conceptuel, comme sur le plan méthodologique. L’approche singulière de l’anthropologie biologique procure indéniablement aux disciplines voisines (biologiques, médicales, sociales et écologiques) un regard spécifique sur des objets d’étude communs.

De plus, la demande sociétale concernant l’anthropologie biologique est forte. Les interrogations sur l’évolution biologique de notre espèce, son adaptation aux changements rapides de mode de vie et d’alimentation, l’influence des migrations sur l’évolution des flux géniques, les modifications morphologiques ou physiologiques éventuelles du corps humain dans un futur proche ou lointain, entrent dans le champ de la problématique anthropologique. Donner à comprendre la complexité des processus biologiques de transformation de notre espèce en fonction d’un milieu évoluant rapidement, tel est également l’enjeu de notre discipline.

L'anthropologie biologique a apporté des méthodes d'analyse de groupe ; elle a communiqué à d'autres disciplines - comme la médecine - la nécessité de réunir de grands échantillons porteurs d'une représentativité.

 

VI-1 Les Méthodes

VI-1-1 La biométrique

La biométrie constitue une étape essentielle de l’analyse anthropologique à travers le traitement de données et leur présentation synthétique. Elle contribue à formuler des hypothèses et à les éprouver. Sa démarche repose sur la statistique.

 

VI-1-2 L’estimation de la forme corporelle (le somatotype)

La forme du corps humain a toujours suscité beaucoup d’intérêt, tant pour ses variations liées au sexe ou vieillissement, tant pour sa finalité clinique ou esthétique. Autrement dit, es méthodes visent à quantifier et à comparer  les variations infinies de la morphologie de l’Hom sapiens. Ainsi naîtra la biotypologie, science qui  s’occupe de l’étude des biotypes humains, somatiques ou psychologiques.

 

      VI-1-3 L’Ergonomie

L’ergonomie regroupe un ensemble de connaissances interdisciplinaires capables d’analyser, d’évaluer et de projeter  des systèmes simples ou complexes incluant l’homme, en tant qu’opérateur ou  usager. L’étude ergonomique concerne tous les systèmes qui interagissent avec l’homme. L’objectif est d’améliorer la qualité de la vie (sûreté, santé, bien-être t confort, etc.).

 

VI-1-4 Les méthodes ostéologiques

Les méthodes ostéologiques ont connu un perfectionnement avec l’application de nouvelles techniques morphométrique en 2 ou 3 dimensions : elles améliorent les estimations de la forme et du format des pièces osseuses et, permettant de mieux interpreter l’évolution humaine.

 

VI-1-5 L’Anthropologie légale

L’Anthropologie légale est l’application de l’anthropologie physique aux problèmes légaux et à l’identification des restes humains squelettiques. Elle peut se diviser en trois (3)  grands domaines :

ü  Ostéologie légale ;

ü  Somatologie légale ;

ü  ADN et identification.

 

VI-1-6 La micro-usure dentaire

La micro-usure dentaire consiste à analyser les modifications produites sur l’émail par la capacité abrasive des particules contenues dans les aliments.

 

      VI-1-7 L’Analyse chimique et régimes alimentaires

L’analyse étudie des éléments traces et l’analyse des isotopes. Les concentrations en éléments traces, s’expriment généralement en ppm (part par million) : le strentium (Sr) et le calcium (Ca) sont les plus exprimés.

Certains éléments chimiques présentent des variantes ou « isotopes ». les analyses isotopiques  du carbone et de l’azote s’effectuent généralement sur le collagène, composant majoritairement la partie organique de l’os.

 

 

VI-2 Quelques méthodes couramment appliquées

 

En anthropologie biologique, plusieurs types d’observables sont impliqués, aussi bien quantitatifs que qualitatifs. Elle requiert donc plusieurs méthodes sur des questions complexes qui concernent l’homme. 

 

-       Pour des études de « population »

Pour des études sur la génétique des populations, le développement des techniques de l’ADN et de la bioinformatique, l’anthropologie biologique se redéfinit (Crawford, 2007). On fait place d’avantage à la variation, aux « tendances » statistiques, aux gradients de fréquences (Laine 2000), aux corrélations entre génétique et linguistique (Cavalli-Sforza, 1997).

La définition de la population et l’échantillonnage représentent la première étape de toute étude anthropogénétique (Jobling et al., 2004). La réalisation de l’enquête implique de travailler à partir d’un échantillon de la population d’intérêt.

Le domaine démographique réside dans les méthodes particulières de collecte des données :

- enquêtes et entretiens approfondis, adaptés à la population étudiée, et effectués auprès d’individus ou de groupes familiaux situés dans leur propre cadre de vie ;

- recoupement des données de l’enquête avec d’autres informations, afin de préciser et compléter les éléments recueillis;

- mise en lumière de comportements et opinions, selon les générations ou les groupes socio-économiques;

- suivi dans le temps de l’évolution démographique de la communauté (enquêtes sur le long terme);

- constitution de généalogies biologiques et reconstruction historique à l’échelle locale.

Si tous les individus de la terre pouvaient être échantillonnés, il n’y aurait pas de problème de représentativité. Pour des raisons financières comme éthiques, cela est bien entendu impossible, d’où la nécessité d’une stratégie d’échantillonnage.

Le développement d’une échelle micro-géographique vers une échelle macro-géographique se traduit par une évolution des stratégies d’échantillonnage.

Les individus sélectionnés ne sont plus les membres d’une communauté clairement identifiée mais au contraire des individus échantillonnés aléatoirement sur une aire géographique et/ou au sein d’une population aux contours larges. On peut alors avoir :

Echantillon local, échantillon « poolé » : Selon la stratégie adoptée on peut globalement définir deux types d’échantillons : des échantillons « locaux » définis sur une base biodémographique (stratégies de mariage, généalogies..) et des échantillons « poolés » (ex : prélèvements en milieu hospitalier..) regroupant des individus dispersés au sein d’un groupe culturel et/ou d’une aire géographique large.

Selon Ptak et Przeworski (2002), les échantillons « poolés » sont les plus à même de permettre la détection d’un maximum de variabilité. Ils sont donc les plus adéquats pour le développement d’une approche phylogéographique ou la mise en évidence de nouveaux polymorphismes.

 

Focus group : Dans les études anthropobiologiques, la mesure est bien souvent la règle. Crânes, os longs, plis cutanés, force de préhension, mais aussi activité physique, auto-évaluation de la santé, bien-être subjectif…

Tout peut, et surtout doit, être mesuré, calculé et catégorisé afin de fournir la vision la plus objective possible de l’homme. L’anthropologie biologique n’est pas seule à s’inscrire dans cette tendance positiviste puisque l’ensemble des sciences biomédicales, la psychologie sociale et certains courants de la sociologie sont également dominés par cette « raison calculante » (Boëtsch et Chevé, 2006).

Ainsi en anthropologie biologique, les thèmes de recherche sont généralement traités en soumettant les hypothèses à l’épreuve des chiffres et des analyses statistiques. Réalisées sur des échantillons représentatifs des populations, ces études ont souvent recours à l’utilisation de mesures anthropométriques, biologiques et d’échelles « validées », qu’elles soient psychosociales ou de santé.

Au moment de la rédaction du questionnaire se posent alors deux  principales questions d’ordre méthodologique : quelles échelles et quelles mesures utiliser ? Sont-elles adaptées à la population d’étude ? Parmi les méthodes qualitatives les plus utilisées, les groupes de discussion focalisés ou focus groups (« une technique d’entrevue qui réunit de six à douze participants et un animateur, dans le cadre d’une discussion structurée, sur un sujet particulier ») (Geoffrion, 2003) paraissent particulièrement adaptés à la démarche anthropobiologique.

 

-       Méthodes d’analyse des données

Diverses méthodes permettent d’analyser les discours recueillis par focus groups, notamment l’interactionnisme symbolique (Mead 1934), la grounded theory (Glaser, Strauss 1967) ou encore la méthode d’analyse qualitative thématique développée par Mason (1996).  

Cette méthode analytique est constituée de deux phases. La première phase concerne l’identification des thèmes; la seconde est interprétative et conceptuelle.

- Analyse thématique

Cette phase de l’analyse comprend plusieurs étapes. Tout d’abord, à partir des verbatim obtenus, on identifie et nomme les dimensions dans les discours. Ce processus est dénommé indexation.  

- Analyse conceptuelle

L’analyse conceptuelle est décrite comme plus subjective que l’analyse thématique (Nicolson, Anderson 2003) et consiste en une interprétation des discours, une lecture « entre les  lignes », influencée par la subjectivité et le parcours des chercheurs eux-mêmes.

 

 

 

CONCLUSION

 

L'anthropologie est l'étude holistique de l'espèce humaine de la perspective bioculturelle.  

L'anthropologie biologique étudie l'espèce humaine au même titre que la biologie étudie n'importe quelle espèce : examinant les caractéristiques biologiques, l’évolution, la variation, le rapport par rapport à l’environnement et le comportement. La Bioanthropologie, comme une discipline scientifique, pose des questions sur l'espèce humaine et essaie de répondre en formulant des hypothèses. Elle évalue ensuite ces hypothèses sur la base de leur évidence et /ou des éléments qui pourraient les réfuter.

 

La démarche anthropologique générale repose tout d’abord sur une connaissance théorique du champ disciplinaire et sur une pratique de terrain (ou de laboratoire), c’est-à-dire sur une connaissance découlant d’une relation intime avec l’objet d’étude. Initialement, l’anthropologie biologique a essayé de comprendre l’évolution biologique de l’homme au cours du temps, par la compréhension des processus démographiques puis des mécanismes génétiques, aujourd’hui, elle s’attache aussi à comprendre les causes de la diversité biologique actuelle par l’étude des mécanismes adaptatifs. Et comme elle a besoin de la connaissance du rôle rétroactifs des facteurs socioculturels, l’anthropologie biologique se veut interdisciplinaire c’est-à-dire qu’elle est bioculturelle. La discipline anthropologique au sens large se situe néanmoins dans le domaine strict de l’observation (in vivo ou in situ) et non de l’expérimentation.

En définitive, l’épistémologie et la méthodologie sont deux concepts différents et deux exigences doctrinales qui interagissent pour garantir la scientificité de la bioanthropologie. 

 

 

REFERENCES

 

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[1] Essai sur l’inégalité des races humaines, p 114 


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LEXIQUE PHYLOGENIE ET EVOLUTION
Acide aminé (n.m.): Molécule organique portant sur le même carbone une fonction amine (NH2), une fonction acide (COOH), un hydrogène et une chaîne latérale notée R. Vingt acides aminés différents entrent dans la composition des protéines. Ils diffèrent par la structure et les propriétés de leur chaîne latérale (polaire, apolaire, hydrophobe, hydrophile, soufrée, acide, basique).
Adaptation (n.f.): Ensemble de caractères phénotypiques acquis génétiquement, en réponse à une contrainte environnementale, transmissibles à la descendance. Désigne aussi la capacité d'un animal à modifier son comportement face à de nouvelles conditions.
Addition (n.f.): Mutation consistant en l'ajout d'une ou de quelques nucléotides dans la séquence d'ADN d'un gène.
ADN (n.m.). Acide désoxyribonucléique. Molécule constitutive des chromosomes, formée de 2 chaînes de nucléotides, ou brins, enroulées en une double hélice et reliées par des liaisons hydrogène entre les bases azotées complémentaires (A et T, C et G). L’arrangement des bases constitue le support de l'information génétique.
Aérobie (adj. ou n.m.): Désigne un milieu contenant du dioxygène ou un organisme dont le métabolisme exige du dioxygène.
Allèle (n.m.): Séquence particulière de nucléotides correspondant à l'une des différentes versions possibles pour un gène.
Allèle neutre (n.m.): Allèle qui ne modifie pas le phénotype et n'est donc pas soumis à la sélection naturelle.
Anaérobie (adj. ou n.m.): Désigne un milieu dépourvu de dioxygène ou un organisme dont le métabolisme n'exige pas de dioxygène, voire exige son absence.
Ancêtre commun (n.m.): En phylogénie, individu hypothétique qui possède l'ensemble des caractères dérivés caractéristiques d'un groupe d'êtres vivants.
Arbre phylogénétique (n.m.): Représentation des liens de parentés entre des espèces (ou des groupes d'êtres vivants), sous forme d'un diagramme arborescent qui montre, pour chaque espèce (ou groupe), quelle est l'autre espèce (ou groupe) avec laquelle elle partage l'ancêtre le plus récent; ces ancêtres hypothétiques sont situés aux noeuds de l'arbre.
ARN polymérase (n.f.) : Enzyme catalysant la transcription d'un brin d'ADN en ARN.
ARNm (n.m.) : Acide ribonucléique messager. Polymère de nucléotides (A, U, C, G) issu de la transcription d'une séquence d'un brin d'ADN ou gène.
Australopithèque (n.m.): Homininé fossile exclusivement africain, connu par plusieurs espèces, essentiellement entre 4,2 et 1 millions d'années, présentant une certaine bipédie.
Autotrophe (n.m.): Organisme ou cellule ayant la capacité de fabriquer sa matière organique à partir de matière minérale.
Avantage sélectif (n.m.): Caractère qui, dans certaines conditions du milieu, augmente le nombre relatif de descendants d'un individu.
Axe de polarité (n.m.): Axe antéro-postérieur, dorso-ventral ou gauche-droit.
Base azotée (n.f.): Élément constitutif du nucléotide. Il existe 5 bases azotées différentes: l'adénine, la cytosine, la guanine, l'uracile et la thymine.
Biodiversité (n.f.) : Diversité biologique; ce terme fait référence à la grande variété du monde vivant.
Biosphère (n.f.): Ensemble des êtres vivants. Enveloppe vivante à la surface de la Terre.
Bipédie (n.1): Locomotion en position dressée sur les membres postérieurs.
Brassage génétique (n.m.) : Formation chez un individu d'une nouvelle combinaison des allèles des différents gènes qui constituent le génome. Il peut se produire entre des gènes situés sur des chromosomes différents (brassage interchromosomique) ou entre des gènes situés sur le même chromosome (brassage intrachromosomique).
Caractère (n.m.): Tout attribut utilisable pour reconnaître, décrire, définir ou différencier les groupes d'êtres vivants.
Caryotype (n.m.): Nombre et forme des chromosomes caractéristiques de l'espèce.
Cellule (n.f.): Unité structurale et fonctionnelle des êtres vivants.
Centromère (n.m.): Point de jonction des deux chromatides d'un chromosome.
Chaîne métabolique (n.f.): Ensemble de réactions chimiques successives permettant l'élaboration d'un produit, aboutissant à des phénomènes de biosynthèse (anabolisme) ou de dégradation (catabolisme).
Chromatide (n.f.): Produit de la duplication d'un chromosome, à l'issue de la réplication. Une chromatide ne contient qu'une molécule d'ADN. Les deux chromatides d'un chromosome sont reliées par le centromère.
Chromatographie (n.f.) : Technique utilisée pour séparer les molécules d'un mélange. Fondée sur la migration d'un liquide ou d'un gaz (éluant) sur un support solide (papier, gel), elle sépare les molécules en fonction de leurs propriétés physicochimiques (solubilité dans l'éluant, affinité pour le support).
Chromosome (n.m.): Molécule d'ADN associée à des protéines. Les chromosomes sont des structures permanentes des cellules; ils ne sont visibles au microscope optique qu'au moment de la mitose. Chez les eucaryotes, ils sont localisés dans le noyau des cellules. Le nombre des chromosomes est constant pour chaque espèce. Dans une cellule diploïde, chaque chromosome existe en deux exemplaires (chromosomes homologues).
Code génétique (n.m.): Correspondance entre les codons de l'ARNm et les acides aminés. 20 acides aminés codent pour 64 codons d'ARNm (code redondant).
Crossing-over (n.m.) : Échange de portions de chromatides entre chromosomes homologues, au niveau du chiasma, lors de la prophase de la première division de méiose.
Cycle cellulaire (n.m.): Ensemble des changements dans une cellule entre 2 divisions de mitose. Le cycle comprend, au niveau du noyau, une interphase au cours de laquelle la quantité d'ADN est doublée par réplication, puis une mitose qui répartit l'information génétique dans les deux noyaux-fils.
Cycle de développement (n.m.) : Enchaînement des différentes phases de la vie d'un être vivant, marqué par l'alternance d'une phase haploïde (entre méiose et fécondation) et d'une phase diploïde (entre fécondation et méiose) et au cours duquel le nombre de chromosomes de l'espèce est maintenu constant.
Cytoplasme (n.m.): Contenu de la cellule, formé du hyaloplasme et des organites (à l'exception du noyau).
Délétion (n.f.): Mutation consistant en la disparition d'un ou de quelques nucléotides dans la séquence d'ADN d'un gène.
Diploïde (adj.): État d'une cellule possédant 2 lots de chromosomes homologues dans son noyau. Une telle cellule possède donc 2 exemplaires d'un même gène, mais pas obligatoirement les mêmes allèles.
Drépanocytose (n.f.) : Maladie génétique due à une mutation sur le gène contrôlant la synthèse d'une chaîne β-globine de l'hémoglobine. La valine remplace l'acide glutamique dans la séquence polypeptidique, rendant possible une liaison hydrophobe
avec une hémoglobine voisine. La polymérisation de l'hémoglobine provoque l'éclatement de l'hématie.
Duplication (n.f.): Copie d'un gène dont le duplicata est déplacé soit sur un même chromosome, soit sur un chromosome différent.
Électrophorèse (n.f.) : Technique de séparation des molécules d'un mélange selon leur charge électrique et/ou leur taille, fondée sur leur migration sur un support conducteur (gel, bande de papier) placé dans un champ électrique.
Enzyme (n.f.): Protéine jouant le rôle de catalyseur biologique. Son activité est liée à sa conformation spatiale permettant la formation d'un complexe enzyme-substrat. La synthèse des enzymes est gouvernée par des gènes.
Enzyme de restriction (n.f.): Enzyme coupant la molécule d'ADN en un site spécifique (site de restriction) d'une dizaine de paires de bases et produisant des fragrnents d'ADN de taille variable.
État dérivé (n.m.) : État d'un caractère de deux espèces que l'on trouve chez leur ancêtre commun, mais qui est absent chez d'autres espèces qui leur sont moins étroitement apparentées et chez lesquelles ce caractère est présent à l'état primitif.
État primitif (n.m.): État d'un caractère de deux espèces que l'on trouve chez leur ancêtre commun, mais aussi dans d'autres espèces qui leur sont moins étroitement apparentées.
Eucaryote (n.m. ou adj.): Organisme dont les cellules sont compartimentées et ont leur matériel génétique séparé du cytoplasme par une enveloppe nucléaire (noyau).
Famille multigénique (n.f.): Ensemble de gènes apparentés issus d'une série de duplications et de divergences à partir d'un gène ancestral.
Fuseau mitotique (n.m.): Ensemble de fibres protéiques participant à la séparation, puis à la migration des chromosomes au cours de la division cellulaire.
Gamète (n.m.): Cellule haploïde spécialisée dans la reproduction sexuée, produite à partir d'une cellule diploïde grâce à la méiose.
Gène (n.m.): Séquence d'ADN qui code pour un ARN fonctionnel.
Gène ancestral (n.m.): Gène à l'origine d'une famille multigénique.
Gène homéotique (n.m.): Gène de développement. Chez l'animal, il contrôle la mise en place de l'axe antéro-postérieur et la construction des différentes parties du corps; chez un végétal, il contrôle la mise en place des différentes parties de la fleur ou de l'appareil végétatif.
Gène homologue (n.m.): Gène présentant des similitudes de séquence avec un autre gène. Les gènes homologues proviennent d'un gène "ancestral" commun.
Génome (n.m.): Ensemble du matériel génétique d'une espèce ou d'un individu.
Génotype (n.m.): Ensemble des allèles d'un individu ou d'une cellule d'une espèce donnée.
Hémoglobine (n.f.) : Protéine constituée par l'association de 4 chaînes polypeptidiques (2 chaînes α, 2 chaînes β), associées chacune à un groupement non protéique, l'hème, qui peut fixer une molécule de dioxygène.
Hérédité (n.f.): Transmission des caractères d'un être vivant à ses descendants par l'intermédiaire des gènes.
Hétérochronie (n.f.): Modification de la vitesse et de la durée de l'ontogenèse, c'est-à-dire du développement de l'individu, depuis l'oeuf jusqu'à l'état adulte.
Hétérotrophe (adj.): Organisme ou cellule ne pouvant synthétiser sa matière organique qu'à partir de matière organique.
Hétérozygote (n.m.): Individu ou cellule qui possède, pour un gène donné, 2 allèles différents sur chacun des 2 chromosomes homologues.
Hétérozygotie (n.f.): Coexistence de deux allèles différents d'un gène chez un individu.
Homéoprotéine (n.f.): Protéine résultant de l'expression d'un gène homéotique et agissant comme facteur de transcription. Elle possède un homéodomaine (séquence d'acides aminés commune à d'autres homéoprotéines), permettant la fixation sur l'ADN et une partie spécifique, responsable de la reconnaissance d'une séquence d'ADN précise.
Hominidés (n.m.): Groupe de primates hominoïdes comprenant l'homme, le gorille et le chimpanzé.
Homininés (n.m.) : Groupe de primates hominoïdes comprenant les australopithèques et le genre Homo; le seul représentant actuel est l'homme Homo sapiens.
Hominoïdes (n.m.): Groupe de singes du Nouveau Monde, dont les représentants sont caractérisés par l'absence de queue.
Homo erectus (n.m.): Premier représentant du genre Homo à présenter une bipédie parfaite et une stature érigée. Il est apparu en Afrique il y a 1,9 million d'années et a colonisé une grande partie de l'Ancien Monde.
Homo habilis (n.m.): Premier représentant du genre Homo connu exclusivement en Afrique, entre 2,5 et 1,6 Ma; il est le premier homininé connu à confectionner des outils.
Homo neanderthalensis (n.m.): Espèce du genre Homo apparue en Europe il y a 100 000 ans à partir de populations d'Homo erectus; il disparaît il y a 30000 ans, au contact d'Homo sapiens.
Homo sapiens (n.m.): Espèce humaine actuellement présente sur Terre, apparue en Afrique ou au Proche-Orient il y a 100 000 à 130 000 ans.
Homologue (adj.): Se dit de deux organes ou parties d'organes similaires entre deux espèces, lorsque cette ressemblance provient de l'héritage d'un ancêtre commun au cours de l'évolution.
Homozygote (n.m. ou adj.): Individu ou cellule qui possède, pour un gène donné, 2 allèles identiques sur chacun des 2 chromosomes homologues. Se dit aussi de 2 chromosomes d'une même paire.
Hyaloplasme (n.m.): Substance fondamentale de la cellule. Partie liquide du cytoplasme.
Information génétique (n.f.): Ensemble des informations contenues dans les gènes, spécifiant les caractéristiques héréditaires de chaque cellule.
Innovation génétique (n.f.): Apparition d'un nouvel allèle ou d'un nouveau gène.
Lignée humaine (n.f.): Histoire évolutive des homininés à partir du plus récent ancêtre commun à l'homme et au chimpanzé.
Méiose (n.f.): Suite de deux divisions cellulaires, qui permet la fabrication de cellules haploïdes à partir de cellules diploïdes.
Membrane plasmique (n.f.): Structure formée de phospholipides, de cholestérol et de protéines, qui limite le cytoplasme cellulaire par rapport au milieu extracellulaire.
Mitochondrie (n.f.): Organite impliqué dans la conversion l'énergie de la cellule et produisant de l'ATP.
Mitose (n.f.): Phase de la vie du noyau d'une cellule marquée par le partage égal de l'information génétique, répliquée au cours de l'interphase précédente, entre 2 noyaux-fils. La mitose comprend 4 phases: prophase, métaphase, anaphase et télophase.
Molécule minérale (n.f.) : Molécule qui ne contient pas d'atome de carbone associé à des atomes d'hydrogène.
Molécule organique (n.f.): Molécule élaborée par les êtres vivants, formée généralement des éléments carbone et hydrogène et souvent d'oxygène et d'azote.
Monosomie (n.f.) : Anomalie génétique due à l'absence d'un chromosome dans une paire chromosomique.
Mutation (n.f.): Modification brusque et transmissible du matériel génétique. Affecte la séquence nucléotidique d'un gène (mutation génique) ou le nombre ou la forme des chromosomes (mutation chromosomique).
Mutation étendue (n.f.) : Mutation touchant un grand nombre de nucléotides de l'ADN.
Mutation faux-sens (n.f.): Mutation d'un gène qui a pour conséquence le remplacement d'un acide aminé par un autre dans la séquence d'acides aminés de la protéine correspondante.
Mutation non-sens (n.f.): Mutation d'un gène qui a pour conséquence l'apparition d'un codon stop au niveau de l'ARNm, et donc l'arrêt prématuré de la synthèse de la protéine correspondante.
Mutation ponctuelle (n.f.): Mutation touchant une base de l'ADN.
Mutation silencieuse (n.f.): Mutation d'un gène n'ayant aucune conséquence sur la séquence d'acides aminés de la protéine correspondante.
Non-disjonction (n.f.) : Absence de séparation des 2 chromosomes homologues lors de la l' division méiotique ou des chromatides des chromosomes lors de la 2' division méiotique.
Noyau (n.m.): En biologie, organite renfermant le programme génétique de la cellule eucaryote. En géologie, partie la plus interne de la Terre (2900 à 6400 km). Essentiellement composé de fer, le noyau externe est liquide, le noyau interne est solide.
Nucléotide (n.m.): Élément constitutif de la molécule d'ADN, formé de l'assemblage d'un sucre, d'un groupement phosphate et d'une base azotée. L'enchaînement des nucléotides au sein de la molécule d'ADN code l'information génétique.
Organisme génétiquement modifié (OGM, n.m.): Organisme dans lequel un gène appartenant à un autre organisme à été introduit par transgenèse.
Organite (n.m.): Élément contenu dans le cytoplasme d'une cellule eucaryote et limité par une ou des membranes (ex.: mitochondries, chloroplastes).
Parenté (n.f.) : Relatif aux liens entre différents organismes, même éloignés.
Paroi cellulaire (n.f.) : Structure de soutien élaborée par les cellules végétales et doublant la membrane plasmique à l'extérieur. Mise en place par la cellule elle-même, elle est constituée de fibres de cellulose enrobées dans un gel de polysaccharides hydraté.
Phase diploïde (n.f.): Phase du cycle de développement cellulaire comprenant les états ou les cellules sont diploïdes, c'est-à-dire contiennent 2 exemplaires de chacun des chromosomes.
Phase haploïde (n.f.): Phase du cycle de développement cellulaire comprenant les états ou les cellules sont haploïdes, c'est-à-dire contiennent 1 seul exemplaire de chacun des chromosomes.
Phénotype (n.m.): Ensemble des caractères qualitatifs ou quantitatifs d'un individu résultant de l'expression de son génotype et des interactions avec l'environnement. Il peut être décrit à différentes échelles (organisme, cellule, molécule) et s'exprime par l'intermédiaire des protéines.
Plan d'organisation (n.m.): Représentation de la disposition des différents éléments constitutifs d'un organisme (à toutes les échelles) les uns par rapport aux autres.
Pluricellulaire (adj.) : Désigne un organisme formé de plusieurs cellules.
Polarisation (n.m.): Opération qui consiste à déterminer les états primitifs et dérivés d'un caractère.
Polyallélisme (n.m.): Coexistence de plusieurs allèles d'un gène dans une population.
Polymorphisme génétique (n.m.): Coexistence de plusieurs allèles d'un gène dans une population, dont deux au moins sont présents dans plus de 1 % de cette population.
Population (n.f.): Ensemble d'individus de la même espèce occupant la même aire géographique et se reproduisant entre eux.
Prédisposition familiale (n.f.): Transmission dans une famille d'un allèle pouvant entraîner, à l'état homozygote, l'apparition d'une maladie.
Prédisposition génétique (n.f.): Présence de certains allèles qui augmentent le risque de survenue d'une maladie.
Procaryote (n.m. ou adj.): Organisme constitué de cellules non compartimentées, chez lequel le matériel génétique est libre dans le cytoplasme.
Programme génétique (n.m.): Ensemble des informations génétiques qui déterminent les caractères héréditaires d'un individu.
Protéine (n.f.): Macromolécule formée par une ou plusieurs chaînes polypeptidiques (polymère d'acides aminés) et caractérisée par une configuration tridimensionnelle active. Elle présente différents niveaux d'organisation: structure primaire (séquence d'acides aminés), structure secondaire, structure tertiaire, voire quaternaire.
Recombinaison homologue par crossing-over (n.f.): Échange d'allèles d'un même gène entre chromosomes homologues lors de la prophase de la première division de méiose.
Redondance (n.f): Propriété du code génétique par laquelle plusieurs codons de l'ARNrn peuvent correspondre à 'un même acide aminé.
Réplication (n.f.): Mécanisme par lequel la quantité d'AD N est doublée dans une cellule. Il est semi-conservatif: le brin d'ADN parental modèle est copié et conservé dans la nouvelle molécule d'ADN double brin
Reproduction sexuée (n.f.): Production d'un nouvel individu constituant une combinaison originale des allèles de ses parents.
Respiration cellulaire (n.f.): Dégradation complète de molécules organiques, qui s'accompagne d'un échange gazeux avec le milieu (absorption de dioxygène, dégagement de dioxyde de carbone).
Ribosome (n.m. : Structure intracellulaire constituée d'ARN ribosomal et de protéines, permettant, lors de la traduction, la formation de liaisons peptidiques entre les acides aminés, selon l'ordre défini par la séquence des codons de l'ARNm.
Sélection naturelle (n.f.): Au sein d'une population, phénomène par lequel certains organismes, de par leur génotype, laissent plus de descendants que d'autres.
Spécificité des enzymes (n.f.): Les enzymes sont spécifiques d'un substrat et d'un type de réaction sur ce substrat. La spécificité est liée aux caractéristiques de leur site actif (forme, acides aminés capables d'interagir avec le substrat).
Substitution (n.f..): Mutation consistant en un remplacement d'une base de l'ADN par une autre.
Test-cross (n.m.): Croisement d'un individu à tester avec un individu homozygote récessif pour les gènes étudiés, dans le but de révéler le génotype des gamètes de l'individu testé.
Tétrapode (n.m.): Vertébré possédant deux paires de membres locomoteurs de type chiridien rattachés à la colonne vertébrale par une pièce squelettique (membre monobasal). Les tétrapodes sont typiquement des vertébrés aériens.
Tissu (n.m.): Ensemble de cellules présentant des caractéristiques communes, qui participent à une même fonction.
Totipotence (n.f.); Capacité d'une cellule végétale méristématique à se différencier en n'importe quel type cellulaire. Presque toutes les cellules végétales sont ainsi capables de régénérer une plante entière.
Traduction (n.f.): Mécanisme permettant la formation d'une chaîne polypeptidique à partir de l'information génétique portée par l'ARNm.
Transcriptase inverse (n.f.): ADN polymérase présente chez les rétrovirus. Elle permet la synthèse d'un brin d'ADN complémentaire à partir d'un brin d'ARN. Le brin d'ADN peut permettre d'obtenir un brin d'ADN double brin.
Transcription (n.f.): Mécanisme permettant la formation d'un ARN, copie de la séquence du brin transcrit de l'ADN, grâce à l'ARN polymérase.
Transgenèse (n.f.): Transfert, naturel ou expérimental, d'un gène (ou transgène) d'un organisme à un autre.
Transgénique (adj.): Relatif à la transgenèse.
Transposition (n.f): Déplacement d'un fragment d'ADN au sein du génome grâce à des enzymes (les transposases).
Trisomie (n.f.): Anomalie génétique due à la présence d'un chromosome surnuméraire dans une paire chromosomique.
Unicellulaire (adj.): Désigne un organisme formé d'une seule cellule.
Vacuole (n.f.) : Organite particulièrement développé chez les végétaux. Contient des substances dissoutes ou des pigments.
Vertébré (n.m.): Animal pourvu, au stade adulte, d'un squelette interne cartilagineux ou osseux et qui comprend, dorsalement dans le plan de symétrie bilatérale, une succession de pièces (les vertèbres) assemblées en une colonne vertébrale.
Vieillissement (n.m.): Ensemble des phénomènes qui modifient la morphologie et la physiologie d'une manière qui, à brève ou longue échéance, conduit à la mort de l'organisme ou d'une partie de celui-ci.


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                 Comparaison des séquences d’acides aminés des globines alpha 

 

 

Comparaison des séquences d’acides aminés (données extraites du logiciel ‘’Evolmol’’)

 

 

séquences d’acides aminés  de la globine a de 7 « espèces »

(traitement/logiciel avec globine a humaine comme référence)

Homme

VLSPADKTNV

KAAWGKVGAH

AGEYGAEALE

RMFLSFPTTK

TYFPHFDLSH

GSAQVKGHG

Chimpanzé

VLSPADKTNV

KAAWGKVGAH

AGEYGAEALE

RMFLSFPTTK

TYFPHFDLSH

GSAQVKGHG

Gorille

VLSPADKTNV

KAAWGKVGAH

AGDYGAEALE

RMFLSFPTTK

TYFPHFDLSH

GSAQVKGHG

Orang Outang

VLSPADKTNV

KTAWGKVGAH

AGDYGAEALE

RMFLSFPTTK

TYFPHFDLSH

GSAQVKDHG

Macaque Rh.

VLSPADKSNV

KAAWGKVGGH

AGEYGAEALE

RMFLSFPTTK

TYFPHFDLSH

GSAQVKGHG

Tarsier de Bor.

VLSPADKTNV

KAAWDKVGGH

AGDYGAEALE

RMFLSFPTTK

TYFPHFDLSH

GSSQVKGHG

Chien

VLSPADKTNI

KSTWDKIGGH

AGDYGGEALD

RTFQSFPTTK

TYFPHFDLSP

GSAQVKAHG

Une protéine est une séquence ordonnée d’acides aminés (ordre déterminé par un gène) chaque lettre désigne conventionnellement un acide aminé

 

matrice des distances

% des différences (nb diff.X100/141) entre les séquences de globine a (tableau précédent)

plus les différences sont faibles plus l’ancêtre commun à 2 espèces est  proche (temps)

 

Homme

Chimpanzé

Gorille

Macaque Rh.

Orang Outang

Tarsier de B

Chien

Homme

0

 

 

 

 

 

 

Chimpanzé

0

0

 

 

 

 

 

Gorille

0.71

0.71

0

 

 

 

 

Macaque Rh.

2.84

2.84

3.55

0

 

 

 

Orang Outang

2.13

2.13

1.42

4.96

0

 

 

Tarsier de B

8.51

8.51

7.80

7.80

9.22

0

 

Chien

16.31

16.31

15.60

17.02

15.60

14.89

0

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


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Chromosomes \ ADN

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

            

 

 

A= Adénine

C = Cytosine

G=  Guanine

T= Thymine

U= Uracile (remplaçant de la thymine au niveau l’ARN)

 


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UFR DES SCIENCES DE L’HOMME

ET DE LA SOCIETE

  

 

Institut  Des Sciences Anthropologiques

de  Développement

 

 

 

 

LICENCE 1

 

 

UE : BIOANTHROPOLOGIE

EC2 : La Bioanthropologie

dans le système des sciences

 

 

 

 

 

 

 

Dr KOUAME Atta

Anthropologue biologiste  

Enseignant-chercheur  

Université Félix Houphouët Boigny 

  

  

  

Licence 1 Anthropologie 2012 - 2013

EC : LA BIOANTHROPOLOGIE DANS LE SYSTEME DES SCIENCES.

Responsable EC : Dr KOUAME Atta 

                                                            ISAD – département de Bioanthropologie

SYLLABUS  

I- Objectifs du cours 

1-      Objectif général 

Situer la Bioanthropologie  au sein des grandes familles des sciences et savoir son champ d’application et ses branches.

2-      Objectifs spécifiques 

A l’issue de l’enseignement, les étudiants doivent être capables de:

1-         Connaitre l’histoire  la bioanthropologie et les différentes ruptures épistémologiques qu’elle a connues dans sa constitution

2-                         situer la bioanthropologie dans le système des sciences et plus spécifiquement celui des sciences humaines

3-       Situer la bioanthropologie par rapport aux autres sciences anthropologiques

4-      définir les branches de la bioanthropologie et leurs champs d’application

5-      comprendre le caractère pluridisciplinaire et interdisciplinaire de la bioanthropologie

II-                  Pédagogie   

          L’EC  est  d’un volume horaire de 75 h dont 37 h de Cours (CM + TD) effectué par l’enseignant et 38 h consacrées  à l’étudiant pour des recherches personnelles en complément de l’EC.  Le Cours Magistral est d’un volume de 17 h et se fera à l’aide d’un support pédagogique (polycopies) et le TD est de 20 h par groupe. Pour le TD des thèmes d’exposé seront confiés aux étudiants constitués en sous-groupes de travail au sein des groupes de TD dont les effectifs sont fixés à 30 étudiants dans le système LMD. Le TD  contribue non seulement à la bonne compréhension du cours et élucide les zones d’ombre du CM, mais il permet également aux étudiants de participer de façon active au cours et les initie au mieux au travail personnel.  

          La présence au cours sera indispensable à la compréhension de l’EC car les étudiants sont appelés à prendre des notes malgré les polycopies.

 

III-                Contenu  

       Le cours présente l’évolution historique de la Bioanthropologie, son champ d’étude et ses branches. Montre les différentes ruptures épistémologiques et méthodologiques qu’elle a connu dans sa constitution. Situe cette discipline dans le système des sciences de la nature et de l’homme et montre ses rapports avec les autres disciplines anthropologiques.

IV-               Plan provisoire du Cours 

I-                    Histoire et constitution de la Bio anthropologie

A-     L’anthropologie physique : Histoire, Démarche, Missions et Limites

B-      Apport de la génétique, Ruptures épistémologiques et méthodologiques et  constitution de la Bioanthropologie

II-                   La Bioanthropologie  et les traditions universitaires

III-                La bioanthropologie dans la nomenclature  des sciences

A-     La Bioanthropologie et les sciences de la nature

B-      La Bioanthropologie et les sciences humaines

C-      La Bioanthropologie et les autres disciplines anthropologiques : champs et interdisciplinarité

VI-             LA BIOANTHROPOLOGIE AUJOURD’HUI : SON OBJET  ET SES

      BRANCHES. .

A-    Objet de la Bioanthropologie

a-      La variabilité humaine

Typologie de la variabilité humaine  

  • Polymorphisme morphologique
  • Polymorphisme des protéines
    • Polymorphisme enzymatique
    • Polymorphisme immunologique
  • Polymorphisme chromosomique
  • Polymorphisme épigénétique

Origine ou déterminisme des variations   

  • Déterminisme génétique
  • Méiose et crossing-over
  • Mutations

-          Les mutations géniques

-          Les mutations chromosomiques

-          Les modifications de la structure des chromosomes

  • Les migrations
    • Déterminisme épigénétique

 

   b-   De la biologie à la culture

B-    Les branches de la Bioanthropologie

a-      L’écologie humaine

b-      L’éthologie ou la biologie du comportement

c-      La génétique des populations humaine   

d-     La biologie humaine        

 

CONCLUSION

  

  

C-      Travaux dirigés : thèmes d’exposé 

D-     L’Anthropologie physique classique, démarche et limites

E-      De l’anthropologie physique classique  à la Bioanthropologie : les ruptures

F-      La Bioanthropologie et les sciences  du vivant.

G-     La Bioanthropologie et ses branches 

H-     La bianthropologie et les autres disciplines anthropologiques 

I-        La psychologie raciale

J-       Le concept de « race » et la Bioanthropologie aujourd’hui

K-      L’éthologie humaine

L-       La biologie humaine

M-   La génétique des populations humaine

N-     L’écologie humaine 

 

IV-               Contrôle des connaissances  

         Le contrôle des connaissances comprend une note de TD et une note d’examen. Les exposés traités par les étudiants pourraient compter  ¼ de la moyenne de l’EC.

 

 

                                  BIBLIOGRAPHIE  

Anne-Marie Guihard-Costa, Gilles Boëtsch, Alain Froment, António Guerci, Joëlle Robert-Lamblin, L'Homme et sa diversité Perspectives et enjeux de l'anthropologie biologique, CNRS Editions 2007

Albert JACQUARD, Eloge de la différence, la génétique et les hommes, éditions Seuil, 1978, 226 p.

Bertrand JORDAN, L’humanité au pluriel, la génétique et la question des races, éditions Seuil, 2008, 230 p.

Charles ROUX, L’hérédité, CASTERMAN, 1974, 168 p.

Charles SUSANNE, Esther REBATO, Brunettto CHARELLI, Anthropologie biologique, évolution et biologie humaine, De boeck, 2003, 763 p. 

E.E. EVANS-PRITCHARD, Anthropologie sociale, Petite Bibliothèque Payot, 1977, 177 p.  

Jacques RUFFIE, De la biologie à la culture, Flammarion, 1978, 594 p.

Jean CHALINE, Quoi de neuf depuis Darwin ? La théorie de l’évolution des espèces dans tous ses états, Ellipses, 2007, 480 p.

 

  

  

  

  

  

  

  

  

I-                   HISTOIRE ET CONSTITUTION DE LA BIO ANTHROPOLOGIE  

  

         La Science ne peut se constituer à travers une seule génération de chercheurs. Elle est le résultat d’une longue réfutation des problématiques et des théories grâce à laquelle la science se construit.  L’Anthropologie au sens  biologique du terme nommé Anthropologie biologique ou Bioanthropologie ou encore Anthropobiologie n’échappe pas à cette réalité scientifique. Elle s’est constituée au fil du temps à travers différents remaniements épistémologiques et méthodologiques. Connu d’abord sous le vocable d’Anthropologie physique dont  le champ se limitait à l’étude comparée des variations anatomiques et morphologiques de l’espèce humaine, cette discipline va peu à peu opérer  des ruptures nécessaires à sa constitution en tant que discipline étudiant l’homme dans sa totalité et sa variabilité biologiques au cours de son histoire évolutive et actuelle ; et les interactions qui existent entre les aspects biologiques et culturels humains.

 

A-    L’anthropologie physique : Histoire, démarche, missions et limites  

  

6-      Histoire   

  

       L’anthropologie physique est née au XVIIIe siècle. Les récits des explorateurs sur l’existence de peuples différents, ont incité les savants à réunir des observations scientifiques sur les peuples de la Terre. Ainsi l’anthropologie physique s’est d’abord essentiellement limitée à la description de la morphologie externe et la physionomie des individus vivants, avant d’intégrer plus tard l’étude des origines et de l’évolution de l’homme. La préoccupation principale des premiers anthropologues, le plus souvent issus de la médecine, de la biologie ou des sciences naturelles, fut d’étudier l’origine et l’évolution de l’homme, d’établir des classifications de l’espèce humaine sur la base du concept de « race », en s’appuyant sur les méthodes de l’anatomie comparée et des caractères morphologiques visibles.

    Sur le plan institutionnel, l’anthropologie se développe d’abord en dehors du cadre universitaire, au sein de sociétés savantes, fruits d’initiatives privées.

 

        Les caractères descriptifs seront donc la couleur de la peau, des yeux, la forme du cheveu, du nez, de la bouche, des oreilles, la taille, les volumes crânien et corporel … Ces différences caractères morphologiques vont permettre aux anthropologues de cette époque de faire une classification raciale des peuples du monde. A partir de la couleur de la peau, la forme du cheveu et du nez, ils vont distinguer trois grandes « races » : Blanche, Jaune et Noir.  A ces caractères morphologiques s’ajoutent parfois des caractères culturels. La « race » noire par exemple regrouperait les individus ayant une peau noire, des lèvres épaisses, des cheveux crépus, qui vivent à moitié nu dans la forêt ou la savane africaine, avec une langue, des coutumes, des croyances, une organisation tribale, et tout un mode de vie très éloigné de celui de l’occident (Europe).  Pour Carl LINNE (1707- 1778), l’espèce Homo sapiens pouvait se diviser en six (6) races différentes : sauvage, américaine, européenne, asiatique, africaine et monstrueuse. Si la première demeurait hypothétique et n’a jamais pu être repérée, il est question pour la dernière, d’une description purement pathologique qui pouvait se rencontrer n’importe où.  Pour COMTE DE BUFFON (1707- 1788), la variabilité des « races » humaines devait être expliquée par le fait qu’à partir de la race blanche originelle les types humains se sont trouvés diversifiés et modifiés suivant les climats. Pour  Johann F. BLUMENBACH (1752-1840), il existe cinq (5) « races » dans le monde. La  race caucasienne ou race blanche, la race mongole ou race jaune, la race malaise ou race marron, les nègres ou race noire, les américains ou race rouge. Les classifications récentes furent celle de VALLOIS qui comptait quatre « races » principales subdivisées en 25 « races » secondaires, celle de MONTANDON qui part de 5 troncs raciaux se découpant en 20 « races », celle de DENICKER qui part de la forme des cheveux comme caractère fondamental vers de caractères de plus en plus secondaires et identifia 29 groupes raciaux.  Ainsi les classifications se succédaient au fur et à mesure que les anthropologues de l’époque découvraient de nouveaux critères classificatoires basés sur des caractères morphologiques.  Mais jamais il y a eu d’accord sur une classification unique et longtemps il y eut autant de découpage racial que d’auteurs.  

 

        La découverte au XIXe siècle des premières preuves de l’existence d’hommes fossiles, différents des hommes actuels vient confirmer les idées d’évolution de l’espèce humaine combattues jusqu’à lors par les dogmes religieux et va donner un autre tournant à la recherche en Anthropologie physique. Dès lors elle s’inscrit dans un mouvement plus général qui, ramenant l’Homme au sein de la nature, lui fait perdre la position privilégiée qu’il occupait au sein de la Création dans la théologie chrétienne. BUFFON fut l’un de ceux dont les théories vont contre les conceptions religieuses de l’homme et le placent  au cœur du règne animal. Pour lui l’homme est semblable aux animaux par sa physiologie. Il existe autant de variétés d’hommes noirs que d’hommes blancs ; après plusieurs générations, un groupe d’hommes blancs dans un environnement particulier deviendrait noir ; il n’existe qu’une seule espèce humaine, et non plusieurs. Il en conclut que les variétés humaines sont issues d’une souche initiale qui s’est adaptée, selon les milieux qu'elles habitent. Ensuite vont suivre les idées d’autres scientifiques comme LINNE pour qui l’homo sapiens (homme) se trouve dans la même classe avec les singes dans l’ordre des anthropomorphes et des primates.

     Le grand mérite des précurseurs de l’anthropologie physique, Paul Pierre BROCA (1824- 1880) en France et   BLUMENBACH  en Allemagne fut de décrire des techniques d’observation valables aussi bien pour les hommes vivants que pour les squelettes et d’établir des parallèles anatomiques entre l’homme et les singes. La réelle découverte des primates se fait qu’au moment des colonisations et déjà en 1699 Edward TYSON (1650-1708) avait relevé des similitudes anatomiques entre un jeune chimpanzé mâle et un pygmée (homme).

Ainsi le siècle des lumières (XVIIIe siècle), témoin d’un bouillonnement scientifique et l’émergence des idées évolutionnistes de l’humanité et le darwinisme ensuite va donner une marque à l’anthropologie physique.  Il a fallu ensuite attendre l’apparition de la génétique, le remaniement nécessaire du darwinisme et l’apport des sérologistes pour voir en fin au milieu du XXe siècle la constitution de l’anthropologie physique actuelle ou l’anthropologie biologique au sens clair du terme. Une discipline qui ne se limite plus à une simple description des caractères morphologiques et anatomiques, mais qui intègre dans sa description à la fois les données phénotypiques et génotypiques de l’humain, s’efforce d’analyser les variations observées dans le but de les interpréter à la lueur de critères scientifiques admis.

 

7-      La démarche 

  

        La démarche consistait donc à observer, décrire et classer les caractères morphologiques et anatomiques humains.  Cette démarche avait pour seul but de prouver la supériorité de certains peuples sur d’autres  et de conforter scientifiquement les idéologies sociales opposant les « sauvages » aux « civilisés ». Il s’agissait de trouver des critères de classification permettant d’identifier des groupes raciaux. Le terme de « race » va donc dominer le vocabulaire de cette anthropologie.  L’apport de la génétique, l’hématologie, la sérologie, a permis la découverte de différences phénotypiques et génotypiques au sein de l’espèce humaine et au sein d’une même population culturellement définie.  Les critères de départ de classification des peuples sont donc révolus. Les fondements méthodologiques de l’anthropologie physique actuelle sont donc l’observation, l’analyse et l’interprétation dans un but de compréhension et non de classification raciale et de domination. La variabilité intra- populationnelle intéresse plus l’anthropologie aujourd’hui que la variabilité entre des populations distinctes.   

 

8-      Ses missions et ses limites  

  

        Les récits des premiers explorateurs sur la découverte de peuples barbares vont consigner à l’anthropologie physique, en ses débuts, la mission à fournir les preuves scientifiques aux idéologies colonialistes et racistes. Sa mission première sera donc d’opposer les peuples « sauvages » aux peuples « civilisés » dans un but de domination de l’occident sur le reste du monde. Pour BUFFON la zone tempérée (l’occident) sera le centre de l’humanité d’où est partir le modèle originel humain auquel il faut rapporter toutes les autres nuances de couleur et de beauté qui varient au fur et à mesure qu’on s’éloigne de cette zone. Ce sont donc les causes accidentelles qui font varier les nations qui peuplent la terre creusant ainsi l’écart entre l’Europe civilisée et le monde sauvage. L’Europe par le progrès qu’elle connait, se doit donc de convaincre les sauvages de réintégrer la nature de l’homme. BROCA intéressé par l’anatomie du crane et du cerveau et la capacité mentale et l’intelligence part de l’idée que la petitesse du cerveau constitue un caractère d’infériorité caractéristique des peuples « primitifs ». Il finit par soutenir que « la capacité crânienne des nègres de l’Afrique occidentale (1372,12 cm3) est inférieur d’environ 100 cm3 de celles des « races » d’Europe ». Le plus radical des intellectuels de l’époque qui affirme ouvertement la supériorité de la « race » blanche (la « race » aryenne) fut Joseph Arthur GOBINEAU (1816-1882) dans son ouvrage Essai sur l’inégalité des races humaine. Ecrivain et diplomate, il s’érige parfois en anthropologue et part du principe que la valeur d’une « race » se juge à sa capacité de créer une civilisation originale. Toutes les civilisations européennes, à l’exception de l’assyrienne, seraient nées dans des populations plus ou moins appartenant à la « race » aryenne (groupe humain parlant des dialectes indogermaniques).  Tous les peuples qui, a un moment ou à un autre de leur histoire, ont été dominateurs, ont du sang aryen. Il développa des idées racistes et s’élève contre le métissage qui en diluerait les qualités biologiques de la « race » aryenne. GOBINEAU s’élevait contre toute forme de métissage donc contre les mariages interraciaux spécifiquement le mariage entre individu de la race aryenne et individu d’autres « races ». Pour lui de telle union risque de diluer la race aryenne « supérieur » et d’aboutir à sa disparition sous l’effet du métissage.  Ce discours va jusqu’à prôner l’eugénisme comme seul moyen efficace de préserver la race pure blanche. Ainsi devait être interdites les unions interraciales et l’élimination des gènes étrangers déjà introduits dans les races supérieurs par le fait des métissages qui ont déjà eu lieu. 

 

      Tout le raisonnement sur lequel se fondait la classification raciale en prônant le racisme et la supériorité de la race blanche est scientifiquement intenable. Il s’agit d’un jugement de valeur et les critères que les anthropologues tentaient donc de produire pour  soutenir ce raisonnement sont assez limités et subjectifs.  Première parce qu’il existe des dizaines de milliers de marqueurs morphologiques et génétiques qui nous différencient et qui font de chaque personne un individu unique en son genre ; et il serait irraisonnable de se limiter à un nombre assez limité de caractères pour classer les peuples. Dans notre  espèce, les races biologiques n’existent pas. C’est par une ségrégation volontaire (eugénisme) que l’on pourrait créer des races humaines comme cela  se passerait chez les animaux domestiques, mais ces races pures, artificielles, seraient fragiles et de faible valeur biologique. Deuxièmement il n’y a pas de groupe humain biologiquement supérieur ou inférieur. Pour des raisons historiques, quelques populations se sont développées plus vite que d’autres et ont disposé tôt d’acquis technologiques et culturels qui leur ont conféré une certaine puissance. Dans le vieux monde c’est au Proche-Orient que un certain nombre de plantes et d’animaux ont été facilement domestiqués ce qui a favorisé le développement rapide de l’agriculture et de l’élevage, ce fut la révolution néolithique. Les conditions climatiques de cette zone (climat tempéré), habitée par les Blancs, ont été favorables au peuplement car peu d’agressivité pathologique (climat défavorable aux hôtes vecteurs des parasitoses et viroses). Les zones tropicales des Noirs du néolithique n’avaient pas ces mêmes conditions écologiques. Elles sont au contraire favorables aux  parasites responsables des maladies infectieuses et virales. Ces avantages purement écologiques et culturels n’ont rien d’innés, ils sont du au hasard et acquis.

 

 

 

 

 

B-     Apport de la génétique, Ruptures épistémologiques et méthodologiques et constitution de la Bioanthropologie  

 

           Les données de la science répondent à des critères objectifs et donc indiscutables (sujet à interprétations diverses). La confusion qui régna de tout temps autour de la classification des « races » humaines  jette le doute sur la valeur réelle du concept racial.

 

       La génétique moderne a permis de s’apercevoir que les différences biologiques entre les populations humaines ne pouvaient être considérées comme absolues et surtout que la hiérarchie que l’on se plaisait d’établir entre les différents peuples ne pouvait avoir aucune justification scientifique. Toute l’humanité possède un même patrimoine héréditaire commun. Le concept de race est fondé sur la variabilité de quelques gènes parmi les dizaines de milliers que comptent les chromosomes humains. Certains de ces gènes commandent les propriétés sérologiques du sang (cf. HEMOTYPOLOGIE), ce qui a permis d’individualiser certains groupes humains.  Mais une classification fondée sur un aussi petit nombre de gènes ne saurait avoir une portée générale. Il existe tellement une diversité de gènes responsables d’un immense  polymorphisme génétique qu’une fraction infime de celui-ci ne saurait servir de critère de classification des peuples du monde. Chaque individu est génétiquement unique en son genre à l’exception des vrais jumeaux qui se ressemblent. Et à partir de critères génétiques arrêtés on pourrait identifier des personnes de cultures et de sociétés différentes appartenant à un même groupe génétique. Les critères de classification raciale sont donc insuffisants pour délimiter des populations. 

 

       Pendant longtemps donc, l'anthropologie physique des populations actuelles a fondée ses conclusions sur la variabilité de quelques caractères biologiques et génétiques parmi les milliers que compte l’humain. Des milliers d'unités d'observation anthropométriques ou anthroposcopiques  furent inventées, utilisées, compilées et comparées. Chaque population (comme chaque individu) s'avérait originale mais on scrutait les ressemblances et les différences relatives afin de réduire cette variabilité en modèles intelligibles. On négligea ensuite des caractères à hérédité complexe au profit d'observations à base génétique plus simple (groupes sanguins, groupes sériques, etc.). Toutefois, on soumettait ces dernières à une méthode d'analyse relativement semblable à celle utilisée auparavant pour l'étude des caractères à hérédité complexe et on aboutissait à des conclusions d'apparentement génétique (les conclusions basées sur l'analyse morphologique révélaient aussi, mais de manière plus confuse, des apparentements génétiques).

         En anthropologie physique et dans de nombreuses autres spécialités de l'anthropologie, c'est entre 1950 et 1960 qu'on note une réorientation épistémologique et méthodologique fondamentale. Les attributs ne consistent plus en de simples « marqueurs » indépendants des processus biologiques, mais on s'attarde sur ces processus qu'il importe d'analyser. La question prédominante devient : comment interpréter les ressemblances et les différences, que signifie chacun des attributs relevés ?

 

La science n'existe que si les objets qu'elle étudie sont déterminés et se prêtent à une analyse des chaînes déterminantes précises. Déjà marquée par une recherche d'objets génétiques, l'anthropologie physique se caractérisera de plus en plus, à partir de 1960, par une recherche des facteurs de la variabilité génétique. Ces facteurs, connus depuis longtemps (métissage, dérive génétique, mutation, sélection), n'agissent toutefois que par l'intermédiaire des comportements. Puisque l'anthropologue physique tâche de qualifier précisément les chaînes déterminantes, il doit aussi intégrer son objet à une anthropologie globale. Les idées politiques, les systèmes de valeur, les moyens de transport, l'isolement, les systèmes de parenté, la langue, le type d'économie (urbaine, paysanne, d'autosubsistance, etc.), la religion et les normes conscientes ou inconscientes de comportement peuvent avoir des conséquences importantes et diversifiantes dans des milieux donnés.

         Comme la paléontologie s'associait à la préhistoire et à l'écologie pour analyser les systèmes relationnels des hominidés, de même l'anthropologie physique actuelle ou la bioanthropologie s'associe-t-elle à l'ethnologie et à l'écologie pour analyser les populations actuelles.

 

En plus le développement de la biométrie et l'accessibilité aux ordinateurs ont, au point de vue méthodologique, influencé toutes les sciences biologiques. En effet, alors que les grandes conclusions de l'anthropologie physique classique relevaient en bonne partie d'une intuition guidée par l'expérience et la manipulation, il est maintenant indispensable d'appuyer son argumentation sur des calculs qui estiment le degré de validité des prémisses. L'interprétation n'est pas automatiquement confirmée au moyen de ces formules, mais on peut plus facilement la critiquer à partir du moment où on peut mieux mesurer la force relative de ses composantes. Ce développement méthodologique a favorisé l'analyse en profondeur de la variabilité biologique par la mesure de l'influence des divers facteurs qui interviennent dans la création, le maintien ou la disparition des écarts significatifs. Il a également, en bonne partie, provoqué la remise en question du concept de race en confrontant l'anthropologie à un apparent problème de logique.

 

En effet, la comparaison quantitative d'un grand nombre d'échantillons permet de mesurer en toute probabilité leurs écarts à un niveau multivarié », c'est-à-dire en tenant compte simultanément de l'ensemble des paramètres. Or, l'analyse de ces écarts (ou distances probables) défie toute classification logique. Le principe de base d'une classification consiste dans le regroupement d'échantillons qui se ressemblent plus entre eux qu'ils ne ressemblent à d'autres échantillons analysés pour les mêmes caractères. Par définition, la classification est exclusive. La raciologie classique confirmait l'intuition générale et reconnaissait l'existence des races, c'est-à-dire des ensembles d'échantillons qui dénotaient des ressemblances réciproques plus marquées qu'avec d'autres échantillons. Cependant, un examen plus approfondi nous amène à constater que cette discontinuité entre les divers ensembles apparaît comme une affirmation gratuite. Les échantillons ne se présentent pas comme des ensembles discontinus, mais décrivent une variabilité si continue qu'il est pratiquement impossible de regrouper plus de 3 ou 4 échantillons en un même ensemble. Si on en regroupe plus, on fait une brèche dans la logique et on associe, à l'intérieur d'un même groupe, des populations dont les différences réciproques sont plus prononcées que celles existant entre l'une de celles-ci et une autre appartenant à un autre ensemble. Il devient dès lors extrêmement difficile de parler de races, à moins d'admettre une classification qui comprendra des centaines de races ! Dans ce dernier cas, la classification, qui n'est, somme toute, qu'un outil facilitant l'intelligibilité du réel, deviendra inutile.

 

          Cela revient-il à nier l'existence des « races »? Plusieurs anthropologues pensent ainsi. Pourquoi conserver un concept populaire qui, s'il correspondait naguère à une vision du monde particulière, ne s'accorde plus avec une perception scientifique du réel ? Mais certains anthropologues ne sont pas prêts à abandonner radicalement le contenu de ce concept et entretiennent un débat peut-être sans issue.  De plus en plus le terme de population est utilisé par les anthropologues et les généticiens pour remplacer celui de « race ». La race étant admise pour identifier un groupe d’animaux (chien par exemple) génétiquement déterminé.

 

II-                LA BIOANTHROPOLOGIE  ET LES TRADITIONS UNIVERSITAIRES  

  

       Situé la Bioanthropologie dans les traditions universitaires amène à présenter l’organisation des disciplines anthropologiques selon les systèmes académiques anglo-saxon et francophone. Quand on parle d’anthropologie tout coup - qui signifie pour nous l’étude de l’homme dans sa totalité (biologique et culturelle) - pour le profane et parfois même pour les gens avertis, il s’agirait d’anthropologie sociale. On ignore donc que la nature de l’homme vient avant sa culture. Sans le bios le culturel ne serait pas. Le terme anthropologie désigne de façon générale l’ensemble des disciplines qui étudient l’homme dans sa totalité, son histoire évolutive, son unicité et sa variabilité. Les disciplines qu’elle regroupe sont différemment reparties selon qu’on se trouve dans le système anglo-saxon ou Francophone. Dans les universités anglo-saxonnes, l’anthropologie regroupe donc quatre domaines : l’anthropologie physique, l’archéoanthropologie, l’anthropologie linguistique et l’anthropologie sociale et culturelle. Dans les universités nord américaines (USA, CANADA), ce découpage académique révisé donne la paléoanthropologie, l’anthropologie biologique, l’archéologie et l’anthropologie sociale. Ces disciplines sont regroupées généralement dans une même institution de formation et de recherche. Alors que les universités françaises, on se limite généralement à l’anthropologie physique encore nommée anthropologie biologique qui regroupe la paléontologie humaine, la génétique des populations et la biologie humaine des populations actuelles ; et l’anthropologie sociale connue encore sous le nom d’ethnologie. Si la première est généralement rattachée aux filières de médecine ou de biologie la seconde se retrouve dans les facultés des sciences humaines et sociales.  L’archéologie se loge généralement dans le département d’histoire et s’affirme difficilement comme une discipline autonome.

 

         L’anthropologie physique ou anthropologie biologique constitue dans le système français une discipline autonome qui s’occupe à la fois de l’étude de l’histoire évolutive humaine (paléontologie humaine), de la génétique et de la biologie des populations humaines actuelles. Alors que dans le système nord américain, quand on parle d’anthropologie biologique il s’agira uniquement de l’étude bioculturelle des populations actuelles. La paléontologie humaine est une discipline sœur autonome connue sous l’appellation de paléoanthropologie.   

         

Le terme anthropologie sociale est utilisé en Angleterre et, dans une certaine mesure, aux États-Unis, pour désigner une certaine branche de l'anthropologie qui est l'étude de l'homme sous  différents aspects. Son étude porte sur les sociétés et les cultures humaines. En Europe, la  terminologie est différente : quand on parle d'An­thro­po­logie (qui pour nous signifie l'étude de  l'homme dans son ensemble), on se réfère à ce qu’on appelle en Angleterre l'anthropologie  physique, c'est-à-dire l'étude biologique de l'homme. Ce que les Anglais appellent anthropologie  sociale, porte, en Europe, le nom d'ethnologie ou de sociologie (E.E. EVANS-PRITCHARD, 1977).

 

         Même en Angleterre, l'expression anthropologie sociale n'a pris son sens actuel que plus tard.  On  a enseigné cette matière sous le nom d'anthropologie ou d'ethnologie, depuis 1884 à Oxford,  depuis 1900 à Cambridge et depuis 1908 à Londres la première chaire universitaire qui porta le  nom d'anthropologie sociale fut celle de Sir James Frazer à Liverpool en 1908. Comme elle est  l'une des branches du vaste sujet que représente l'anthropologie, on l'enseigne souvent conjointement avec les autres branches : anthropologie physique, ethnologie, archéo­logie préhistorique et parfois linguistique et géographie humaine (E.E. EVANS-PRITCHARD, 1977).

 

Le programme des cours d'anthropologie dans les traditions universitaires pourrait être représenté par trois cercles intersectés figurant respectivement les études de biologie, d'histoire et de sociologie ; les intersections représenteraient alors l'anthropologie physique, l'ethno­logie (comprenant elle--même l'archéologie préhistorique et la technologie compa­rée), et l'anthropologie sociale. Bien que l'homme constitue un sujet d'étude commun à ces trois disciplines anthropologiques, elles n'en ont pas moins, comme nous l'avons vu, des buts et des méthodes très différents (E.E. EVANS-PRITCHARD, 1977).

 

III-             LA BIOANTHROPOLOGIE DANS LA NOMENCLATURE  DES SCIENCES  

  

     Situé la bioanthropologie par rapport aux autres sciences c’est non seulement la classer parmi ces sciences mais également situer sa démarche par rapport à celles de ces sciences et l’interconnexion qui existe entre elles.

 

A-    La Bioanthropologie et les sciences de la nature  

         

      La bioanthropologie ou l’anthropologie physique a été d’abord l’affaire de  spécialistes des sciences du vivant (médecins  anatomistes, biologistes naturalistes). Elle l’a été d’autant plus qu’elle à porté sur le biologique avant d’intégré le culturel.  BUFFON définit dans son Traité des variations de l'espèce humaine (1749) l'« Anthropologie  physique» comme l'équivalent de l’« Histoire naturelle de l'Homme ». DIDEROT  propose en 1751 une définition plus étroite en faisant de l’anthropologie un équivalent de l’anatomie. Si le périmètre de l’anthropologie et sa position vis-à-vis de disciplines voisines demeurent flous au cours du XIX siècle, elle reste considérée comme une discipline des sciences naturelles. Elle épouse le paradigme naturaliste qui  proclame que le statut d’un groupe humain, comme l’ordre du monde qui le fait tel, est programmé de l’intérieur de la matière vivante. Tout en cherchant à étudier l’origine et l’évolution de l’homme ; et à établir des classifications de l’espèce humaine, elle s’est appuyée sur les méthodes de l’anatomie comparée et d’observation des sciences naturelles. Aujourd’hui encore l’anthropologie biologique demeure fortement liée aux sciences du vivant et de la nature. Elle  est en interconnexion avec l’écologie, la génétique, la biologie, d’où elle tire ses spécialités. Dans sa démarche, elle a très souvent recours aux méthodes et techniques de ces disciplines.  De ce point de vue elle se trouve à l’interface des sciences du vivant et des sciences de l’homme. Si l’anthropologie a connu une révolution épistémologique considérable et salutaire c’est grâce aux apports de la génétique et les autres domaines de la biologie.  Elle étudie de même la position systématique du genre homo et de l’espèce homo sapiens, son origine, sa relation avec les autres primates, son anatomie, sa physiologie, et même ses aspects pathologiques et psychologiques. De ce point de vue elle se positionne parmi les sciences biologiques avec lesquelles, elle partage des domaines et s’inspire parfois de leurs méthodes. Ce qu’elles ont de plus en commun c’est qu’elles procèdent toutes de la même démarche hypothético-déductive de vérification.

 

         L’homme étant le sujet qu’étude de la bioanthropologie, elle ne peut le faire en séparant de celui-ci, la culture et le social qui le conditionnent. La bioanthropologie dans ce cas a un rapport avec les disciplines qui étudient la condition socioculturelle de l’homme.

 

 

 

B-    La bioanthropologie et les sciences humaines   

  

       Dans l’histoire évolutive de l’homme, l’évolution biologique s’amenuise au fur et à mesure que se développe le patrimoine culturel. Par exemple l’homme est le seul être qui ait domestiqué le feu ; or des aliments cuits ont une influence indirecte sur la morphologie faciale : mâchoires et dents n’ont plus besoin d’être aussi puissantes. De même, les conditions de la vie moderne et les progrès techniques jouent un rôle sur notre devenir biologique. De ce point de vue l’anthropologie biologique ne peut étudier la condition biologique de l’homme en se passant de sa condition sociale. Elle se classe donc parmi les sciences humaines en abordant les caractéristiques sociales de l’humanité, les modifications profondes des milieux naturels de l’homme, la production des cultures humaines, et elle peut également constituer une synthèse sous forme d’un discours qui se veut philosophique. L’action de l’homme sur son environnement écologique grâce à sa production culturelle (outils sophistiqués, techniques culturales) et l’intelligence de leur utilisation influence fortement les conditions biologiques de vie (maladies liée aux conditions du milieu, famine,…).  Sans donc une approche dans le sens des sciences humaines, la Bioanthropologie ne peut articuler pertinemment les rapports entre les conditions culturelles et biologiques de l’homme. De ce point de vue elle aborde non seulement des aspects sociaux de l’homme mais encore elle doit s’inspirer de la démarche des sciences humaines. Elle doit donc se situer comme une science holistique en considérant les savoirs des autres sciences humaines. On ne peut faire de la bioanthroplogie en ignorant les données culturelles ou sociologiques lien à la condition humaine. On ne peut par exemple étudier la distribution d’un gène dans une population donnée sans tenir compte des relations matrimoniales dans cette population et les valeurs qui soutendent les unions croissance. De même on ne peut étudier la croissance d’un groupe d’adolescent sans tenir compte de leur habitude alimentaire. Ces données qui conditionnent ces caractéristiques biologiques sont du domaine de la culture. L’anthropologie biologique se trouvent donc à l’interface du biologique et du culturel  et peut se classer parmi les sciences humaines.

 

 

 

 

C-    La Bioanthropologie et les autres disciplines anthropologiques : champs et interdisciplinarité  

  

           De l’articulation donc des pôles théoriques de l’humain, biologie/culture, présent/passé, unité/variabilité, découle les quatre disciplines anthropologiques : paléoanthropologie, anthropologie biologique, archéologie et anthropologie sociale.

 

     Schéma des champs disciplinaires de l’anthropologie 

 

                                                   Biologie                          unicité

 

 

       PALEOANTHROPOLOGIE                                       BIOANTHROPOLOGIE

 

 

 

 

HOMME

 

    Passé                                                                                              Présent

 

 

ARCHEOLOGIE                                                    SOCIOANTHROPOLOGIE

 

 

 

                      Variabilité                  Culture

 

        La PALEOANTHROPOLOGIE a pour champs d’étude la diversité et l’unité de la biologie humaine au cours de l’histoire évolutive humaine, dans ses descriptions morphologique, biométrique, génétique et comportementale  et ses analyses environnementales.   

      La BIOANTHROPOLOGIE est situé à l’interface du biologique et du culturel et de leurs interactions. Elle a pour champ d’étude l’unité et la variabilité biologique humaine actuelle. Elle englobe dans ce champ les analyses génétiques, sociobiologiques du comportement humain (éthologie) et les rapports complexes qui lient l’homme biologique aux composantes de son écosystème (écologie humaine).

L’ARCHEOLOGIE porte sur les traces de la culture matérielle de l’homme produite au cours de son histoire évolutive. Elle veut reconstitue cette culture en se présentant comme l’étude de l’unité et de la variabilité culturelle humaine et ses analyses dans l’ordre synchronique et diachronique des processus de transformation.

La SOCIOANTHROPOLOGIE ou ETHNOLOGIE porte sur la problématique de l’unité et de la variabilité socioculturelles des sociétés contemporaines. Elle analyse, le comportement social, généralement sous ses formes institu­tion­nalisées telles que la famille, les systèmes de parenté, l'organisation politique, les modes de procédure légale, les cultes religieux, etc., et les relations existant entre ces diverses institutions; elle les étudie soit dans les sociétés contemporaines, soit dans les sociétés historiques pour lesquelles il existe suffisamment  d'informations dignes de foi permettant de procéder à ces études.

 

          Une étude l’anthropologie biologique ne peut se concevoir sans une collaboration de nombreuses disciplines telle que l’anthropologie culturelle, l’ethnographie, la linguistique, l’archéologie, la géographie humaine, l’écologie humaine, la biologie moléculaire, la génétique, … L’anthropologie biologique, l’anthropologie culturelle, la paléoanthropologie et l’archéologie sont des disciplines parallèles même si elles sont séparées par des cultures scientifiques différentes. L’humain a une double nature : la première biologique, renvoie à son appartenance au monde animal. La deuxième culturelle, dont l’apprentissage dans la régulation des comportements fait référence à son aspect proprement humain. Biologie et culture sont deux dimensions de l’humain qu’il n’y a pas lieu de séparer dans les études anthropologiques.

 

      Il est évident que l'évolution de l'homme ne peut être limitée à celle de son corps et que les outils comme les racloirs, les gouges, les foyers, les habitations, etc., apparaissent comme des prolongements nécessaires de son organisme, destinés à satisfaire des besoins que le corps lui-même n'arrive pas à combler. Sans eux, l'hominisation devient difficilement intelligible et la paléontologie humaine ne saurait donc se limiter à une simple description des dents ou des ossements car leur signification totale se dégage uniquement en conjonction avec les autres mécanismes d'adaptation relevés par l'archéologue.

 

         L'étude des rétroactions déterminantes entre le milieu, l'organisme, ses outils et ses comportements techniques et sociaux (système relationnel) devient donc le sujet d'attention fondamental et, dans ces conditions, la paléontologie humaine se transforme en véritable paléoanthropologie.

 

Les fouilles fournissent simultanément des documents au paléontologiste et à l'archéologue et, malgré la division académique des deux disciplines depuis un siècle, ces données n'ont toujours représenté que deux facettes des mêmes archives.

À partir du moment où on découvre de nouveaux problèmes et où on s'interroge sur le dynamisme des relations évolutives, sur leurs déterminismes et leur signification, on doit cependant réviser les anciens programmes qui sépare notre bio-évolution des déterminismes cultures qui lui donne forme. La paléontologie humaine ne peut plus se résumer en une vaste érudition et s'il importe encore autant de connaître les faits, il faut également se rendre compte que ces faits ne prennent un sens qu'en étant ordonnés en fonction de leur signification globale. Les seules séquences de crânes nous apprennent relativement peu de choses sur le phénomène humain sinon que l'homme s'est transformé au cours du temps grâce à l’acquisition de nouvelles techniques que seule la collaboration entre paléontologie et archéologie permet de rendre compte.

 

          Ces séquences purement phénotypiques (limitées aux apparences) sont presque exclues des contextes biologique et culturel ; et la plupart des anciens manuels de paléontologie (avant 1960) ont consacré peu d'espace aux déterminismes évolutifs, se contentant de décrire des inventaires d'ossements, de rédiger une géographie de ces inventaires et de les placer en ordre chronologique.

 

        C'est grâce à ces milliers d'heures passées à la description des fossiles, à leur classement géographique et chronologique que nous pouvons aujourd'hui aborder de nouveaux problèmes et insérer la paléontologie au sein du cadre plus vaste d'une véritable biologie évolutive. Les nouvelles tendances de la paléontologie humaine, stimulées par les recherches sur le terrain en primatologie (commencées vers 1960) et par le changement d'orientation méthodologique de l'archéologie (amorcé vers 1960), reprennent le problème de la nature de l'homme et de sa culture.

 

 

 

VII-           LA BIOANTHROPOLOGIE AUJOURD’HUI : SON OBJET  ET SES 

      BRANCHES. .

  

C-    Objet de la Bioanthropologie  

  

          La Bioanthropologie   peut se définir de nos jours comme la science de la variabilité humaine. Elle tente d’établir également les rapports entre la biologie et la culture d’une part et entre l’homme et son environnement naturel d’autre part à travers bien sûr ses différentes branches ou sous-disciplines

  

b-     La variabilité humaine 

 

         Les quelques milliards d'individus qui peuplent notre planète peuvent être classés en groupes selon différents critères ethniques, géographiques, sociologiques ou ... biologiques.

        Les caractères biologiques définissant ces groupes sont identifiables et leur expression visible constitue le phénotype. Ils sont déterminés par des gènes qui sont des segments d'ADN répartis le long des chromosomes. L'ensemble des gènes - le génome - qui gouverne l'expression du phénotype constitue le génotype

 

        Si le phénotype est facilement perceptible et peut même être artificiellement modifié, le génotype est beaucoup plus difficile à analyser. Il faut connaître la localisation du gène (le locus) dans le génome, identifier sa structure, c'est-à-dire la séquence des bases sur le segment d'ADN qui le constitue et vérifier sa fonction ; c'est le domaine de la "biologie moléculaire". Les gènes codant les marqueurs des groupes sont, comme tous les gènes, transmis par les parents et leur expression phénotypique obéit aux lois de l'hérédité.

        Ces marqueurs déterminent la variabilité de l’humain encore appelé polymorphisme. Ce polymorphisme chez l’humain va concerner à la fois les formes phénotypiques (caractères visibles) et génotypiques (non visible : gènes). Ce polymorphisme phénotypique et génotypique chez l’humain peut provenir de diverses origines : mutations géniques au niveau des cellules sexuelles suivies d’hérédité, migration, milieu (déterminisme épigénétique).   

 

 

 

  • Typologie de la variabilité humaine

 

      Il existe une grande homogénéité de l’espèce humaine ; les ADN de deux êtres humains pris au hasard parmi les six milliards que compte notre planète sont identiques à 99,9% (Bertrand JORDAN, p.54). Il existe tout de même une différence entre les individus qui est l’ordre de 0,1%. Cette divergence n’est pas tout de même négligeable car elle porte sur un écart de trois millions de bases d’ADN et constitue le point focal de la variation génétique entre les individus à l’exception des jumeaux homozygotes. C’est donc sur les 0,1% de différence que porte la diversité génétique humaine. A cette variation induite par nos gènes, il existe une autre se situant au niveau phénotypique, induite par le milieu (déterminisme épigénétique).  A part donc les vrais jumeaux, nous sommes tous génétiquement distincts, et chacun des individus de notre planète porte un assortiment de gènes absolument unique qui n’a jamais existé auparavant et qui n’adviendra jamais plus. L’individu tout en ressemblant à ces parents est nettement différent. Tous égaux, tous différents. A force de s’interféconder, l’humanité n’a pu engendrer un être « moyen » standardisé, mais au contraire une infinie variété de types distincts.

Ainsi ont peut déterminer différents types de variation ou polymorphisme chez l’humain. 

  • Polymorphisme morphologique

C'est le polymorphisme de taille, de forme, de couleur etc. Chez l'homme, un grand nombre de caractères morphologiques sont polymorphes, avec des fréquences élevées des différentes formes. C'est le cas de la couleur des yeux ou de la peau, de la forme des oreilles. La variabilité de la couleur de la peau est le caractère le plus visible chez l’humain.  Cette variation  de la couleur de la peau est sous le contrôle de six gènes principaux entre lesquels existent des relations d'épistasie.

  • Polymorphisme des protéines

        

  • Polymorphisme enzymatique

     Depuis les années 1960, la variabilité des protéines est étudiée par électrophorèse. Les protéines sont des molécules chargées qui se déplacent dans un support poreux (gel d’agarose, d’amidon, de polyacrylamide, d'acétate de cellulose) lorsque celui-ci est soumis à un champ électrique.

 

      La vitesse de migration dépend de la charge globale de la protéine, de sa taille et de sa conformation. Toute mutation dans la séquence d'un gène codant pour une protéine peut modifier le sens d'un codon, altérer la séquence d'acides aminés donc la charge électrique de la protéine et sa vitesse de migration. Ce changement de structure primaire peut être détecté par électrophorèse qui sépare les variants protéiques ayant des vitesses de migration différentes appelées souvent F (fast) et S (slow).

 

       La mise en évidence de différents allèles d'un même gène est possible pour les enzymes grâce à la spécificité de la réaction enzyme-substrat visualisée par une réaction colorée. L'existence de variations génétiques à un locus donné est détectée par la présence de différents niveaux de migration dans le gel d'électrophorèse, qui sont associés à des allèles différents appelés allozymes.

       

       L'étude d'un lot d'individus permet d'identifier les génotypes individuels à plusieurs loci lorsque les enzymes ont des niveaux de migration différents. Les allèles sont en effet codominants et chaque individu est caractérisé par la position et le nombre de bandes pour chaque locus étudié. Pour une enzyme monomérique, les homozygotes seront caractérisés par une seule bande alors que les hétérozygotes présenteront 2 bandes. Pour les enzymes plus complexes (dimères, tétramères), le nombre de bandes se multiplie et la lecture des gels d'électrophorèses devient plus difficile.

  • Polymorphisme immunologique

        Chez l’homme, le polymorphisme immunologique le plus étudié est celui des antigènes présents à la surface des globules rouges dont les plus connus sont le système ABO, le système rhésus (allèle Rh+ dominant sur Rh–), le système MN (M et N codominants).


Pour le système ABO, les allèles A et B sont codominants entre eux et tous les deux dominants sur l'allèle O. De fortes variations géographiques existent pour les fréquences des allèles du système ABO à l'échelle des continents.

 

    Le système ABO donne six phénotypes différents A1, A2, B,  A1B,  A2B et O.  Le système LEWIS constitué de substances hydrosolubles qui se fixent secondairement sur les antigènes AB et H en leur ajoutant de nouvelles spécificités Le(a) et Le(b). L’on distingue trois phénotypes Lewis : Le (a+b-), Le (a-b+), Le (a-b-). Le système rhésus (Rh+ Rh-) avec des spécificités dont les 5 anticorps anti D, C, E, c et e permettent de déterminer le phénotype Rhésus. Les phénotypes le plus fréquemment rencontrés sont: DCce, DCe, dce, DCcEe, DcEe. Cette liste de systèmes des groupes sanguins n’est pas exhaustive, on dénombre actuellement une trentaine de systèmes de groupes sanguins. Parmi eux citons le groupe Kell avec deux antigènes K et k. K est présent chez 10% des sujets (Kell +) tandis que k est commun à tous ; le groupe Duffy avec les antigènes Fya et Fyb déterminant les phénotypes :Fy(a+b+) et Fy(a+b-) = Duffy+, Fy(a-b+) et l'exceptionnel Fy(a-b-) = Duffy- ; le groupe Kidd avec deux antigènes : Jka (présent chez 75% des sujets, désignés "Kidd+") et Jkb. ; Et bien d'autres (une trentaine au total).

 

        Un autre polymorphisme immunologique bien connu chez l'homme est celui du système HLA (Human Leucocyte Antigen), appelé aussi complexe majeur d’histocompatibilité (CMH), mis en évidence au niveau des leucocytes et des plaquettes sanguines. Ce polymorphisme implique 6 gènes étroitement liés, portés par le chromosome 6. Chaque gène comporte de très nombreux allèles, ce qui conduit à une diversité quasi infinie des combinaisons ce qui assure l'identité immunitaire de chaque individu.

  • Polymorphisme chromosomique

Ce polymorphisme peut être dû soit à une variation du nombre des chromosomes (euploïdie, aneuploïdie) soit à un changement de leur structure (délétion, duplication, inversion, translocation). C’est le cas d’aneuploïde provenant de non-disjonction des chromosomes homologues en méiose : exemples la trisomie 21, la trisomie  des chromosomes sexuels : 44 a+ XXY,  44a+ XXX, 44a+ XYY ;  la tétrasomie des chromosomes sexuels 44a + XXXX, 44a +  XXXY, …). 

 

  • Polymorphisme épigénétique

 

         Lorsque la variabilité d'un caractère n'a aucune base génétique, c'est à dire ne fait pas intervenir de modification de séquence d'ADN, elle est qualifiée de variabilité épigénétique. Cette variabilité résulte souvent de l'action des facteurs environnementaux sur l'expression phénotypique d'un caractère (température, alimentation, physico-chimie de l'environnement, etc). Lorsque la variabilité d'une population présente un déterminisme uniquement épigénétique, on parle de polyphénisme. Le caractère présente alors une plasticité phénotypique. Chez l’humain la couleur de la peau est aussi le résultat de déterminisme épigénétique (climat, alimentation). Les individus soumis à un climat tempéré ont tendance à avoir la peau qui blanchit alors que ceux soumis au climat chaud ont la peau foncée. Il y a aussi les empreintes digitales chez les jumeaux homozygotes dont la différence est induite par le milieu (milieu utérin). 

 

       Dans certains cas, cette variabilité épigénétique peut être héritable et donc transmise à la descendance. On parle d'hérédité épigénétique. C'est le cas par exemple des effets maternels qui apparaissent lorsque l'environnement subi par les parents (souvent la mère) a des conséquences sur les caractéristiques des descendants par le biais d'enzymes, protéines, hormones ou d'ARNm transmis à la descendance via le cytoplasme des ovocytes ou pendant le développement embryonnaire précoce.

      Par exemple une étude faite sur une population dont étaient référencés tous les individus ainsi que leur alimentation en fonction des récoltes a montré qu'une grand-mère ayant vécu une famine transmet cette information à sa descendance et par conséquent modifie le code génétique de son petit-fils, qui peut développer des maladies alors qu'il n'a jamais connu de famine. De même les femmes enceintes durant les événements du 11 septembre 2001 ont montré que l'enfant possédait un taux de cortisol plus élevé.

Les modifications épigénétiques constituent l'un des fondements de la diversité biologique

 

  • Origine ou déterminisme des variations 

  

     La variabilité humaine est déterminée donc par deux mécanismes : le déterminisme génétique et le déterminisme épigénétique.  

 

Déterminisme génétique  

 

  • Méiose et crossing-over

  

      L’individu reçoit la moitié de ses chromosomes (23) venant de son père et l’autre moitié (23 chromosomes) venant de sa mère. Ceci marque une première différence génique entre l’individu et ses parents. En effet les cellules sexuelles ou gamètes (ovule et spermatozoïde) contiennent chacune en principe 23 chromosomes grâce à la division réductionnelle qui a lieu au cours de la méiose (mécanisme de production des gamètes).  Lors de la méiose la répartition de ces chromosomes paternels et maternels va se faire au hasard dans les deux cellules filles. Ainsi une cellule peut avoir sur ses 23 chromosomes 18 chromosomes paternels et 5 chromosomes maternels et l’autre cellule fille 18 chromosomes maternels et 5 cellules paternels. Le nombre de combinaison possible est énorme 223 = 8.388.608 d’où la variabilité génétiques des progénitures.  Au-delà de cette réalité lors de la méiose il y a échange entre des portions de chromosomes au cours de la disjonction des paires de chromosomes. C’est le phénomène de crossing-over ou d’ «enjambement». Ceci va augmenter le mixage des gènes d’origine paternelle et d’origine maternelle et donc l’unité génique individuelle et par ricochet la variabilité génétique.

 

  • Mutations

  

        Il arrive qu’un enfant reçoive dans son patrimoine génétique les mutations que subissent  ses parents. Seules les mutations qui apparaissent dans les cellules sexuelles sont celles qui sont transmises d’une génération à l’autre. Elles sont en partie à l’origine de la variation humaine. On distingue :

 

  • Les mutations géniques qui intéressent un segment de l’ADN donc un gène. 

      Des mutations peuvent affecter l’ADN ; Ces mutations affectent la séquence d'un gène concerné (ordre des bases nucléotides d'un gène : adénine, thymine, guanine et cytosine).

Ces mutations sont provoquées par des agents mutagènes tels que certaines réactions chimiques cellulaires de l’organisme, les rayons X, alpha, bêta, ultraviolets (UV), les neutrons, les atomes radioactifs… Ces agents mutagènes peuvent être d’origine différente. Nous avons :

-        Les agents mutagènes naturels à savoir les rayons cosmiques et les radiations terrestres (sols riches en atomes radioactifs), les atomes radioactifs contenus dans les aliments, ou tout simplement par la défaillance des organites responsables de la réparation de l'ADN mal transcrit ou traduit.

 

-       Les radiations artificielles provenant de l’énergie nucléaire, de site de production de l’uranium, les produits radioactifs libérés de l’explosion des bombes pendant les guerres et/ou lors des divers essais de bombes A ou H réalisés à l’air libre.  

 

-       La mutagénicité des produits chimiques : Nos cellules elles-mêmes sont des usines chimiques, certaines molécules fabriquées par l’organisme tel que l’acide nitreux, peuvent réagir directement avec les bases constitutives de l’ADN, d’autres comme le 5-Bromouracile, ont une structure chimique voisine de l’une de ces bases et peuvent se substituer à celle-ci ; dans chaque cas le message génétique est perturbé, une mutation se produit.  En plus nous avons les produits chimiques artificiels tels que la thalidomide, responsable de la naissance de tant d’enfants démunis de bras ou de jambes.

 

On ne peut pas situer avec exactitude parmi les mutations géniques quelle est la part des rayons mutagènes ou des produits chimiques artificiels étant donné que des expériences directes sur l’homme ne sont pas envisageables pour des raisons non seulement éthique, mais pour les générations importantes qu’il faut pour obtenir les résultats de ces expérience.

 

  • Les mutations chromosomiques à modifications de nombre : c’est le cas d’aneuploïde provenant de non-disjonction des chromosomes homologues en méiose : exemples la trisomie 21, la trisomie  des chromosomes sexuels : 44 a+ XXY,  44a+ XXX, 44a+ XYY ;  la tétrasomie des chromosomes sexuels 44a + XXXX, 44a +  XXXY, …). Ces mutations surviennent lors de la division réductionnelle (méiose) des cellules sexuelles chez les parents. Il s’agit d’un défaut ou du moins une anomalie de cette division. Au lieu que la division aboutisse à des gamètes ayant n = 23 chromosomes, on obtient plutôt des gamètes à n = 23 chromosomes + des chromosomes surnuméraires.     

  

  • Les modifications de la structure des chromosomes qui comprennent des délétions, des duplications, des inversions, des insertions et des translocations. Ces mutations surviennent aussi pendant la méiose précisément lors du crossing-over.

  

Ces mutations sont à l'origine de divers polymorphismes  génétiques chez l’humain  (gènes, enzymes ou protéines, chromosomes) et expliquent la variabilité humaine.

 

 

  • Les migrations

  

       Les migrations entrainent la rencontre de deux peuples génétiquement différents. Les unions qui s’opèrent entre ces peuples vont favoriser le brassage génique et amplifier la différentiation et la variabilité génétiques qui existait déjà entre les individus. De nos jours avec les moyens de déplacement sophistiqués et rapides, les populations se déplacent facilement d’une zone du monde à une autre où elles érigent de nouvelles demeures et contractent des unions. Ceci entraine le mélange des gènes et participe à l’hétérogénéité génétique dans la population.  L’une des conséquences de ces migrations est donc le métissage entre les peuples. Par exemple des études hémotypologiques ont qu’Aux Antilles, en Amérique centrale et du Nord, les Noirs sont sur le plan anthropologique, beaucoup plus proches des Blancs que de leurs « cousins » d’Afrique. 

 

Déterminisme épigénétique 

  

          Comme nous l’avons signifié plus haut le terme épigénétique définit les modifications transmissibles et réversibles de l'expression des gènes ne s'accompagnant pas de changements des séquences nucléotidiques. Des changements phénotypiques peuvent se produire spontanément, en réponse à l'environnement, à la présence d'un allèle particulier, même si celui-ci n'est plus présent dans les descendants. On a cité plus haut le cas de variation des empreintes digitales chez les vrais jumeaux  et des caractères induits par la famine et transmis à la descendante. L’épigénétique détermine donc de nombreuse variations de caractères  constatées dans la population humaine.

 

   b-   De la biologie à la culture 

 

      L’être humain est à la fois biologique et social. Et la frontière entre les deux facettes est interminable quand il s’agit de décrire l’humain. Les deux dimension de la condition humaine interagissent et s’interpénètrent. Tout ce que l’on sait de l’émergence  de l’homme montre que son apparition sur terre et la place actuelle qu’il occupe dans le monde des vivants furent possible grâce aux aptitudes de son cerveau d’inventer une culture comme réponse à ses besoins vitaux et sociaux. Ce n’est pas dans la zoologie au sens strict du terme qu’il faut rechercher l’originalité de l’homme mais plutôt dans le psychosocial. Grâce au développement de son cerveau et à la libération de sa main, l’espèce humaine a acquis le haut niveau de connaissance réfléchie qui assure l’apparition d’un moyen de communication logique (le langage conceptuel) et qui permet à l’organisation de sociétés de plus en plus complexes et performantes. La maitrise du feu par l’homo erectus a eu des effets réductionnistes sur les efforts désormais déployés pour la mastication des aliments et donc sur la forme des mâchoires  et des dents en   un mot sur la morphologie du crâne de celui-ci. Ceci a sans doute préparé son évolution vers l’homo sapiens. 

 

            Aujourd’hui encore  chez l’homo sapiens, culture et biologie s’imbriquent. Par exemple les habitudes alimentaires (données culturelles) continuent de transformer le corps biologique. L’expérience de vie, la santé en dépendent très souvent. Les savoirs technologiques sont en rapport avec l’activité du cerveau. L’homme à travers ses comportements est sous la dépendance de l’inné et de l’acquis du biologique et du culturel…

  

D-    Les branches de la Bioanthropologie  

  

         L'anthropologie biologique ne recouvre pas toutes les branches de la biologie humaine, elle n'en retient qu'une partie. Ainsi, l'anatomie, la physiologie, la génétique traitent de l'Homme moyen, identique partout. Tandis que l'anthropologie considère moins l'individu que le groupe, et tantôt il s'agit du groupe humain par rapport aux Primates, tantôt il s'agit des groupes humains entre eux. L'accent est donc mis sur les caractères différentiels plutôt que sur ce qui est commun, sur ce qui sépare plutôt que sur ce qui unit. C'est pourquoi l'anatomie utilisée sera une anatomie comparée, la génétique anthropologique une génétique des populations, etc. De ce point de vue la Bioanthropologie peut être considérée comme la « science des variations ou de la variabilité humaine ». Le but final est de décrire les groupes humains et surtout d'expliquer leurs différences. Ceci découle d'ailleurs de l'évolution de la science anthropologique.

En fonction des différents domaines abordés par l’anthropologie biologique, on distingue trois branches de l’anthropologie biologique, à savoir l’écologie humaine, l’éthologie ou la biologie du comportement, la génétique des populations humaines et la Biologie humaine. 

 

e-      L’écologie humaine  

  

    L'écologie humaine est la sphère de l'écologie associée à homo sapiens, l'espèce de l'être humain. ERNST HAECKEL (1834-1919) la définit comme étant la partie de l'écologie qui étudie l'espèce humaine, l'activité organisée, sociale et individuelle de cette espèce, et son environnement, la biosphère.

 

       L’écologie humaine correspond à un questionnement où la relation entre l’humanité et la nature est abordée essentiellement à partir de la relation entre les populations humaines et leur environnement. A l’écologie générale, l’écologie humaine emprunte l’habitude de raisonner en termes de dynamiques de populations, d’interactivité avec les autres espèces et l’ensemble des conditions de milieu. Mais il est clair que les êtres humains interagissent avec le milieu “ naturel ” en fonction de techniques, de représentations et à travers des organisations fort diverses qui n’ont aucun équivalent dans le monde animal. À ce titre l’écologie humaine s’inscrit dans une démarche interdisciplinaire destinée à examiner les interfaces biologie/culture et société/nature.

 

L'écologie humaine a plusieurs objectifs de nature scientifiques.

 Tout d'abord, elle étudie biologiquement une espèce, l'être humain homo sapiens, qui constitue en lui-même un écosystème.

        Ensuite, elle considère l'environnement biophysique de la vie des humains, à diverses échelles (par exemple, en étudiant l'humain et l'écosystème urbain - la ville, l'écosystème rural - la campagne ou l'écosystème terrestre - la biosphère). Alors qu'il a été négligé par les écologistes, l'être humain est considéré par l'écologie humaine comme un facteur écologique important à présent. L'impact de son activité sur l'habitat et en retour, l'impact des modifications de son environnement sur l'humain lui-même (par exemple, les conséquences de la catastrophe de Tchernobyl en 1986 sur la santé humaine ; il s’agit du passage d’un nuage radioactif provenant de l'explosion de la centrale de Tchernobyl au-dessus d'une bonne partie de l'Europe qui est responsable de contamination encore aujourd'hui) précise les rôles écologiques de l'espèce humaine avec l'écologie globale de la biosphère.

Notons que :

ü  l'espèce a migré et colonisé pratiquement tous les continents. À de rares exceptions près (milieux extrêmement froids ou très arides), les humains se sont implantés sur la totalité de la surface terrestre ou les ressources le permettent;

 

ü  l'être humain modifie son environnement de vie volontairement et consciemment (par exemple, en défrichant des forêts pour construire des villes, en supprimant des marais pour éliminer les moustiques ou en détruisant par peur et ignorance) selon des idéologies culturelles;

 

ü  l'être humain, plus récemment, perturbe les grands équilibres de la biosphère et de la biodiversité par le biais de l’agriculture, des infrastructures urbaines et de l'activité industrielle, par exemple en produisant les  chlorofluorocarbones (CFC) qui entrainent la destruction de la couche d'ozone ;

 

ü  l'être humain agit consciemment et délibérément pour essayer de restaurer certains équilibres écologiques qu'il a lui-même perturbés (par le biais de protocoles internationaux, tels que le protocole de Kyoto) ;

 

ü  l'être humain est une des espèces dont l'activité en un point du globe peut avoir des conséquences importantes en un point complètement différent (par exemple, l'émission des gaz à effet de serre par les pays développés pourrait entraîner un réchauffement climatique qui pourrait aboutir à la disparition du Bangladesh).

 

f-       L’éthologie ou la biologie du comportement  

  

L’éthologie est présente chaque fois qu’observation et description naturalistes sont mises en œuvre. Elle est la science qui étudie le comportement des êtres vivants, animaux, humains.  Le comportement  étant la manière d'agir ou de fonctionner de façon habituelle ou dans un but précis ou encore la réponse à un stimulus.  Le comportement de l'être humain est le reflet de ses désirs et de ses préférences, de ses motivations et de ses affects, de ses pensées et de ses croyances. L’éthologie s’intéresse à des facteurs qui vont faire que tel individu, homme ou animal, va exprimer tel comportement. Les comportements sont réunis en grandes familles de comportements à savoir les comportements sociaux, les comportements territoriaux, les comportements de reproduction, les comportements de communication, les comportements d’alimentation, les comportements de déplacement. L’éthologie interroge aussi  les motivations qui vont conduire l’individu à avoir un certain comportement : les stimuli qui peuvent être endogènes (de l’intérieur) ou exogènes (de l’environnement). Il faut alors s’intéresser à la manière dont le stimulus va parvenir à faire réagir l’individu, à la manière dont le signal le stimule. Ce pourra être par le biais d’un ou de plusieurs des cinq organes de sens, ou par ce que l’on appelle des signaux physiologiques. Elle s’intéresse aussi à la manière dont les comportements se construisent, travaille donc sur l’inné et l’acquis, sur la phylogenèse et l’ontogenèse. 

         Plus précisément l’éthologie humaine a pour objet de porter un regard biologique sur les comportements de l’homme et ses structures sociales. Elle cherche à décrire se que fait réellement un individu (réalité objective) dans un contexte donné. Le champ d’étude de l’éthologie humaine se situant à l’intersection de la biologie et de l’étude du comportement social et individuel, elle apparait comme une discipline à l’interface complémentaire des autres disciplines des sciences humaines.    

   

g-      La génétique des populations humaines  

  

          La génétique est l’étude de la transmission des caractères normaux et pathologique d’une génération à l’autre. Elle permet de mieux expliquer tous les mécanismes de la variabilité génétique (polymorphisme) de l’humain et de comprendre pourquoi nous sommes tous différents les uns des autres (à l’exception des vrais jumeaux). C’est Mendel en 1866, qui élucida les mécanismes de transmission des caractères particuliers à certains individus et non celle des caractères communs à toute l’espèce.   La génétique des populations quant à elle est une application, commencée dans les années 1920 à 1940 par RONALD FISHER, J. B. S. HALDANE et SEWALL WRIGHT, des principes fondamentaux de la génétique mendélienne à l'échelle des populations. Cette application a permis de faire la synthèse entre la génétique mendélienne et la théorie de l'évolution, donnant ainsi naissance au néo-darwinisme (théorie synthétique de l'évolution).

  

       La génétique des populations humaines traite donc des fluctuations des fréquences des différentes versions d'un gène (allèles) au cours du temps dans les populations  humaines, sous l'influence de la sélection naturelle, de la dérive génétique, des mutations et des migrations. Ces différents facteurs sont appelés des "pressions évolutives". Les fluctuations de fréquence des allèles sont la première étape de l'évolution. En effet, la fixation de certains allèles peut conduire à des adaptations. Par la suite, l'accumulation d'adaptations différentes dans différentes populations peut conduire au processus de spéciation.

 

 Les êtres vivants et les êtres humains en particulier possèdent tous de l'ADN. L'étude de cet ADN pour une population et la comparaison de cet ADN avec l'ADN d'autres populations constituent la base de la génétique des populations.

 

  Nous possédons 22 paires de chromosomes dit homologues (ou autosomes) et deux chromosomes dit sexuels (ou gonosomes). Par ailleurs, nous possédons aussi de l'ADN dit mitochondrial (ADN-mt ou mt-DNA en anglais) qui n'est pas à proprement parler un chromosome. Cet ADN-mt se transmet intégralement de la mère aux enfants. En revanche, seuls les hommes possèdent le chromosome sexuel appelé Y (ADN-Y ou Y-DNA en anglais) qui se transmet donc intégralement du père aux fils.

 

Notre ADN peut parfois muter, c'est-à-dire qu'un des éléments de base (58 millions de paires de bases pour l'ADN-Y et 16000 paires de bases pour l'ADN-mt) qui le constitue se transforme lors de la recopie de cet ADN. Le résultat de cette mutation s'appelle polymorphisme nucléotidique simple (SNP en anglais). Cette mutation arrive très approximativement une fois toutes les 25 à 500 générations pour l'ADN-Y pour l'ADN-mt (il n'y a pas de consensus à ce sujet)

 

      En plus des chromosomes contenus dans le noyau, les cellules humaines possèdent de l'ADN contenu dans les mitochondries. Cette information génétique est transmise essentiellement par la mère à 99 %, car les mitochondries sont surtout transmises par le cytoplasme de l'ovocyte. Comme cet ADN n'est pas soumis aux lois génétiques de la reproduction sexuée, il n'est pas ou peu soumis aux recombinaisons génétiques. Cependant le taux de mutation reste relativement élevé. Ces raisons font que cet ADN a été privilégié pour l'étude des grandes migrations humaines depuis 200 000 ans en partie à l’origine de mélange de certains gènes entre populations de cultures différentes.

 

          En somme la génétique des populations humaines s’intéresse à l’hérédité des caractères normaux et pathologiques, la variabilité génétique (marqueurs génétiques et polymorphisme), les mutations, les migrations,   la théorie synthétique de l’évolution. Elle a des applications en épidémiologie où elle permet de comprendre la transmission des maladies génétiques. Elle est une discipline des sciences de la vie faisant un fort usage d'outils génétiques et mathématiques.

 

h-     La biologie humaine  

  

         La biologie humaine est l’étude de l’homme dans sa constitution morphologique, cellulaire  et biochimique. Elle s’intéresse également à l’évolution ontogénétique depuis la conception jusqu’à la disparition de l’individu et tous les mécanismes de croissances qui participent à cette évolution. Les principales orientations de la biologie humaine dans la perspective anthropologique seront donc l’anatomie comparée (morphologie), la biologie de la reproduction, la croissance (enfance, adolescence), le vieillissement (cellules, biochimie : anthropologie du vieillissement), la nutrition (anthropologie nutritionnelle), la santé et les infections.  Tous ces éléments sont abordé dans une approche de la relation biologie et culture. On peut par exemple décider d’étudier la représentation socioculturelle de la naissance (biologie de la reproduction) de jumeaux dans une société donnée. Ou encore les conséquences biologiques de pratiques culturelle touchant l’intégrité biologique de l’homme (l’exemple de l’excision).  On peut de même étudier les habitudes alimentaires de deux populations différentes et leurs conséquences sur leur expérience de vie, ou sur leur état de santé afin d’en tirer des conséquences (l’exemple de l’obésité).

 

 

 

 

 

 

 

                                                    Environnement  

                                 

 

ECOLOGIE HUMAINE                                                        GENETIQUE HUMAINE

 

 

 

 

 

 

 

Comportement                                                                                                    Gène 

 

Génotype

 

 INNE

 

 

 

 

 

 

ETHOLOGIE HUMAINE                                                                   BIOLOGIE HUMAINE

 

 

                                                  Biologie (organisme)  

  

  

  

CONCLUSION 

  

        Par convention, l'anthropologie sous-entend l'anthropologie physique (ou biologique), tandis que l'anthropologie culturelle est désignée par son autre nom, l'ethnologie. Cependant, cette acception des mots n'est pas universelle : dans les pays anglophones, l'anthropologie désigne l'ensemble des quatre disciplines, tandis qu'en Europe continentale elle a le sens restreint d’anthropologie physique (ou biologique) regroupant la paléontologie humaine et la biologie humaine et l’anthropologie sociale (ou ethnologie) désignant la science de la culture humaine, l’archéologie et la préhistoire étant considérées comme des spécialités de l’Histoire.

       De même que la zoologie étudie les animaux du point de vue de leur morphologie et de leur mode de vie, de même l'anthropologie porte aussi bien sur les traits physiques, la biologie et la génétique- c'est alors l’anthropologie biologique - que sur les mœurs et coutumes qui intéressent l’anthropologie culturelle (ou ethnologie). De plus, les connaissances acquises sur les hommes fossiles ont conduit à développer deux autres disciplines, qui prolongent les précédentes dans le passé : la paléontologie humaine (ou paléoanthropologie) et l’archéologie (ou l’archéoanthropologie). Ces différentes disciplines de l’anthropologie son en interconnexion 

 

         L’anthropologie biologique (ou anthropologie physique)  a débuté au XVIIIe siècle. Elle a d’abord été l’affaire de spécialistes de la médecine, la biologie et les sciences de la nature (Edward TYSON 1650-1708, Comte de BUFFON 1707-1788, Carl LINNE 1707-1778, Johann F. BLUMENBACH 1752-1840, P.P. BROCA 1824-1880, …). Elle fut d’abord une science de classification des peuples du monde en « races » hiérarchisées avant d’être une science des différences biologiques et du polymorphisme humain grâce à l’apport de la génétique et de la sérologie (hématologie).

 

            L’anthropologie biologique s’intéresse à l’étude de l’homo sapiens (homme actuel) dans son unicité et sa variabilité biologique et forme un pont entre les sciences du vivant et les sciences humaines. Elle est à la fois une science du bios et de la culture. Elle concilie donc les sciences de la nature et les sciences de l’homme.

 

         On ne peut faire de la bioanthropologie en excluant la culture et le social qui conditionnent la dimension biologique de l’homme. La bioanthropologie peut et doit se classer parmi les sciences humaines même si au plan académique, elle se trouve logée dans les facultés de médecine ou de biologie, elle ne doit pas nier sa dimension culturelle et sociale.  

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

BIBLIOGRAPHIE   

  

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Bertrand JORDAN, L’humanité au pluriel, la génétique et la question des races, éditions Seuil, 2008, 230 p.

  

Charles ROUX, L’hérédité, CASTERMAN, 1974, 168 p.

  

Charles SUSANNE, Esther REBATO, Brunettto CHARELLI, Anthropologie biologique, évolution et biologie humaine, De boeck, 2003, 763 p. 

 

E.E. EVANS-PRITCHARD, Anthropologie sociale, Petite Bibliothèque Payot, 1977, 177 p.  

 

Jacques RUFFIE, De la biologie à la culture, Flammarion, 1978, 594 p.

 

Jean CHALINE, Quoi de neuf depuis Darwin ? La théorie de l’évolution des espèces dans tous ses états, Ellipses, 2007, 480 p.

 

 

 


05/04/2013
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